Un changement de règlement de zonage dans le centre-ville de Montréal-Est sème la grogne chez des résidents du secteur. Bien qu’un registre de demande référendaire ait été instauré, ils craignent que leur situation minoritaire les empêche de renverser le règlement.
Adopté le 19 mai, le règlement 58-2016-23-2 coupera en deux la zone du centre-ville (H13), de part et d’autre de la ligne médiane de l’avenue Sainte-Marie.
Dans la future zone H20, la construction de duplex et de triplex sera dorénavant proscrite; seule la construction de résidences unifamiliales sera permise.
En raison des requêtes citoyennes, la Ville a entamé un processus de demande référendaire. Un total de 48 signatures au registre est requis pour qu’un référendum se tienne. Les citoyens ont jusqu’au 18 juin pour y inscrire leur nom.
Opposition au règlement
La Ville a tenu une séance d’information le 9 juin pour expliquer le processus référendaire aux résidents des 10 propriétés de la future zone H20. Durant cette séance animée, plusieurs résidents ont exprimé leurs doléances.
Faisant écho aux propos de ses voisins, Dominic Paquin déplore l’absence de consultation en amont de l’adoption du règlement. «Si on avait été consulté, il aurait peut-être eu de bonnes idées qui auraient sorti dans le processus».
Comme la majorité des résidents de la Zone H20, Chantal Ouellet a signé une pétition s’opposant au règlement. En septembre 2020, elle avait signé un contrat de vente conditionnelle avec un entrepreneur qui souhaitait y bâtir un triplex. Mais en raison du changement de zonage, la transaction est tombée à l’eau. Heureusement, elle «n’avait pas encore acheté une autre maison».
Appuyant les doléances des citoyens, le maire de Montréal-Est, Robert Coutu, soutient que les principaux intéressés du dossier se trouvent présentement «dans un cul-de-sac».
«On est à la dernière minute dans le processus. [Les résidents] ont déposé une pétition. La majorité des membres du conseil n’a pas su reculer.»
Les zones contiguës consultées
Plusieurs résidents de la zone H20 ont également dénoncé que des zones contiguës puissent participer au référendum. Alors qu’il n’y a que 10 résidences dans le secteur, les résidents estiment injuste que 372 personnes puissent s’exprimer en processus référendaire.
Roch Sergerie, directeur des affaires juridiques et greffier à la Ville de Montréal-Est, a expliqué pendant la séance que ce processus est encadré par les règlements d’urbanisme. En effet, la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme prévoit que des zones contiguës puissent participer à ce type de référendum s’ils en font la demande, ce qui a été le cas.
À l’origine du règlement, la conseillère et candidate à la mairie Anne St-Laurent défend l’importance de consulter tous les citoyens du secteur, et non seulement ceux de la zone concernée. «Je veux écouter les citoyens. Mais pas juste les citoyens qui seraient appelés à partir [s’ils vendent leur propriété], mais les citoyens qui vont vivre avec le changement”.
Danielle Pilette, professeure associée au département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’UQAM, explique l’idée derrière la loi. «Les zones [concernées] peuvent être très petites, mais quand il y a un projet qui arrive, il y a des implications pour les zones contiguës aussi.»
À titre d’exemple, elle souligne que nouveaux projets peuvent générer de la circulation, créer des nuisances ou même affecter la valeur des propriétés voisines.
Un dossier électoral?
Lors de la séance d’information, des citoyens ont aussi critiqué les élus de faire de ce dossier un enjeu électoral.
Mme Pilette croit pour sa part que ce type de règlement peut «arriver comme action d’éclat» en vue des élections municipales. «On peut faire l’hypothèse que c’est un genre de démonstration de force de l’opposition à l’approche des élections pour forcer les citoyens à se positionner dans un camp ou dans l’autre. Ça démontre qu’il n’y a pas de consensus au conseil municipal et au sein de la population».
«Je suis conseillère municipale de ce district, et je préserve la qualité de vie des citoyens actuelle. Ce n’est pas mon travail de candidate à la mairie», fait toutefois valoir Mme St-Laurent.