Un homme qui fait du ménage et qui gagne moins d’argent que sa femme est-il toujours viril? Plusieurs personnes se posent encore la question. C’est ce qu’a découvert la sociologue Marie-Ève Surprenant à partir d’entrevues réalisées auprès de 16 individus.
Dans le livre Jeunes couples en quête d’égalité, qui paraît aujourd’hui, l’auteure a cherché à savoir dans quelle mesure les enfants des baby-boomers sont en rupture avec les modèles de couple traditionnels. Si tous les sujets interrogés se sont dits en faveur de l’égalité, la recherche fait état d’un réel décalage entre la perception et l’application.
Par exemple, plusieurs femmes déclarent souhaiter des pratiques égalitaires, mais tentent de valoriser la virilité de leur conjoint, particulièrement lorsqu’elles sont plus scolarisées et mieux rémunérées que lui. Une des participantes citées dans le livre affirme : «Je le laisse accrocher les cadres, rentrer le bois. Ce n’est pas parce que je n’aimerais pas le faire… mais ça me plaît de penser qu’il fait sa « job » d’homme.»
De plus, elles se gardent souvent de réclamer plus d’investissement de la part du conjoint dans la sphère domestique, afin de préserver la stabilité. «Les femmes fondent beaucoup d’espoir dans leur relation et leur famille, et elles ont peur que leur couple éclate si elles sont trop égalitaires», explique Mme Surprenant.
Un poids sur les épaules des femmes
Du côté de l’homme, bien qu’il soit de plus en plus présent au sein de la famille, il demeure «l’aidant» ou «l’exécutant». «Une grosse charge mentale repose sur la femme. C’est encore elle qui est responsable de la conciliation travail-famille», affirme la sociologue. «Même lorsque l’égalité est bien réussie, ça accroche encore sur le plan de l’organisation. L’homme doit acquérir une organisation globale, penser à faire les choses.»
Marie-Ève Surprenant, qui détient une maîtrise en sociologie et en études féministes de l’Université du Québec à Montréal, considère que tout n’a pas encore été dit sur l’égalité de sexes. «Les médias véhiculent l’idée que l’égalité est acquise, qu’il n’y a plus d’obstacle. Et la pensée antiféministe affirme que le féminisme est allé trop loin. C’est un discours erroné. La question de l’égalité n’est pas réglée, loin de là. Et c’est encore la femme qui en paie le prix.»