Plan d’affaires révisé, nouvelles initiatives marketing: les entrepreneurs québécois font tout pour «se repositionner» et rester hors de l’eau au temps de la COVID-19. La vente en ligne peut-elle les sauver à l’heure d’Amazon?
«C’est sûr qu’il y a plus de la moitié des entreprises que je conseille qui sont en mode survie. L’autre moitié est en train de se repositionner», indique à Métro Pierre Lemieux de PME MTL.
«Mon souci est de savoir si le talent qu’on a ici sera encore là lors de la relance. Ou bien en train de développer un autre créneau d’affaires», déplore celui qui offre ses conseils stratégiques aux entreprises créatives et culturelles.
C’est donc pour soutenir ces entrepreneurs que PME MTL a lancé trois initiatives dans le cadre de son 5e anniversaire: les boîtes gourmandes Fête ici, des boîtes expérientielles, ainsi qu’une projection artistique présentée en hommage aux entrepreneurs à Montréal.
La nécessité de se repositionner
Au Zoo Ecomuseum de Sainte-Anne-de-Bellevue, on participe à l’initiative de PME MTL. Un consommateur peut acheter des billets qu’il pourra utiliser quand le Québec déconfinera. Et ainsi, aider le zoo.
Celui-ci a dû faire preuve de «beaucoup d’imagination» pour compenser une perte de revenus de l’ordre de 90%, comme l’explique à Métro la directrice des communications, Émilie Sénécal.
En plus d’avoir entre autres créé des visites virtuelles, le zoo va lancer une boutique de souvenirs en ligne pour tenter de générer un peu de revenus, avec des produits à 95% québécois.
Pour Mme Sénécal, consommer local est aujourd’hui une nécessité.
«Je crois que les gens ont une volonté plus grande d’acheter local quand ils voient les défis auxquels sont confrontés les entrepreneurs d’ici. Le local est là pour rester!» – Émilie Sénécal, Zoo Ecomuseum
La vente en ligne: pas si simple!
Les commerces alimentaires, eux aussi, ont dû jouer la carte de la boutique en ligne. Mais tout n’est pas si simple.
Pour ceux qui le faisaient déjà avant la crise, la pandémie a agi tel un «accélérateur», comme l’explique Alex Sereno, cofondateur de Barista, pour qui la COVID a eu un impact énorme sur les ventes.
«C’est ce qui a fait la différence. Ça fait des années qu’on est une marque digitale, très présente en ligne, mais le confinement a accéléré tout ça», dit M. Sereno qui participe aussi aux boîtes gourmandes de PME MTL.
Pour lui, «shifter vers le e-commerce pour générer des revenus» sur sa propre plateforme de vente de café fut l’une de ses réussites durant la COVID.
En revanche, pour ceux qui ne faisaient pas déjà de la vente en ligne, comme Emilio Hernandez de La Mexicoise, leur existence est davantage menacée. Il voit d’ailleurs sa participation à l’initiative de PME MTL comme une nouvelle opportunité de marketing.
«Si je n’arrive pas à avoir assez de ventes pour combler les besoins minimaux, je serais obligé de fermer l’entreprise», explique M. Hernandez qui d’ordinaire vend et fait découvrir les insectes comestibles aux consommateurs.
Pour développer ses ventes, Emilio Hernandez s’est même tourné vers Amazon.
«Je vais essayer cette stratégie en ligne, car je fais preuve de persévérance, mais si cela ne fonctionne pas, je vais fermer. Je me donne un délai de 6 à 8 mois.» – Emilio Hernandez, propriétaire de La Mexicoise
Amazon, meilleur ennemi?
S’il est une menace pour certains commerçants, Amazon peut parfois se révéler une «opportunité.» C’est que nous explique Alexandre Skerlj, expert en logistique du commerce électronique.
«Un fabricant québécois pourra utiliser Amazon comme un canal de marché pour exporter ses produits ou étendre ses marchés au Canada et ailleurs», indique-t-il à Métro.
Le défi de taille se situera plutôt du côté de la «performance logistique», selon lui.
«Amazon est capable de promettre de courts délais de livraison, de la gratuité, une facilité de retour de produits. Le consommateur s’est habitué à cette rapidité et à cette facilité. Il a développé certaines attentes quant à cette performance logistique.» -Alexandre Skerlj, expert en logistique du commerce électronique.
Voilà, peut-être, de quoi expliquer la récente hausse de 40% du chiffre d’affaires d’Amazon.
Et pour les détaillants qui voudraient rivaliser avec le géant, c’est encore plus compliqué.
Le cumul des coûts d’emballage, de préparation de commandes, de livraison, de marketing du site d’achats/ventes, et même d’éventuels retours de produits, peut ainsi grimper si vite que ce ne soit même plus rentable, explique M. Skerlj.