Le crowdfunding, ou sociofinancement, est une méthode participative de financement populaire rendue possible grâce à l’internet.
Peu connue au Québec, cette approche a pourtant le vent en poupe chez nos voisins du sud et s’implante de plus en plus en Europe. Et pas seulement dans les milieux alternatifs, oh que non!
Il y plus de 20 ans, alors qu’il était inconnu du grand public, le chanteur Richard Desjardins, qu’aucune maison de disques ne voulait produire, a demandé aux personnes qui assistaient à ses spectacles et à des amis de l’aider à autoproduire son second album, Tu m’aimes-tu? (1990). En échange d’une dizaine de dollars, l’artiste s’engageait auprès de chaque souscripteur à lui remettre un exemplaire du disque une fois que celui-ci serait terminé. Non seulement cela fut fait, mais en un temps record l’œuvre s’écoula à 100 000 exemplaires, et Desjardins connaît encore aujourd’hui le rayonnement que l’on sait.
Voilà exactement en quoi consiste le principe du sociofinancement sur l’internet : donner de l’argent en échange d’une promesse de récompense pour un projet auquel on croit.
«Le système des comités de pairs qui, dans la culture par exemple, détermine qui peut recevoir ou non du financement est de moins en moins adéquat pour juger si une œuvre doit être financée ou non. Et ce système est souvent incestueux. En plus, il faut déployer énormément d’énergie pour remplir des formulaires, voire embaucher quelqu’un pour le faire, sans parler du fait que les subventions sont de plus en plus attribuées selon des enveloppes à la performance et de moins en moins aux créateurs», analyse la romancière et ancienne top-modèle Audrey Benoît, qui a lancé Haricot, la première plateforme de sociofinancement au Québec, en compagnie de son associé Thomas Duperré en août 2011.
Depuis, pas moins de sept projets ont atteint les objectifs financiers fixés à l’origine, dont un pour les producteurs du documentaire Chercher le courant, et une dizaine d’autres, parmi lesquels un album folk rock et un jeu vidéo, sont actuellement en voie d’atteindre leurs objectifs.
Mais cela ne se fait pas par magie : après avoir fait accepter son projet par l’équipe, Audrey et son associé, il faut aussi aider à faire connaître le site Haricot en le diffusant sur les réseaux sociaux et auprès de son entourage. Bref, le retour du bon vieux Do It Yourself de la culture punk, désormais adapté à l’ère du ouèbe. Si ça marche?
En France seulement, quelque 40 millions d’euros ont été amassés pour soutenir 60 000 projets en 2012 et le très respecté magazine Forbes prévoit une explosion de cette pratique participative en 2013 aux États-Unis où un milliard de dollars ont été donnés ou prêtés l’an dernier sous diverses plateformes. Vous avez dit avenir?
Un sociofinancement réussi
Grâce à leur campagne de sociofinancement, Véronique Saint-Pierre et Véronique Lecours ont pu lancer en août dernier Crème & Cassonade, une boutique en ligne consacrée à la vente de vêtements et d’objets ayant pour thématique le sucre et les pâtisseries.
«Après avoir essuyé quelques refus, notamment de responsables de programmes pour jeunes entrepreneurs, parce que nous n’habitions pas la même ville ou n’avions pas pignon sur rue, nous avons décidé de faire appel au sociofinancement, indique Véronique Lecours. C’est en effectuant des recherches sur l’internet que nous avons découvert Haricot. Comme il s’agissait d’une plateforme québécoise, cela correspondait tout à fait à l’esprit de notre projet. Et comme les gens d’ici ne sont pas habitués à ce type de financement, on s’est dit que cela nous aiderait si nous faisions affaire avec une plateforme d’ici. Nous avons recueilli 1 000 $ en 23 jours, ce qui nous a permis de payer les frais d’ouverture de notre site web», résume Mme Lecours qui devrait accoucher dans quelques jours et dont les projets d’affaires sont loin d’être terminés…
Véronique Lecours (à gauche) et Véronique Saint-Pierre/collaboration spéciale