Plus d’hésitations, des actions! Du Pacifique à l’Arctique, en Ouganda comme à Tokyo, Hambourg, Bruxelles ou Peshawar, des foules immenses de jeunes ont rejoint vendredi la «grève mondiale pour le climat» afin d’exiger des générations au pouvoir des actions contre la catastrophe climatique annoncée.
S’il n’y a encore aucun chiffre officiel sur le nombre de jeunes participants à ces manifestations, la jeune Suédoise Greta Thunberg qui a pris l’initiative à l’été 2018 de ce mouvement, s’est réjouie qu’ils soient «des millions», dans un entretien avec l’AFP.
«J’espère que cela marquera un tournant pour la société, en montrant combien de personnes s’investissent là-dedans, combien de personnes mettent la pression sur les dirigeants, surtout avant le sommet de l’ONU sur le climat» lundi prochain à New York, a-t-elle ajouté.
A cette occasion, les jeunes boycottent les salles de classe pour faire pression sur leurs aînés afin qu’ils prennent des mesures drastiques pour enrayer l’envol des températures provoqué par les activités humaines.
La journée doit culminer avec une manifestation monstre à New York.
«Nous ne coulons pas, nous nous battons!»
C’est par ce cri que des élèves d’atolls du Pacifique — Vanuatu, Salomon, Kiribati — dont l’existence même est menacée par la montée des eaux ont inauguré la journée de protestation, au moment où le soleil se levait sur l’océan.
Sydney, Séoul, Manille, Bali, Jakarta, Tokyo, Bombay, New Delhi, Peshawar, toute l’Asie-Pacifique s’est mobilisée pour ce «Friday for Future» planétaire.
Ils étaient plus de 300 000 en Australie, plus du double qu’en mars, au cours d’un premier mouvement similaire.
«C’est notre avenir qui est en jeu», a lancé à Sydney Will Connor, 16 ans. «Nous sommes l’avenir et nous méritons mieux», a renchéri à Bangkok Lilly Satidtanasarn, 12 ans, surnommée la Greta Thunberg de Thaïlande pour son combat contre le plastique. Les adultes «ne font que parler, mais ils ne font rien. Nous ne voulons pas d’excuses».
Ils étaient des milliers aux Philippines, un archipel également gravement menacé par l’élévation du niveau des océans. «Beaucoup de gens ressentent déjà ici les effets du réchauffement climatique et notamment des typhons», a dit Yanna Palo, 23 ans, dans le défilé de Manille.
Du Pacifique à l’Arctique en passant par l’Afrique
La multiplication des phénomène extrêmes liés au réchauffement renforce le sentiment d’urgence. «Je suis sûr que les dinosaures pensaient aussi qu’ils avaient le temps», a proclamé une pancarte à Islamabad.
A Kampala, la capitale de l’Ouganda qui borde le lac Victoria, le plus grand d’Afrique, touché de plein fouet par les effets du changement climatique, plusieurs centaines de jeunes ont défilé, comme Cissy Mukasa, 12 ans, dont la pancarte accuse: «Combien de personnes doivent mourir avant que vous n’agissiez?»
D’autres manifestation, assez petites il est vrai, ont eu lieu en Afrique, souvent restée à l’écart des mobilisations, à Nairobi, Johannesburg ou Accra. «Si nous n’agissons pas, nous n’aurons plus de planète», s’est alarmée Ellen Lindsey Awuku, 26 ans, jeune organisatrice du défilé ghanéen.
Le mouvement s’est propagé jusqu’aux tréfonds de l’Arctique, une région qui se réchauffe deux fois plus rapidement que le reste de la planète. A Longyearbyen, le chef-lieu de l’archipel norvégien du Svalbard, à un gros millier de kilomètres du pôle Nord, environ 80 personnes chaudement emmitouflées ont sillonné les rues derrière des pancartes proclamant «ça chauffe ici» ou «pas cool sans glace».
Au total, plus de 5000 événements étaient prévus sur toute la planète et Greta Thunberg, qui défilera à New York, s’est adressée par lien vidéo, en suédois, aux milliers de manifestants (8000 selon la police) rassemblés sur une place de Stockholm.
«Nous allons faire pression sur eux, tellement de pression qu’ils ne pourront pas faillir. Nous avons montré ce que nous voulions et c’est maintenant à eux de prouver qu’ils nous écoutent vraiment».
L’Europe n’est pas en reste
Plus d’un million de personnes, selon les organisateurs, sont descendues dans les rues pour la défense du climat en Allemagne, où les partis de la fragile coalition gouvernementale d’Angela Merkel ont accouché au forceps d’une stratégie pour le climat représentant 100 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2030.
A Bruxelles, 15 000 personnes ont défilé, comme Tom Baguette, un étudiant pour qui les politiques «font semblant d’entendre». Elles étaient des milliers aussi au Royaume-Uni, comme Laura-Louise Fairley, qui a manifesté à Londres «au nom de (sa) fille», âgée de quatre ans, face à la «perspective assez terrifiante» des effets du réchauffement climatique.
A Paris, Jeannette, 12 ans, est allée, comme un peu moins de 10 000 personnes, manifester accompagnée de son père Fabrice. «C’est mon anniversaire et j’ai demandé à venir, la situation me rend triste, on est dans le caca et on fait n’importe quoi», a lancé la collégienne.
Des entreprises se mobilisaient aussi, certaines donnant congé à leurs salariés, voire fermant des magasins. «On se voit dans la rue», a ainsi lancé le fonds de pension australien Future Super, qui a rallié 2000 entreprises à une initiative favorable à ce mouvement.
Cette journée doit donner à New York le coup d’envoi de deux semaines d’actions, avec notamment samedi le premier sommet de la jeunesse sur le climat organisé par l’ONU. Outre Greta Thunberg, 500 jeunes Sud-Américains, Européens, Asiatiques et Africains y sont attendus.
Et vendredi 27 septembre, pendant l’Assemblée générale de l’ONU, aura lieu une autre grève mondiale coordonnée. Le sommet spécial sur le climat lundi à l’ONU doit réunir une centaine de chefs d’Etat et de gouvernement, dont Emmanuel Macron et Angela Merkel.
A quelques exceptions notables, comme le président américain Donald Trump et son homologue brésilien Jair Bolsonaro, nombre de dirigeants internationaux souscrivent à l’idée d’une urgence climatique. Mais ils sont attendus sur les détails concrets de leurs plans.
Pour avoir une chance de stopper le réchauffement du globe à +1,5°C (par rapport au XIXe siècle), il faudrait que le monde soit neutre en carbone en 2050, selon le dernier consensus de scientifiques mandatés par l’ONU.