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Les migrants en attente de l'asile politique

A Haitian boy holds onto his father as they approach an illegally crossing point, staffed by Royal Canadian Mounted Police officers, from Champlain, N.Y., to Saint-Bernard-de-Lacolle, Quebec, Monday, Aug. 7, 2017. Seven days a week, 24-hours a day people from across the globe are arriving at the end of a New York backroad so they can walk across a ditch into Canada knowing they will be instantly arrested, but with the hope the Canadian government will be kinder to them than the United States. (AP Photo/Charles Krupa) Photo: THE ASSOCIATED PRESS

Les demandeurs d’asile arrivés à Montréal cet été ne seront pas fixés sur leur sort avant plusieurs mois. En attendant, ils essaient de reconstruire leur vie, appuyés par des organismes débordés par le nombre de dossiers à gérer.

Il est 10 h quand Métro passe à la Maison d’Haïti, où une dizaine de familles et de jeunes hommes ont rendez-vous pour une rencontre d’information visant à les aider à remplir leurs dossiers de demande d’asile. Tandis que les parents écoutent les conseils d’un avocat, leurs enfants jouent dans la garderie de l’organisme. Une équipe de clowns est venue égayer la Maison d’Haïti et distribuer des sourires aux enfants.

Depuis cet été, la Maison d’Haïti est en ébullition. L’organisme a dû s’adapter pour pouvoir traiter les 200 dossiers de demandeurs d’asile qu’il reçoit par semaine.

Dans chaque dossier se trouve une histoire, «le fondement de la demande», en jargon administratif. Ce fondement, ce sont les raisons qui ont poussé les réfugiés à venir au Canada : le risque d’être arrêtés aux États-Unis puis d’être expulsés en Haïti, de retrouver la misère dans leur pays.

Parmi ces histoires, celle de Mise Bazil, jeune mère de deux enfants, arrivée au Québec cet été. Elle a fui Haïti pour «plusieurs raisons», relate-t-elle à Métro, évasive. Logée au Stade olympique, elle a pu remplir là-bas les premiers documents d’immigration. Elle attend maintenant une réponse, mais l’attente risque d’être longue. Selon la PDG ajointe au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Ouest (CIUSSS), Francine Dupuis, certains devront attendre jusqu’à mars 2018 pour avoir un rendez-vous. Surtout, les demandes ne seront pas toutes acceptées. «Dans les dernières années, 75 % des demandeurs ont obtenu l’asile. La nouveauté ici est que les Haïtiens ne fuient pas un pays en guerre. Est-ce qu’ils vont avoir les mêmes preuves que des réfugiés qui fuient la guerre?» se questionne Mme Dupuis.

En attendant une réponse, les demandeurs d’asile se construisent une nouvelle vie. Ils cherchent un appartement, un emploi, une école pour les enfants. «Actuellement, on est dans la phase d’accueillir, d’installer et de soutenir les demandeurs d’asile. Les gens en ont vu l’urgence à la frontière, mais nous, on voyait déjà que ces gens-là allaient avoir des besoins à long terme», explique Marjorie Villefranche, directrice de la Maison d’Haïti.

«Si on fait bien notre travail, ils vont bien s’intégrer et ne pas être marginalisés.» -Marjorie Villefranche, directrice de la Maison d’Haïti

Mise Bazil habite dans un sous-sol avec ses deux enfants. Elle aimerait trouver un meilleur logement. En attendant de ses documents d’immigration, elle s’occupe de son plus jeune enfant; l’autre commencera l’école la semaine prochaine. Elle souhaite devenir bénévole, faire n’importe quoi, tant qu’elle peut faire quelque chose pour les autres. «Ils ont fait quelque chose pour moi, je veux faire quelque chose pour eux», lance-t-elle en souriant.

La grande majorité des demandeurs d’asile sont des familles avec de jeunes enfants. Le défi, selon Marjorie Villefranche, c’est de trouver un emploi ou un logement lorsqu’on doit s’occuper de son enfant. En raison de leur statut, ils ne peuvent obtenir d’aide financière pour les garderies. Tout se complique pour les familles monoparentales, qui ne pourront alors pas travailler.

«L’autre difficulté, c’est pour les enfants qui ont fini le secondaire et qui ne pourront pas aller au cégep ou à l’université. Ils devront s’inscrire comme étudiants étrangers, et c’est très cher», ajoute Marjorie Villefranche.

Malgré l’attente et l’instabilité de sa situation, Mme Bazil sait que son avenir sera meilleur au Canada. «Je bénis le Canada, dit-elle, ont y traite les immigrés comme des humains». Ayant passé par les Bahamas après avoir quitté Haïti, elle se souvient du racisme contre les immigrés, de la crainte d’être envoyée en prison qui sévissaient là-bas. Elle espère maintenait obtenir une réponse positive pour sa demande d’asile et trouver un emploi.

La situation à la frontière se stabilise

Depuis le 22 septembre, 900 demandeurs d’asile ont été récupérés à la frontière puis hébergés par le CIUSSS du Centre-Ouest. Au mois d’août, durant le pic d’arrivées, 3 000 personnes pouvaient être hébergées par jour. «On est dans une courbe descendante, on revient à des taux plus stabilisés, explique Francine Dupuis, PDG adjointe au CIUSSS du Centre-Ouest. En période normale, c’est 500 personnes qu’on héberge par mois.» Sur les trois centres d’hébergement temporaires, deux ont été fermés et le troisième le sera dans les prochaines semaines. Le camp érigé par l’armée à Saint-Bernard-de-Lacolle a lui aussi été démantelé. L’armée a installé des roulottes chauffantes pour anticiper des arrivées de demandeurs d’asile cet hiver. «S’il y a de nouvelles vagues, ce seront des Haïtiens qui n’auront pas eu de renouvellement de visa au États-Unis», prévient Francine Dupuis.

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