Tout comme dans les autobus et métros, le port du masque est obligatoire dans les taxis. Cette mesure semble bien respectée par la population, mais les chauffeurs de l’industrie du taxi font face à d’autres défis, comme le manque de clientèle qui risque de perdurer tout l’été.
La pandémie a été très difficile pour les chauffeurs, soulève Bois Frenel, qui travaille depuis une dizaine d’années chez Pontiac Hemlock, une compagnie de taxi qui dessert notamment les secteurs de Verdun, LaSalle et du Sud-Ouest. «À certains moments, il n’y avait pas d’ouvrage. Parfois, je pouvais passer quatre ou cinq heures sans faire le moindre sou. J’ai passé parfois dix heures sur la route à rentrer à la maison avec 40$ dans les poches», témoigne M. Frenel.
La compagnie Pontiac Hemlock, qui a pignon sur la rue Monk, s’est même associée pendant un moment avec Taxi Champlain afin de couvrir un plus grand territoire là où il y avait de la demande. «Ça ne se passe jamais comme cela d’habitude, c’était exceptionnel. Il a fallu quitter jusqu’au centre-ville pour aller chercher des clients», souligne M. Frenel. Certains soirs, il y avait seulement trois chauffeurs sur la route alors qu’habituellement ils peuvent être jusqu’à 400, fait-il savoir.
Comportement
Les chauffeurs ont dû eux aussi aller au front en s’exposant au virus. Bois Frenel qui pratique le métier depuis plus de 20 ans, a fait savoir qu’il a eu peur d’attraper la COVID-19. «Quand j’entendais qu’il y avait 500 morts par jour, j’ai été le premier à mettre un Plexiglas [dans ma voiture]. J’ai fait ma petite barricade», mentionne le chauffeur de 57 ans.
Vers la mi-avril, la Ville de Montréal a donné une aide financière de 260 000$ à l’industrie du taxi pour rembourser l’achat d’équipements qui limitent la propagation du coronavirus.
«Je trouve que les gens sont plus décontractés en entrant dans la voiture depuis qu’ils portent le masque.»
-Bois Frenel, chauffeur de taxi.
M. Frenel remarque qu’au début de la pandémie, les clients étaient davantage craintifs en entrant dans un taxi. Il estime qu’il y avait un manque d’information à propos du virus ce qui entrainait la peur chez la population. Depuis quelques semaines, il sent les clients plus à l’aise.
D’ailleurs, tous ses clients portent le couvre-visage sans broncher, observe-t-il. «Quand ils arrivent, c’est la première chose qu’ils font parce qu’il y a un message qui mentionne le port obligatoire du masque quand on appelle un taxi», indique M. Frenel.
Par sa propre initiative, il traine dans sa voiture un stock de masques chirurgicaux pour les donner au cas où des gens auraient oublié leur couvre-visage. Cela lui est arrivé récemment alors qu’un couple de personnes âgées avaient oublié leur masque à la maison.
Achalandage
Même si le déconfinement se poursuit à Montréal, l’achalandage habituel en période estivale est loin d’être au rendez-vous. Les appels ont fondu environ de la moitié, constate M. Frenel.
Et ceux qui attrapent un taxi au passage se font rares. Cela peut se produire une fois tous les trois ou quatre jours alors qu’auparavant il y avait des clients «spontannés» au quotidien.
Comme dans d’autres domaines, l’industrie du taxi souffre aussi du manque de touristes à Montréal cet été. Les hôtels sont déserts et le centre-ville est vide, mentionne-t-il. Les festivals, les spectacles et les événements comme le Grand prix de Formule 1 constituaient une importante source de revenus pour les chauffeurs. Ils doivent composer avec ce manque de clientèle.
Concernant les bars, la situation a aussi beaucoup changé. «La clientèle des jeunes qui allaient dans les clubs, on ne la voit plus parce que ça n’existe plus», raconte le chauffeur.
La fermeture des bars à minuit change la donne pour ces professionnels. «Il y avait des bars [très populaires] qui étaient toujours pleins, mais cette clientèle ne peut plus rester jusqu’à 3h du matin», explique M. Frenel.
Il estime que le reste de l’été continuera d’être difficile financièrement pour les taxis. Puisqu’il effectue des voyages pour du transport adapté et que ce service a repris quelque peu, la situation s’est améliorée pour lui. Il espère tout de même qu’à l’automne les choses iront mieux.