Les travailleurs sociaux ont décidé de lever la voix, alors que se tient jusqu’au 27 mars la semaine des travailleurs sociaux, intitulée Le travail social exprime ses couleurs. En plus de promouvoir l’importance de la profession, cette semaine permet aux intervenants d’aborder le manque de ressources, la pénurie de main-d’œuvre et les impacts de la pandémie.
Pablo Bayancela est un travailleur social de l’Office municipal d’habitation de Montréal (OMHM), dans le Sud-Ouest, Lachine, LaSalle, Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce et Westmount, qui intervient auprès de locataires qui pourraient être dans une situation difficile.
Pour lui, le manque de ressources se traduit notamment par un manque de logements supervisés et d’aides disponibles pour les personnes qui ne sont plus aptes à vivre de manière indépendante. Pour diverses raisons, comme des loyers impayés ou de l’insalubrité, il arrive que certaines de ces personnes vivant en HLM soient obligées de quitter leur logement, ce qui peut les amener à fréquenter des centres d’hébergement ou même à devenir itinérantes, faute d’accès à d’autres options d’accueil.
«Quand tu évalues et que tu vois que la société n’a pas les ressources pour aider une personne qui a des instabilités dans sa vie, c’est frustrant, mais tu essaies de faire le mieux que tu peux», explique-t-il.
De son côté, une travailleuse au Centre de protection de l’enfance et de la jeunesse (DPJ) dans le secteur du Sud-Ouest, qui a souhaité rester anonyme, témoigne de l’accroissement de la violence, des problèmes de santé mentale et de l’abandon scolaire chez les jeunes et les familles depuis le début de la pandémie.
Selon elle, l’accès aux ressources publiques médicales et psychologiques pour leur venir en aide peut s’allonger sur des mois ou des années d’attentes, ce qui a un impact sur la charge des travailleurs sociaux.
«[À la DPJ], il y a beaucoup de gens en maladie parce qu’on ne peut pas faire tout ce qui nous est demandé. Tu as l’impression de mettre en échec les familles que tu aides parce que tu n’es pas capable de leur donner ce dont elles ont besoin, donc ça crée un sentiment d’impuissance.»
Plusieurs crises
«Une tempête parfaite»: voilà comment le président de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ), Pierre-Paul Malenfant, décrit la situation vécue par les travailleurs sociaux.
À travers cette phrase frisant l’oxymore, Pierre-Paul Malenfant cherche à illustrer les nombreuses crises que vit le monde du travail social. Ce dernier évoque une crise sociale renforcée par la pandémie et l’inflation, le manque d’accès aux ressources ainsi que le départ de bon nombre de travailleurs.
«Les membres nous expriment qu’ils ne sont pas capables de réaliser ce qu’ils doivent faire auprès des populations dans le besoin à cause de toutes les contraintes comme le manque de ressources, ou les contraintes bureaucratiques et de structure», indique Pierre-Paul Malenfant.
Le président de l’Ordre espère que la semaine des travailleurs sociaux pourra permettre de mettre en lumière la profession, et d’encourager les instances gouvernementales à renforcer les financements dans le domaine.
L’OTSTCFQ promeut des changements structurels dans le système de la santé et des services sociaux, afin de faciliter l’accès au soin et la bureaucratie, tout en intégrant davantage les travailleurs sociaux.