Il y a 60 ans, le tramway qui traversait Montréal-Nord et reliait sa population au centre-ville de Montréal disparaissait. Aujourd’hui, ce moyen de transport bicentenaire fait l’objet d’un regain d’engouement pour les désireux d’un meilleur service de transport en commun.
C’est en mai 1959, soit lors de la toute dernière année de service des tramways à Montréal, que le tramway de Montréal-Nord effectua son dernier passage. Le réseau routier et la construction du pont Pie IX avaient graduellement fait chuter la popularité du tramway, ce qui justifiait la fermeture de celui-ci. «Le tramway a immédiatement été remplacé par un réseau d’autobus», mentionne le président de la Société d’histoire et de généalogie de Montréal-Nord, Jean-Paul Guiard.
La construction graduelle du tramway sur le territoire Montréal-Nord a débuté en 1908. À l’époque, Montréal-Nord n’était qu’un petit village d’à peine 1000 habitants.
À l’origine, la ligne de tramway 40, située sur l’actuel boulevard Henri-Bourassa était un moyen de transport servant principalement à déplacer les détenus du pénitencier lavallois de Saint-Vincent-de-Paul et leurs visiteurs. «Les détenus devaient aller au palais de justice en ville et vice versa», explique Jean-Paul Guiard. Ceux-ci empruntaient un traversier où la ligne de tramway s’arrêtait.
M. Guiard estime que cette ligne de tramway a par la suite grandement contribué au développement de Montréal-Nord, qui a vu sa population bondir à plus de 12 000 habitants dans les années 1950.
Le retour du tramway
Au moment de sa fermeture, le tramway était un mode de transport vu comme désuet et le nouveau réseau routier comme moderne. Or, de nos jours, le trafic causé par la densité du nombre de voitures circulant à Montréal-Nord et dans le reste de la ville cause des maux de tête aux usagers de la route. «On n’avait pas prévu ça [en éliminant le tramway au profit des autobus]», croit Jean-Paul Guiard.
Dans un contexte où l’on pense implanter des tramways dans la métropole et à Québec pour répondre à un certain besoin en transport collectif, certains pourraient penser que de supprimer totalement le tramway de Montréal était une erreur. Or, selon le professeur de l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal Jean-Philippe Meloche, il était difficile, voire impossible pour les décideurs d’il y a 60 ans de voir quelconque utilité future dans cette infrastructure. «Ils n’avaient pas accès aux informations qu’on a aujourd’hui, mentionne-t-il. La congestion et les préoccupations environnementales sont les causes d’un regain de la demande pour le transport collectif», poursuit-il.
Selon le professeur, il est normal que le tramway de Montréal ait été supprimé à l’époque. «Le tramway avait un espace de marché qui était intéressant quand les gens n’avaient pas de voiture pour se déplacer, souligne-t-il. On a par la suite décidé que ça valait davantage la peine financièrement de remplacer le tramway par des autobus ».
La configuration de Montréal-Nord pourrait aujourd’hui bien se prêter à un système de tramway, selon M. Meloche. Il faudrait toutefois que celui-ci soit construit en fonction du lieu de travail des résidents, qui varie énormément. «Les Nord-Montréalais ne travaillent pas tous au centre-ville comme les résidents de certains quartiers, indique-t-il. Plusieurs doivent se rendre dans l’est et à Laval, et il faudrait que ce tramway ne serve pas uniquement à relier l’arrondissement au centre-ville», estime-t-il.
Ces dernières années, plusieurs projets de transport structurant qui pourraient desservir Montréal-Nord ont été proposés. La ligne rose et le prolongement du REM vers le Cégep Marie-Victorin en sont des exemples.