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Voir ailleurs, partie 1

Pour les plus chanceux d’entre nous, les vacances offrent l’occasion d’aller voir ailleurs. Mon ailleurs cet été, c’est la ville de New York, qui est sous la gouverne du maire Bill de Blasio. Au début, je ne croyais pas que la mégapole pouvait élire un politicien ouvertement social-démocrate. Mais c’est chose faite depuis un an et demi.

Durant sa campagne électorale, Bill de Blasio a affirmé sans équivoque sa vision pour la ville : il la voyait plus égalitaire, moins divisée entre riches et pauvres, entre privilégiés et exclus, entre Blancs et autres.

On peut voir les effets de son action un peu partout. Dans le métro, une publicité annonce aux travailleurs qu’ils auront désormais droit à des congés de maladie payés, ce qu’aucune loi fédérale ou de l’État n’oblige les employeurs à offrir. Désormais, un travailleur qui a la grippe ne devra plus «choisir entre ses revenus et sa santé», comme le proclame la publicité. Le maire a d’ailleurs dans sa mire une autre réglementation qui est ici considérée comme allant de soi : des congés parentaux.

On constate l’influence de de Blasio dans les rues : les forces policières ont tempéré leur politique du «stop-and-frisk» (arrêter et fouiller des passants), qui visait à 90 % les personnes de couleur. On peut même noter l’effet de Blasio en lisant le journal conservateur The New York Post, qui brandit l’épouvantail d’un maire «communiste».

Comme chez nous, le pouvoir de la Ville est encadré par des lois régionales et fédérales qui limitent la marge de manœuvre de l’administration municipale. Néanmoins, à l’intérieur de ce cadre, il semblerait que de grands projets soient possibles, et même parfois plus faciles à réaliser, car le jeu politique à l’échelle municipale est moins polarisé qu’au Congrès. Pour autant que la volonté politique y soit.

La volonté de de Blasio de rendre New York moins inégalitaire ne fait aucun doute, et c’est cela qui l’a fait élire en 2013 avec un score de 73 %. Fort de cet appui, il a mis en place une multitude de mesures qui touchent la vie quotidienne des gens : les écoliers ont plus de petits déjeuners gratuits et d’activités parascolaires, les bibliothèques publiques sont ouvertes plus longtemps, des employeurs ne peuvent plus poser de questions au sujet des antécédents judiciaires des candidats. De Blasio vient même de créer un fonds spécial pour que la Ville paie la caution de petits criminels non violents, afin de les garder hors du système carcéral.

En plus de mener des politiques économiques et sociales progressistes, il a adopté la pratique de consulter les groupes communautaires et les associations dans la préparation de son budget.

Mais demandez à de jeunes New-Yorkais ce qui les excite le plus, et ils vous parleront d’une carte d’identité! Cette nouvelle carte d’identification municipale permet à n’importe qui d’obtenir des services bancaires, de louer un appartement, d’avoir accès aux hôpitaux et aux écoles, peu importe son statut : nouvel arrivant, immigrant non documenté, itinérant, etc. Les sans-papiers peuvent ainsi «exister».

Ces petites réformes sont passées sans trop d’accrocs. Ce sont les plus grandes qui se sont heurtées à de l’opposition, dont je vous parlerai la semaine prochaine.

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