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L'inquiétant motard

Chaque jeudi, la journaliste Julie Laferrière et l’humoriste, comédien et illustrateur Pierre Brassard posent un regard original sur des usagers du transport en commun.

Ligne orange, 21 h 20. Le wagon est tranquille. Je suis assise sur un banc solo. Celui qui me fait face est vide jusqu’à ce que les portes de l’arrêt qui suit invitent un homme un peu inquiétant à entrer. Il a une tête spectaculaire. Disons-le, il a une tête de tueur. En fait, il est encore plus menaçant que le loup enragé qui est peint sur son coton ouaté.

L’individu louche est tatoué, un peu partout. Oui, dans la face aussi! Il est équipé d’une moustache et d’une barbe collier à la Mad Dog Vachon. Et sa bonne humeur semble être au garage. Il s’assoit lourdement sur le siège d’en face et laisse tomber une poche de vinyle à ses pieds. Il me fixe, intensément, tout en se penchant doucement vers son sac douteux qui doit contenir de la grosse drogue sale, des armes blanches et des guns! Cet homme est dans les Hell’s Angels. J’en suis persuadée.

Je le vois, au ralenti, mettre sa grosse main de tueur dans son sac. Il va pointer un douze tronçonné sur moi et me faire exploser la tête, parce qu’il a passé une journée contrariante. Quelqu’un doit payer pour ça. C’est juste vraiment plate que je sois cette personne-là! Je ferme les yeux pour que ce que j’appréhende n’existe plus. Trois secondes d’éternité s’écoulent. Rien ne se passe.

J’ouvre un oil pour m’apercevoir que le membre du crime organisé est en train de… tricoter! Soudainement, il m’apparaît délicat comme la plus tendre des grands-mères. Il s’exécute, maille après maille. Un chausson pour poupon bleu pâle prend forme lentement mais sûrement sous ses gros doigts velus. Je lui adresse un sourire timide et non moins honteux. Il me sourit à son tour. Il a l’air d’un ange… sans Hell.

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