Mercier-Hochelaga-Maisonneuve

Piétonnisation de la rue Ontario: «on est en train d’y laisser notre peau», dit un libraire

La piétonnisation estivale de certaines artères de la métropole fait le bonheur de nombreux Montréalais, qui peuvent ainsi se promener sans avoir à se soucier de la circulation automobile. Ces zones sont également des lieux de loisir et de détente pour les badauds.

Mais pour certains commerçants, comme le propriétaire de la Librairie Z située sur la rue Ontario, la piétonnisation peut être la source de bien des maux de tête et parfois d’une importante baisse de revenus.

Christian Viel dit enchaîner les journées de disette depuis que l’artère a été réquisitionnée par les piétons. Le scénario se reproduit chaque année: quand la rue est fermée aux voitures, ses recettes plongent systématiquement. Quand les véhicules sont de nouveau autorisés, les ventes remontent de manière «astronomique».

Plus tôt cette semaine, dans un élan de désespoir et de frustration, l’homme a pris la décision de fermer son magasin du lundi au jeudi, alors que la boutique est normalement ouverte toute la semaine.

«Je perds entre 150 000 et 200 000 $ par été. Pour nous, ça ne fonctionne pas, et c’est le cas pour plein d’autres commerçants. Personnellement, je ne suis pas pro-auto. J’ai même voté pour la piétonnisation la première année, pour soutenir les restaurateurs. C’est une bonne idée, mais c’est tellement mal organisé», déplore M. Viel.

Privé de sa clientèle

Si les ventes de la libraire s’effondrent soudainement quand les voitures disparaissent, ce n’est pas dû à l’absence de visiteurs. Chaque jour, ces derniers défilent en nombre dans ce temple de la bande dessinée. Mais rares sont les achats. Christian Viel dit être privé de sa clientèle habituelle, qui éprouve des difficultés à se rendre dans son commerce quand la rue devient piétonne.

En temps normal, l’été est sa deuxième meilleure période avec Noël, mais la piétonnisation change la donne.

«Mes clients me disent: “On se voit à l’automne, c’est trop compliqué de venir ici”», témoigne M. Viel.

«Alors oui, il y a des visiteurs qui passent et restent parfois une heure. Ils me disent que c’est beau, mais ils n’achètent presque rien. C’est pas des gens méchants, et il n’y a rien de mal, c’est juste que ce n’est pas ma clientèle», analyse le propriétaire.

On dit que tout est beau avec la piétonnisation et que tout est le fun alors que nous, on est en train d’y laisser notre peau.

Christian Viel, propriétaire de la Librairie Z

Le commerçant dit avoir, depuis quatre ans, entrepris des démarches auprès de la Ville, de la SDC, rencontré les politiciens, les journaux, en vain. Déjà deux employés ont été licenciés et une troisième mise à pied sera prochainement prononcée, au vu de la situation financière de l’établissement. À cela s’ajoutent des difficultés liées à l’itinérance.

«On a l’impression d’être une attraction touristique gratuite pour la Ville de Montréal, pour qu’elle puisse se faire du capital politique. On va serrer les dents pour se rendre jusqu’à ce qu’ils réouvrent la rue», grince Christian Viel.

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