Lorsqu’on parle du manque de femmes dans l’industrie des technologies, on a l’habitude de dire que c’est leur faute: elles ne s’y intéressent pas assez, elles ne sont pas faites pour ça, ce sont elles qui décident de quitter, etc. À quel moment se demande-t-on si le problème n’est peut-être pas elles, mais les autres? Réponse: jamais.
L’industrie parle souvent du «problème du pipeline». C’est la théorie selon laquelle il n’y a tout simplement pas assez de femmes compétentes à embaucher, car il n’y a pas assez de femmes qui sont diplômées en STIM (sciences, technologie, informatique, mathématique) ou de femmes autodidactes avec expérience.
Vous dire le nombre de fois où j’ai entendu, lors de conférences et de panels, des personnes clamer que «de toutes façon les femmes n’aiment pas ça, la technologie»!
Brisons les clichés!
Cliché 1: Les femmes ne sont pas biologiquement faites pour la technologie
Faux. En 2017, un employé de Google rédige un mémo interne qui devient public et enflamme l’industrie techno partout dans le monde. Il suggère que les femmes sont absentes dans l’industrie des technologies en raison de différences biologiques. Mais pourtant les premiers programmeurs étaient… des femmes.
Cliché 2: Les femmes n’aiment pas les technologies
Faux. Le chercheur Kieran Snyder a interviewé 716 femmes qui ont quitté l’industrie des technologies après une durée moyenne de 7 ans. La majorité d’entre elles ont dit qu’elles aimaient le travail, mais que l’environnement de travail n’étaient pas satisfaisant.
Cliché 3: Les jeunes filles ne s’intéressent pas à la technologie
Faux. Les jeunes filles représentent la moitié des inscriptions aux cours de sciences et de mathématiques. Elles obtiennent des notes presque identiques à celles des garçons. Cependant, les femmes ne représentent que 29% de la main-d’œuvre en sciences et en génie aux États-Unis. Les jeunes filles s’intéressent donc aux technologies. C’est plus tard dans leur vie que les choses se gâtent.
Il y a une autre façon de considérer la situation. Au lieu de croire que le pipeline n’est pas assez fourni, voyons pourquoi il a, en réalité, des fuites. Ça n’a rien à voir avec les femmes, ça plutôt à voir avec la culture toxique de l’industrie.
Les femmes subissent du harcèlement sexuel
Trois femmes sur cinq dans la Silicon Valley affirment avoir subi des avances sexuelles non désirées, selon un sondage pour lequel 200 femmes ont été interrogées. Les deux tiers ont déclaré que les avances provenaient d’un supérieur hiérarchique. Je ne vais pas revenir en détail sur tous les scandales sexuels de 2017. Voilà seulement les noms des compagnies touchées et souvenez-vous que c’est très probablement juste la pointe de l’iceberg: Uber, Tesla, Google, Sherpa Capital, Essential, 500 Startups, Binary Capital VC, Robert Scoble…
Les femmes ne comptent pas
Un article de Wired, la journaliste Jessi Hempel explique comment se déroulent les sessions de recrutement d’une entreprise en tech. «Pendant que les candidats entrent, les femmes sont souvent en train d’installer des rafraîchissements ou de s’affairer à la décoration, écrit-elle. Les présentateurs sont souvent des hommes. Ils ne présentent que rarement les recruteurs. Si l’entreprise envoie une ingénieure, on ne l’invite pas à parler. Si on le fait, c’est pour lui demander d’expliquer la culture de l’entreprise, tandis que son homologue masculin s’attaque aux défis technologiques. Durant seulement 22% des sessions observées, les ingénieures sont invitées à parler de travail technique. Quand ces femmes parlent, les présentateurs les interrompent.»
Les femmes ne sont pas promues
Dans un article de Harvard Business Review, on apprend que les femmes en technologie sont souvent peu satisfaites par leur carrière. Elles perçoivent qu’elles ont peu de chances de progresser au sein des organisations pour lesquelles elles travaillent. Un responsable explique qu’il y a des femmes très compétentes dans les niveaux junior et intermédiaire, mais elles quittent l’entreprise pour avancer dans leur carrière. Elles ne sont jamais considérées dans les promotions, selon lui.
Il faut arrêter de dire qu’il s’agit uniquement d’un problème de pipeline. Ce n’est simplement pas vrai. Si nous voulons plus de femmes dans l’industrie, il faut faire face à la réalité. Écoutons, remettons-nous en question et soyons inclusifs.