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Le parfait faux pas

Quai de la Station Bonaventure, direction Montmorency. Nous sommes lundi, il est 17 h 30. Dans le métro, j’ai parfois le sentiment de me retrouver aux premiers rangs de grands défilés de mode. Les styles les plus beaux, originaux et étonnants font que les quais peuvent se transformer carrément en podiums.

Ce jour-là, une femme très chic attire mon attention. Elle déambule sur le catwalk. Elle n’a pas vraiment d’âge, posée quelque part entre 30 et 40 ans, ne semblant pas vouloir bouger de cette tranche d’années. Grande, élancée, élégante. Elle présente l’image d’une femme de carrière sérieuse et déterminée. Ses cheveux châtains bien coiffés se tiennent docilement noués sur sa nuque, en un chignon des plus classiques. Son chemisier blanc parfaitement repassé est muni d’un col qui monte haut dans le cou, ce qui donne une touche aristocratique à sa tenue.

En fait, elle incarne la parfaite rencontre entre une ballerine russe et une cavalière anglaise. À ses oreilles, deux perles sont suspendues à des minitrapèzes d’argent. Cette dame évolue sûrement dans le quartier des affaires sous-terrain et, pour éviter d’avoir trop chaud, elle a posé son manteau de laine caramel à cheval sur son bras droit. Vous voyez le tableau?

Maintenant, j’invite votre regard à se poser à la hauteur de sa hanche gauche, où pend un sac à bandoulière. Un chic sac de cuir dans les tons de terre, pour se marier parfaitement au kit précédemment décrit, pensez-vous. Eh ben non! Pas pantoute! Nous sommes ici en présence d’une grosse besace molle en totale rupture de ton. Et sur cette poche kaki informe est dessinée une tête de squelette qui sourit, une rose entre les dents. Aussi étonnant que de mauvais goût, dans un sens.

Mais, en fait, cet accessoire est merveilleux. Il est un parfait faux pas, une jolie craquelure dans le vernis. Un pied de nez à la sagesse.  Et cette dame, par cette petite audace, prouve en un coup d’œil qu’on peut être tant de choses à la fois : une ballerine qui danse sur du gros rock sale et une cavalière qui prend plaisir à quitter le manège pour s’évader dans les champs.

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