Les décisions récentes de l’Ordre des infirmières et du Barreau du Québec en matière de formation continue ne laissent aucun doute sur les exigences de plus en plus grandes imposées aux travailleurs du Québec.
En décembre 2010, l’Ordre des ingénieurs du Québec adoptait un règlement rendant obligatoire la formation continue pour ses membres. En octobre dernier, l’Ordre des infirmières et des infirmiers du Québec mettait à son tour en place des mesures de transition pour instaurer la formation continue obligatoire au sein du milieu – un incontournable, selon Margot Phaneuf, chercheuse universitaire et consultante sur la scène internationale qui a souvent pris position sur le sujet.
«Il y a de nouveaux médicaments, de nouvelles façons d’administrer les médicaments, de nouvelles techniques. La formation continue obligatoire est, selon moi, nécessaire. Autrement, les infirmières peuvent devenir dangereuses.»
La chercheuse souligne que les poursuites à la suite d’erreurs médicales sont de plus en plus courantes. «Ça, c’est un incitatif à se mettre à jour.»
À l’instar de son pendant de la Colombie-Britannique, le Barreau du Québec a décidé de rendre obligatoire la formation continue pour ses 24 000 membres en 2009. Aux États-Unis, précise Me Laurette Laurin, la mesure a été adoptée depuis de nombreuses années déjà.
Me Laurin ajoute que la plupart des membres du Barreau, comme dans les autres professions, prenaient déjà l’initiative d’améliorer leurs compétences. L’obligation de se former de façon continue a bien suscité une certaine résistance, une réaction à laquelle il a fallu répondre en instaurant une «culture» de la formation continue, explique-t-elle. «La plupart des ordres professionnels, comme ceux des comptables et des notaires, ont une formation continue obligatoire», précise-t-elle.
Mais au-delà des ordres professionnels, le marché du travail, de plus en plus compétitif, impose cette culture de la formation continue. C’est ce qu’a compris depuis longtemps le diffuseur public, Radio-Canada, qui offre diverses formations continues à ses employés, que ceux-ci soient cadres, journalistes, techniciens ou administrateurs.
La formation continue vise en premier lieu à se mettre à jour, mais elle a d’autres objectifs, selon Francine MacInnis, de Radio-Canada.
«Une priorité de développement très importante dans le marché du travail, et chez nous également, c’est la possibilité d’élargir ses compétences professionnelles. Cette priorité est très importante parce qu’elle répond à une motivation humaine de grandir, mais elle contribue aussi à la sécurité d’emploi, et en ces temps économiques très difficiles, tout le monde se préoccupe de leur employabilité. Alors, tout ce qu’on peut faire pour aider les employés à participer à des mandats ou à des projets qui contribuent à leur croissance, on le fait», conclut-elle.
Faciliter la vie des professionnels
Comme partout ailleurs en Occident, des milliers de travailleurs québécois sont maintenant obligés de suivre une formation continue. Si ces nouvelles mesures peuvent paraître contraignantes à certains, les ordres professionnels font tout en leur pouvoir pour rendre la vie plus facile à leurs membres.
Sur une période de deux ans, les infirmiers, avocats, comptables ou ingénieurs du Québec doivent maintenant se soumettre à une formation continue obligatoire d’une trentaine d’heures. Pour la plupart des ordres, la présence à un congrès professionnel est une façon d’effectuer certaines des heures exigées. S’ajoutent à ces grands rassemblements des ateliers et des séminaires qui traitent de sujets du jour.
Pas facile, cependant, de s’assurer que tous suivent cette formation obligatoire. L’Ordre des infirmières et des infirmiers du Québec a, par exemple, à administrer la formation de 70 000 membres. Au Barreau du Québec, les 24 000 membres ne rendent pas l’exercice plus facile, d’autant plus que chaque activité de formation doit être analysée par le comité de formation du Barreau. Pour la période de référence actuelle (deux ans), cela veut dire plus de 6 000 activités de formation offertes par plus de 500 dispensateurs.
Étant donné que plus de 50 % des avocats n’exercent pas nécessairement le droit, mais ont tout de même le devoir de se conformer aux exigences de leur ordre, le Barreau accepte des formations qui ne traitent pas toujours de droit. Et suivant les désirs de ses membres, le Barreau est en train d’analyser la possibilité d’offrir des formations sous forme de mentorat.
