La récession frappera-t-elle le Québec en 2023? Il n’y a pas de consensus chez les experts. Une chose semble cependant claire: l’économie va ralentir.
Invités sur la tribune de la Chambre de commerce de l’Est de Montréal ce vendredi midi, lors de son traditionnel Rendez-vous économique, deux grands économistes ont posé leur regard sur les principaux indicateurs à surveiller en 2023, à la fois au Québec, au Canada et à l’échelle mondiale.
L’économiste en chef de la Banque de développement du Canada (BDC) et vice-président à la recherche Pierre Cléroux demeure optimiste et croit que le Québec va éviter la récession en 2023, ou du moins, vivre une légère décroissance sans trop d’effets négatifs sur les entreprises.
Pour sa part, l’économiste principal chez Desjardins Francis Généreux affirme qu’il est évident que l’économie mondiale va bientôt tomber en récession, entraînant dans son sillage celle du Canada et du Québec.
Le regard optimiste
Deux jours après l’annonce de la BDC d’un huitième relèvement du taux de base, Pierre Cléroux a rappelé que le pays a traversé, en 2021 et en 2022, deux années de forte croissance qui ont poussé l’économie au-delà de sa capacité à produire des biens et services.
Le taux de chômage bas, le plein emploi, les effets de la pandémie et la guerre en Ukraine ont eu pour effet d’exercer de la pression sur l’inflation, qui, en juin dernier, a grimpé à 8,1%. Pour 2023, la clé est le niveau d’inflation qui va fixer les taux d’intérêt.
Pierre Cléroux, économiste de la BDC
Il précise que des signes encourageants se pointent à l’horizon, alors que l’inflation a diminué à 6,3% au cours de la dernière année. Dans le dernier trimestre, elle a été évaluée à 1%.
Un autre signe encourageant provient de la BDC, qui a annoncé mercredi une pause dans le relèvement des taux. Pierre Cléroux prédit une baisse des taux d’intérêt pour la fin de 2023, avec un taux qui devrait atteindre 2,5% en 2024.
Une récession modeste
Selon le Mouvement Desjardins, il y aura plutôt une «légère» récession en 2023, causée principalement par la hausse successive du taux directeur des banques centrales depuis le début de l’année 2022 et ce, afin de purger l’inflation de l’économie.
«La BDC a procédé à sa huitième hausse depuis l’année 2022, portant son taux directeur à 4,5%. La raison de ces hausses consécutives est bien sûr de faire fléchir la hausse de l’indice des prix à la consommation, qui atteignait 6,9% en octobre dernier, et le ramener dans la moyenne annuelle de 1 à 3%», soutient l’économiste principal chez Desjardins Francis Généreux.
Ce sont des causes à effet et non pas seulement l’économie, comme en 2008, qui vont provoquer la récession. Ici, c’est la hausse des taux d’intérêt et la hausse du coût de la vie qui font que les ménages les plus fragiles ne peuvent plus se permettre de consommer autant.
Francis Généreux, économiste ches Desjardins
Francis Généreux ajoute que la récession de 2023 sera combinée à une pénurie de main-d’oeuvre. «Pour cette raison, ça va faire beaucoup moins mal pour le marché du travail, même si l’on remarquera tout de même certaines mises à pied. Mais cela ne se comparera jamais à ce que l’on a connu dans les récessions passées.»
Finalement, les deux économistes s’accordent pour affirmer que l’économie va reprendre un rythme «normal» dès le début de l’année 2024.