CHRONIQUE – À l’approche de la Journée internationale des droits des femmes, je nous souhaite un militantisme féministe davantage axé sur la solidarité entre femmes de tout horizon.
J’ai un engagement féministe de longue date. Dans les dernières années, mon engagement a pris une forme différente. C’est que je suis tombée de haut et que j’ai déchanté lorsque j’ai réalisé que certaines des personnes les plus cruelles et méchantes que j’ai croisées dans ma vie étaient des «militantes pour la justice sociale». À vrai dire, j’ai préféré faire le ménage autour de moi et m’éloigner de certains cercles, pour mon bien-être, ma quiétude et ma paix d’esprit.
Reproduire ce que l’on dénonce
C’est un problème lorsque l’on instrumentalise une cause – en l’occurrence, la violence faite aux femmes – pour isoler, outrager, intimider et diffamer d’autres femmes, particulièrement lorsque celles-ci appartiennent à des groupes historiquement marginalisés.
Je rêve d’un militantisme qui donne davantage le droit à l’erreur, à la maladresse et aux faux pas. Je rêve d’une communauté qui sait pardonner et qui laisse place au dialogue et à l’expression d’une diversité de perspectives plutôt que de préconiser une certaine «pureté militante». Avoir une perspective différente sur une situation donnée et refuser d’abdiquer quant à celle-ci n’est pas automatiquement de la malhonnêteté ou du «gaslighting».
S’ériger les unes contre les autres
C’est tomber dans le piège du patriarcat que de se mettre à créer des histoires sans fondement parce que l’une d’entre nous a «réussi». C’est également le signe que quelque chose à l’intérieur de soi a besoin d’être guéri lorsque le succès de l’une des nôtres nous dérange au point de nous amener à chercher à ternir sa réputation. Ce n’est pas être féministe que de propager des ragots visant à remettre en doute le travail, les efforts, le talent et l’intégrité de l’une des nôtres juste parce qu’on aimerait être à sa place.
On ne sait jamais ce que notre voisine a dû traverser au cours de sa vie. Nous menons toutes une bataille intérieure que le commun des mortels ignore. Soyons donc bienveillantes, les unes envers les autres, même envers celles qui ont des privilèges. Je préfère largement la bienveillance à la gentillesse, car la bienveillance est une posture active plutôt que passive ainsi qu’un choix de société et politique.
Une invitation à la réflexion
À l’aube du 8 mars, je dois avouer que j’ai mal à mon féminisme parfois en raison de choses désolantes dont j’ai été témoin au cours des dernières années. Je nous souhaite de cultiver la curiosité, l’ouverture et notre esprit critique lorsqu’on se met soudainement à détester une autre femme à qui l’on n’a jamais adressé la parole de sa vie sur la base de commérages.
Ce n’est pas de cette façon qu’on atteindra la liberté, l’équité et la sororité en ce bas monde. Je nous invite donc en cette journée à l’introspection et à la réflexivité sur nos pratiques militantes. Soyons plus intelligentes et futées que celles et ceux qui cherchent à diviser pour mieux régner sur les femmes.