Quatre aînés sur 10 vivent seuls à Montréal-Nord. Une réalité potentiellement problématique pour un des arrondissements où les personnes âgées risquent le plus de vivre une situation d’isolement social.
«Être isolé socialement ou avoir un sentiment de solitude est un facteur de risque très important de mortalité qui correspond à fumer 15 cigarettes par jour». C’est avec cette phrase choc que la Dre Paule Lebel a commencé sa présentation à la trentaine de personnes venues assister au premier Forum «Vivre et vieillir à Montréal-Nord».
Travaillant depuis 1982 auprès des aînés, la Dre Paule Lebel a participé à une récente étude de la Direction régionale de santé publique qui dresse un portrait des aînés de l’île de Montréal.
«Ça m’a beaucoup interpelé en tant que médecin, car il a été prouvé que le fait d’être isolé socialement entraînait des troubles cognitifs, des infarctus et des accidents vasculaires cérébraux», affirme-t-elle.
Un phénomène alarmant
Montréal-Nord ne se démarque pas des autres arrondissements quant au vieillissement de sa population, mais «c’est un secteur où les aînés sont plus exposés aux facteurs d’isolement», note la Dre Lebel.
D’après ses observations, 3 facteurs caractéristiques de Montréal-Nord mettent les aînés plus à risque face à l’isolement : le fait de vivre seul, le faible niveau de revenu et le niveau d’études relativement bas.
«Je n’ai pas fait beaucoup d’études, reconnait une participante, je faisais un travail manuel, et aujourd’hui que je ne peux plus me servir de mes mains, c’est problématique», témoigne une résidente de Montréal-Nord.
Comme partout dans la métropole, l’arrondissement manque «cruellement» de ressources pour prendre en charge ses quelques 15000 aînés.
«Il y a autant d’ainés que de jeunes à Montréal-Nord, et pourtant il n’y a un seul organisme qui a un financement récurrent et une mission spécifique pour les ainés, déplore Isabelle Desrochers en parlant du Carrefour des retraités. Il faut donc qu’on se dote d’un plan et d’une démarche pour prendre mieux prendre en charge ces personnes-là», poursuit l’organisatrice de l’événement.
Des pistes de solution
Le principal remède que la Dre Lebel a prescrit lors de sa présentation est «la participation sociale»; un concept qui consiste à entretenir son réseau social et son implication dans la société à tout âge.
«Au niveau individuel, il faut avoir au moins un confident, et se créer un réseau d’amis hors de notre sphère professionnelle avant de prendre la retraite, car c’est un moment crucial où les aînés se retrouvent très à risque», précise la Dre Lebel.
Sur le plan collectif, la spécialiste en gériatrie plaide avant toute chose pour une plus grande solidarité intergénérationnelle. Et c’est dans cet esprit qu’a été organisé ce 1er forum sur le vieillissement.
«En fait l’idée était de créer des ponts entre les générations et les cultures pour aborder le vieillissement qui nous concerne tous, au lieu de nous focaliser uniquement sur les aînés», explique Mme Desrochers.
Du haut de ses 53 ans, Gaétana, une citoyenne engagée de Montréal-Nord a assisté à tous les ateliers de réflexion de la journée, et elle n’était pas la seule «jeune» à participer au Forum.
«Je me sens concernée justement parce que je suis dans la cinquantaine et que je me souhaite un meilleur avenir que celui qu’on réserve actuellement aux aînés», explique Gaétana.
Selon les statistiques, le groupe des 80 ans et plus est celui dont l’importance va être la plus grande au cours des prochaines années. Conscient du défi croissant que représente le vieillissement de la population, la table de quartier Montréal-Nord en santé a profité de sa dernière assemblée générale pour intégrer le vieillissement comme un nouvel enjeu à son plan de développement social.