Avec 50 ans de carrière derrière la cravate, la danseuse et chorégraphe montréalaise Margie Gillis s’apprête à présenter un ultime long solo, OLD, à l’Agora de la danse.
La pionnière de la danse moderne ne quitte pas le métier pour autant, bien au contraire: elle continuera de danser avec d’autres, de chorégraphier et de livrer des courts solos. En entrevue avec Métro, elle assure avoir encore une foule de projets qui la motivent. «J’ai très hâte de découvrir la suite», répète-t-elle en ponctuant ses phrases du charmant rire qui, avec sa longue chevelure, lui fait office de signature.
Il est là, le sujet de son spectacle à l’affiche du 9 au 12 mars: chaque nouvelle étape de la vie vient avec son lot de deuils, oui, mais aussi de découvertes.
Entre la perte et le nouveau
«En vieillissant, on devient plus faible physiquement, on a peur de tomber, on a plus de douleurs, on doit changer notre diète, nos intérêts changent, notre capacité change», énumère Margie Gillis, membre de l’Ordre du Canada et de l’Ordre national du Québec.
«Mais si on embrasse ça avec une curiosité, l’énergie qui connecte chaque chose est plus présente, plus claire.»
C’est ce mélange de pertes et de nouveautés que l’artiste cherche à illustrer par sa chorégraphie qu’elle décrit comme «toute dans le moment», à l’image d’une improvisation sans en être une.
Elle y déploie son corps par des mouvements circulaires, comme pour rappeler le cycle de la vie, mais aussi par des chutes et des remontées, pour exprimer ce chemin cahoteux, mais pas moins beau. «Vieillir, c’est un passage, philosophe-t-elle. C’est sûr que c’est un défi, mais la vie, c’est toujours un défi.»
Face à l’âge
Margie Gillis, 69 ans, accumule des notes sur ce qu’elle-même confronte en vieillissant, mais aussi ce qu’elle a observé chez sa mère, l’athlète olympique Rhona Wurtele, décédée à 98 ans, et la jumelle identique de celle-ci, Rhoda, qui a récemment célébré ses 101 ans.
«J’ai vu plusieurs amis capables d’embrasser leur âge, le confronter en le regardant directement dans les yeux», indique la danseuse qui souhaite faire de même. Connecter avec chaque facette d’elle-même, incluant son âge, lui assure une certaine «sagesse expérientielle» qui profite à tout le monde, croit-elle.
Justement, l’artiste est bien connue pour la portée sociale de ses spectacles. OLD, bien qu’il puisse sembler plus intime, n’y fait pas exception. «Le spectacle parle de société, parce que ça parle de vieillir. Et ce n’est pas juste pour les personnes qui sont âgées. Il faut dire aux jeunes que vieillir, ce n’est pas juste des difficultés.»
La crinière devenue blanche
On l’évoquait d’entrée de jeu, la chevelure en cascade de Margie Gillis est une de ses signatures depuis 50 ans.
«Mes cheveux, c’est une partie de moi, raconte-t-elle. C’est important pour moi, parce que je perdais mes cheveux quand j’étais jeune à cause de l’alopécie. Quand j’avais 13 ans, j’ai dit aux anges que s’ils laissaient mes cheveux pousser, je ne les couperais pas. Alors je les laisse pousser!»
Regarder son âge en face, c’est aussi porter sa crinière blanche avec la même fierté qu’à l’époque où elle était brune.
«Je veux découvrir ce que c’est vieillir, lance Margie Gillis. Je ne veux pas changer quelque chose, je veux trouver ce qui est là organiquement. On entend toujours dire qu’on n’est pas belle quand on vieillit, qu’on perd notre sensualité. Pas du tout!»