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L’histoire au féminin

Plus de dix ans après Le Roman de Julie Papineau, l’historienne et journaliste Micheline Lachance continue de s’aventurer sur les traces du passé. Dans Rue des Remparts, son nouveau roman, l’Insulaire plonge au cœur du 18e siècle pour raconter la chute de la Nouvelle-France. Rencontre avec une femme plus passionnée que jamais par l’histoire de ceux qui nous ont précédés.

Vos romans dépeignent des époques précises et mettent en scène des personnages ayant réellement existé. Comment faites-vous vos recherches pour rester fidèle à la réalité?
Je commence toujours par faire une chronologie des évènements: ce qui s’est passé dans la vie de mon personnage, dans la vie de la société autour d’elle. Une fois que j’ai fait ce squelette du récit, je développe l’intrigue et je remplis les blancs laissés par l’histoire. J’ai toujours fonctionné comme ça, en accordant beaucoup d’importance à la vérité historique. Dans Rue des Remparts par exemple, quand Montcalm et Vaudreuil se disputent, les dialogues sont bâtis à partir de leur vraie correspondance, de leurs propres mots.

Vous rendez-vous aussi sur les lieux où se déroulent vos romans?
Toujours. Ça fait partie de mon travail autant que l’écriture. Un de mes grands plaisirs d’ailleurs, c’est de pouvoir marcher dans les traces de mes personnages. Combien de jours j’ai passés à Québec à me promener, de la rue Saint-Louis où Montcalm est mort jusqu’à la chapelle des Ursulines où il a été enterré. C’est fascinant d’aller là où mes personnages ont vécu et de regarder ce qu’ils ont vu.

Rue des Remparts retrace les derniers mois de la Nouvelle-France à travers le personnage de Geneviève de Lanaudière, qui a réellement existé. Comment l’avez-vous choisie?
J’ai d’abord lu toutes les histoires des grandes familles de la Nouvelle-France, les Ramsey, Vaudreuil et de Lanaudière. Je suis tombée sur Geneviève et elle m’a émue. C’est une femme qui a eu une vie tragique, qui a eu sept enfants dont six sont morts avant l’âge de deux mois. Puis, en cours de recherche, j’ai découvert qu’elle était la maîtresse de Montcalm en lisant leur correspondance. Tous les pions se sont alors placés sur l’échiquier: elle devait être le personnage principal de mon roman.

Le livre se déroule dans les années 1750. En quoi cette époque vous intéressait-elle?
C’était une période très spéciale, presque de débauche. Québec était surnommée «Le petit Versailles». Les nobles avaient des dîners tous les soirs, ils jouaient à la roulette, ils buvaient, ils avaient des maîtresses. Pendant ce temps-là, le peuple mourrait de faim, c’était la famine. Je voulais raconter ce moment moins héroïque de notre histoire.

Pourquoi choisissez-vous toujours des personnages principaux féminins?
Le rôle joué par les femmes dans notre histoire est un secret bien gardé. Quand on consulte les ouvrages historiques, on parle des politiciens, des combattants, mais c’est comme si les femmes n’avaient pas existé. Par exemple, tous les historiens décrivaient Julie Papineau, héroïne de mon premier roman, comme déprimée et mélancolique. Pourtant, non seulement elle a été très influente dans les décisions politiques de son mari, Louis-Joseph Papineau, mais c’est elle qui a élevé leurs enfants. Les femmes ont joué des rôles importants et on ne le sait pas. Si je les sors de l’ombre, je trouve qu’elles sont bien vengées du piètre portrait que l’histoire a gardé d’elles.

Passionnée d’histoire, vous avez consacré votre vie à l’écriture. Pourquoi?
Je n’ai jamais pensé faire autre chose. Petite fille, déjà, je disais que j’allais écrire. J’écrivais le journal de la famille, j’y racontais mes disputes avec ma sœur, j’écrivais quelles chansons étaient à la mode, le pointage du hockey. À l’âge de 13 ans, mon cadeau de Noël a même été un dactylo portatif. C’était en moi.

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