Mercredi le 3 décembre dernier, j’ai été initié au monde Slam de Montréal. On n’en entend pas parler à CKOI, ils n’ont pas de pubs dans le Journal de Montréal, mais ils existent, ces slameurs. Pourquoi j’écris une chronique sur eux? Je ne suis pas un critique culturel, j’suis un humoriste. Justement, c’est en tant qu’humoriste que je vais en parler, parce que c’est en tant qu’humoriste que j’ai été touché, marqué par cette soirée. Puis, en plus j’écris bien sûr ce que je veux! Je peux écrire sur mon micro-ondes si ça me tente! Non, mais! I’m the captain of my page Word.
D’abord, l’accueil. Un des organisateurs de la soirée t’attend à la porte tout sourire. Première chose qu’il me dit : «Veux-tu passer?» Je vois sa feuille de noms, je comprends qu’il me demande si je veux monter sur scène, slamer. C’est une soirée micro ouvert, tout le monde peut monter s’il le désire. J’ai pas mis le bon foulard, je vais passer. Je lui dis que je suis juste venu assister en spectacle. Je lui demande combien ça coûte. «Contribution volontaire.» Tu vois, dans les soirées d’humour, c’est pas volontaire, c’est assez obligatoire. Tu payes, ou tu rentres pas. Eux, tu rentres, pis tu payes si tu veux, ou si tu peux. Ils veulent juste qu’il y ait du monde.
Je m’installe dans un coin. La soirée est déjà entamée. Tous les slameurs sont assis dans le bar. À tour de rôle, lorsqu’un des animateurs les nomme, ils montent sur la scène, font leur truc et retournent s’asseoir. C’est comme ça toute la soirée. Toute la soirée, des gens de tous les âges, tous les sexes, toutes les ethnies, vont au micro livrer leur texte. Autre particularité qu’on n’a pas en humour. La variété des gens. En humour, surtout dans les bars, c’est entre 20 et 30 ans en moyenne, surtout des gars, un peu extravertis. De plus en plus de filles, mais toutes aussi extraverties. Là, c’est un autre monde. Du monde qu’on ne remarque pas souvent. Des marginaux, des rebelles, vieux et jeunes, hommes et femmes. Du vrai monde.
Mais ce qui m’a le plus frappé en comparaison avec l’humour, c’est l’accueil des slameurs entre eux. Le respect. En humour, on s’aime, on s’appuie, mais on s’écœure beaucoup. C’est une fosse aux lions… dégriffés… mais une fosse aux lions quand même. À cette soirée de slameurs, c’était que du respect. Si un slameur avait l’air stressé sur scène, les gens l’encourageaient, l’applaudissaient. Si un slameur se trompait dans son texte, aucun commentaire. Les animateurs ne revenaient jamais sur les slameurs précédents, aucune remarque du genre : «Ouin… pas fort… On enchaîne» ou «T’as passé plus de temps à checker d’la porn qu’à apprendre ton texte, gros cochon.» Le genre de trucs qu’on entend dans des soirées d’humour. Fosse aux lions oblige, il faut rire à tout prix, même si c’est d’un autre. Entre humoristes, on s’en plaint jamais, ça fait partie du jeu. Mais assister à une soirée où le jeu est différent, c’était bien.
La soirée s’appelle Figures de styles. Pour assister ou, si le cœur vous en dit, pour slamer.
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.