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Be happy!


Ajout: (18/04/2012)

Cher Storm,

Vous avez été blessé, choqué par ma chronique.

D’autant qu’il semblerait que mes propos aient pu vous porter préjudice.  Ce qui serait d’une grande injustice.

La situation qui nous occupe ici n’est certes pas souhaitable mais elle permet une mise au point essentielle entre nous. Et par  »nous »,  c’est  à vous, aux lecteurs du Métro qui ont été nombreux à réagir, et à moi que je fais allusion.

Les quelque quarante textes que j’ai produits à ce jour mettent tous en scène des personnes absolument réelles.  Mais ici s’arrête la vérité puisque Hors du commun propose de pures fables auxquelles les notions de fabulation et d’interprétation sont indissociables.

Je suis à mon tour fort attristée si la frontière entre le journalisme conventionnel et cette forme d’écriture impressionniste ait pu, à quelque moment, être floue.

Vous avez donc raison Storm, de préciser qu’il n’y avait pas de casque de moto à vos pieds: vous n’êtes pas un motard.  Il est vrai que j’ignorais que le second musicien n’était point votre comparse, pas plus que vous ne soyez un ex-détenu.

Tous ces éléments sont le fruit de mon imagination et n’appartiennent donc pas à la réalité.

Alors si ces images ont pu être blessantes sachez que j’en suis sincèrement désolée.

Et que ceci appartient bien à la réalité.

Julie

– – – – –

Couloir de la station Square-Victoria. C’est jeudi, il est 8 h 40. Le mois dernier a été assez éprouvant côté climat. On a eu droit à quelques journées caniculaires au soleil éblouissant, suivies par le retour de grands froids et de pluie avec, en bonus, quelques solos de crachin.

Cette météo un peu bipolaire nous a obligés à suivre ses états d’esprit. C’est ainsi que ce matin-là, encore un peu endormis et éprouvés par les dernières semaines, plusieurs d’entre nous empruntent le couloir de la station Square-Victoria afin de gagner leur destination respective.

Rapidement, du bout du passage, se fait entendre, d’abord sous forme de rumeur, puis de plus en plus clairement, la voix d’un homme qui clame avec véhémence et dans les deux langues officielles : «What is your problem people!?!?! Come on everyone! Smile! Une journée avant la fin de semaine. Souriez donc!» Voilà ce que nous renvoie l’écho du lieu.

Arrivée à proximité, je constate que l’émetteur de ce message d’espoir occupe l’espace réservé aux musiciens. Il n’est pas seul; son comparse, muni d’une guitare, semble attendre son signal. Il faut préciser ici l’allure et la dégaine de ce duo.

Tous deux ressemblent à un croisement improbable entre Gerry Boulet, Grizzly Adams et d’ex-détenus : tout en barbes et en longs cheveux. À leurs pieds est posé un casque de moto afin que nous puissions y déposer notre contribution volontaire.

Le jovialiste reprend sa rengaine de plus belle, pour ensuite donner un intense et sonore signal à son ami «guitareux» : «ONE, TWO, THREE, FOUR!» Ce dernier entame alors l’air très connu Don’t Worry, Be Happy. Sous ses doigts, les cordes semblent vouloirs s’enfuir de l’instrument. Idem pour nous, spectateurs captifs, qui sursautons lorsque le «chanteur» entame le refrain du succès de Bobby McFerrin. Je ne croyais pas qu’il pouvait être possible de rendre effrayante une chanson aussi guillerette. Eh bien oui! Cette interprétation avait la douceur d’une moissonneuse-batteuse au milieu d’un champ de coquelicots.

Nous avons été plusieurs à ralentir devant l’interprétation atypique de cet hymne à la joie. Et nous avons été aussi nombreux à nous sourire, complices. Comme quoi, le bonheur peut nous parvenir sous tant de formes différentes, parfois même sous celle d’une quasi-menace matinale, musicale et poilue.

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