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Une table pour une personne por favor

Quand j’étais au secondaire, la pire honte était de manger seul son lunch dans un coin de la cafétéria.

Quinze ans plus tard, dîner sans «sa gang» est chose courante, mais il m’est tout de même resté une gêne datant de cette époque sur le fait de manger en solitaire.

Je n’ai pas de problème à manger en solo à l’heure du lunch dans un resto près du bureau. Cependant, m’attabler seule dans un bon resto le jeudi soir, alors que les 5 à 7 battent leur plein,  très peu pour moi. D’ailleurs, je ne crois pas me tromper en disant qu’il y a peu de gens qui seraient prêts à se mettre dans une situation pareille.

En voyage, par contre, ça arrive partout, souvent, et je dois dire que ça me plaît beaucoup. Je déguste chaque moment que je passe seule à me délecter d’un bon repas accompagné d’un verre de vin. Si je profite autant de ces moments, c’est entre autres parce qu’en voyage, on se fout pas mal de ce que les autres pensent de nous. Que les gens croient qu’on n’a pas d’amis, ça nous passe 400 pieds par-dessus la tête!

Manger seule en voyage s’avère par ailleurs être une formidable façon d’observer l’homo sapiens en couple et d’assouvir son côté voyeur. Certains couples sont mignons, et on se verrait volontiers à la place de la fille. Par contre, la plupart mangent sans trop se parler ni se regarder. Ça, c’est quand ils n’en viennent pas à se chicaner. «Non, mais pourquoi tu fais la gueule? Je t’invite à souper et tout ce que tu trouves à commander, c’est une salade!» ai-je entendu de la bouche d’un Français frustré, mon voisin de table, à sa compagne.

Toutefois, il y a des couples super pour qui la présence d’une célibataire vient égayer un repas. Ce fut le cas d’Ellie et John, deux Australiens. Pour souligner leurs 40 ans, ils avaient décidé de partir quelques semaines en vacances et de laisser leurs trois enfants à la maison, aux soins des grands-parents. Je les ai trouvés très inspirants!

Manger seule, c’est aussi se faire l’amie des serveurs des restos où on va se remplir la panse. Après l’incrédulité du début, quand on leur dit qu’on veut une table pour une personne, ils se font un plaisir de nous faire la conversation. Est-ce par pitié ou parce que c’est leur métier? Je ne saurais dire, mais disons qu’ils ne m’ont pas laissé le temps de m’ennuyer.

Le dernier a toutefois semblé vouloir célébrer plus que les autres le fait que j’étais une femme seule profitant pleinement d’un repas dégusté avec elle-même. Alors que je lui demandais pourquoi il n’arrêtait pas de rire et de sourire en prenant ma commande, il m’a tout simplement répondu, un peu gêné : «C’est parce que vous êtes une femme magnifique!»

M’aurait-il fait ce compliment si j’avais été en couple? Je ne crois pas!

À ce moment, je n’aurais pas échangé ma place pour tout l’or du monde.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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