L’Ordre des chimistes du Québec appelle le gouvernement à faire preuve de plus de prudence en ce qui a trait à son projet d’assouplissement des normes de nickel dans l’air. «La santé et l’environnement doivent avoir préséance sur les questions économiques», explique l’organisme.
L’Ordre des chimistes du Québec invite le ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC), Benoit Charette, à faire preuve d’une prudence et d’une prévoyance plus importantes dans l’ajustement de la norme journalière de nickel permise dans l’air. La norme journalière passerait de 14 nanogrammes par mètre cube à 70 ng/m3. La Santé publique avait suggéré qu’elle passe à 40 ng/m3. La nouvelle norme annuelle, elle, sera établie à 20 ng/m3.
«Pourquoi le gouvernement préconise-t-il une norme journalière de nickel dans l’air de 70 ng/m3, soit 3,5 fois supérieure à la limite établie pour prévenir les effets respiratoires chez les individus sensibles?», se questionne l’Ordre des chimistes du Québec. Le projet de règlement modifiant le Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère, toujours en consultation, pourrait viser une valeur cible de 40 ng/m³ pour prévenir les effets respiratoires chez les individus plus sensibles.
L’Ordre demande à ce que l’augmentation de la limite de nickel dans l’air soit abordée par le gouvernement avec davantage de précaution. «Présentement, ce n’est pas ce que l’on voit: on envisage des modifications sur la santé et sur l’environnement des Québécoises et des Québécois sans se poser toutes les questions déterminantes», affirme le président de l’Ordre, Michel Alsayegh.
Augmenter la norme pour l’économie?
Le député péquiste Sylvain Gaudreault a récemment interpellé le ministre Benoit Charrette à ce sujet. «La Loi sur le développement durable l’indique clairement: vous devez appliquer le principe de précaution. J’ajouterais que nul prétexte économique ne saurait justifier qu’on abaisse ainsi nos standards», a écrit le porte-parole du Parti québécois en matière d’environnement.
Jusqu’ici, le gouvernement a surtout misé sur des arguments économiques. Le nickel fait partie des minerais stratégiques pour la production de batteries électriques. Le Québec souhaite veut se positionner en tant que leader dans l’industrie de la fabrication et le recyclage de véhicules électriques. En augmentant la norme de nickel dans l’air, le gouvernement veut se donner la possibilité d’augmenter l’extraction de ce minerai et ainsi répondre à la demande grandissante.
«Une norme sur le nickel plus contraignante qu’ailleurs dans le monde et dans le reste du Canada pourrait réduire l’attractivité du Québec en matière d’investissements additionnels dans le secteur du nickel, alors que le contexte mondial semble propice au développement de nouveaux projets», est-il indiqué dans le projet de règlement du MELCC.
M. Gaudreault demande au ministre Charette de ne «pas prendre de chance». «Quand il n’y a pas d’unanimité ou de consensus scientifique, quand il y a encore des données à recueillir, on prend pas de chance. Dans ce cas-là, on est en plein dedans.»
«À ce stade-ci, je ne vois pas d’autres raisons que purement économiques. Du point de vue de la santé publique, cela ne se justifie pas. Du point de vue de l’acceptabilité sociale, ça ne se justifie pas. Du point de vue de l’environnement, ça ne se justifie pas. Par élimination, cela ne semble être que pour des raisons économiques», précise Sylvain Gaudreault en entrevue avec Métro.
L’Ordre des chimistes du Québec indique ne pas avoir trouvé de réponses satisfaisantes dans les documents publiés par le gouvernement. «Par-dessus tout, la santé et l’environnement doivent avoir préséance sur les questions économiques légitimes à l’origine de cet exercice», soutient l’Ordre. Le projet de règlement mentionne qu’en ce qui concerne les impacts sur les citoyens, les modifications permettent de prévenir et de limiter les impacts sur la santé publique à un niveau qualifié d’acceptable.
Les consultations entourant la nouvelle norme pour le nickel se termineront le 20 février 2022, à l’issue d’une période de consultation exceptionnelle de 60 jours.