Il y a un peu plus d’un an, alors que les restrictions étaient au plus haut, deux jumeaux de 13 ans, Rafael et Mateo Cardenas, ont commencé à divertir par appel vidéo leur grand-mère de 90 ans qui habite au Pérou. L’idée s’est vite propagée dans l’entourage de cette dernière et de la famille. Ainsi, d’autres dames âgées, et pour la plupart isolées, se sont jointes à la réunion hebdomadaire. Depuis, les jumeaux organisent chaque vendredi des activités ludiques, de mathématique, musique, histoire ou écriture pour dix d’entre elles.
Décembre 2020, les frontières sont fermées dans de nombreux pays, et les rencontres se font de plus en plus difficiles. Patricia Zambrano, une habitante du quartier Saint-Laurent depuis 16 ans, s’inquiète pour sa mère de 90 ans, Hilda, restée vivre au Pérou et qui est très isolée. «Quand on se parlait, elle me racontait qu’elle sentait que la COVID-19 avait volé beaucoup de ses années de vie.»
C’est alors que ses deux fils, Rafael et Mateo, proposent de s’occuper de leur grand-mère par le biais de divers jeux et activités en ligne et en espagnol qui lui permettront de faire travailler ses capacités intellectuelles. L’effet est sans appel, Hilda est ravie de ces petits rendez-vous hebdomadaires, et demande si deux de ses amis de 92 ans peuvent se joindre aux activités. Le bouche-à-oreille se faisant, plusieurs autres dames ont exprimé le désir de faire partie du groupe. Aujourd’hui, elles sont dix participantes hispanophones âgées de plus de 75 ans, sept vivant au Pérou et trois au Québec.
Des ateliers variés
Tous les vendredis, les dix participantes se connectent par vidéo, via l’application Messenger. Les séances d’une heure s’ouvrent toutes sur une question «pour briser la glace», liée au thème du jour. Ce dernier peut tourner autour d’une multitude de sujets, comme Mars, les inventions ou même la Révolution française.
Par la suite, les jumeaux présentent plusieurs activités centrées sur un thème. Les matières peuvent être à la fois littéraires, avec des questions sur un texte, des jeux de vocabulaire ou d’écriture, ou même mathématiques, logiques et artistiques.
On a constaté que les participantes adoraient les mathématiques, donc dans les ateliers on en a toujours et même après on leur envoie des exercices. Elles deviennent de plus en plus fortes et le niveau augmente.
Mateo Cardenas
Mateo et Rafael Cardenas passent environ deux heures chaque semaine à préparer les activités. Un travail assidu qui dure depuis un an.
Un plaisir partagé
Le bénéfice de ces activités est sans équivoque.
«Cela fait plus de 60 ans que je suis allée à l’école! Je pensais que c’était oublié dans les coffres des souvenirs, mais ça revient», assure l’une des participantes des ateliers, Delia Garces. Cette dernière a senti que depuis le début de sa participation en avril dernier, elle a pu stimuler son cerveau et travailler sa mémoire, tout en brisant sa solitude qui s’est fait ressentir pendant la pandémie. Originaire du Pérou, mais habitant à Châteauguay, Delia Garces a pu nouer quelques relations avec des femmes de son pays par le biais des ateliers. Chaque semaine, assure-t-elle, elle attend avec impatience le vendredi que sa tablette sonne, à 17 h tapantes.
Ça m’apporte beaucoup de courage et de joie dans ma vie. J’admire beaucoup les deux jumeaux, qui préparent vraiment bien les ateliers.
Delia Garces
Pour Mateo et Rafael, ces rencontres hebdomadaires ont permis d’améliorer certaines compétences. En plus de pouvoir pratiquer régulièrement leur espagnol, ils ont acquis une grande patience notamment dans l’assistance technologique pour certaines participantes moins à l’aise dans le domaine. Pour eux aussi, cette rencontre entre générations est un moment heureux et privilégié.
Leur travail a été salué par leur établissement scolaire, le collège Jean-de-Brébeuf à Côte-des-Neiges, ainsi que par la députée de l’Acadie, Christine St-Pierre.