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Une «victime de l’arrêt Jordan» en croisade

Dannick Lessard is seen in front of the courthouse Wednesday, June 28, 2017 in St, Jerome, Quebec. Lessard was shot nine times, and is now suing the federal government for $3.2 million because the man accused in his shooting was released due to court delays. THE CANADIAN PRESS/Ryan Remiorz Photo: Ryan Remiorz/La Presse canadienne

MONTRÉAL — Dannick Lessard, déjà victime d’une tentative de meurtre, se sent aujourd’hui victime à nouveau — cette fois d’un système judiciaire qui devrait précisément le défendre.

Atteint de neuf balles tirées par un homme masqué en octobre 2012, M. Lessard s’en est sorti presque miraculeusement, mais au prix de longues souffrances.

Par contre, son présumé agresseur, Ryan Wolfson, qui purge déjà une peine de prison à perpétuité pour un autre meurtre, a bénéficié récemment, comme des dizaines d’autres accusés au pays, d’un arrêt des procédures dans cette affaire, grâce à l’«arrêt Jordan». M. Lessard estime que cette décision de la Cour suprême du Canada ne devrait pas s’appliquer aux crimes graves contre la personne.

Même si M. Lessard aurait préféré que cette affaire soit entendue par le tribunal, il est parfaitement conscient que son agresseur présumé n’aurait pas pu être condamné à une peine plus sévère que celle qu’il purge déjà. Il se faisait donc à l’idée et tentait de «boucler la fameuse boucle de la victime», de «passer à autre chose», philosophe… jusqu’à ce que l’absurdité de la situation le rattrape.

«Je me suis dit: ça n’a pas de sens que j’aie mangé neuf balles, et que mon agresseur puisse s’en sortir aussi facilement», raconte-t-il en entrevue.

M. Lessard, qui aura 39 ans ce mois-ci, se bat aujourd’hui pour que les victimes de crimes graves ne soient pas en plus par la suite victimes du système judiciaire. «Quand tu commets un crime grave contre la personne, si ça prend six ans avant que tu sois jugé, bien ça prendra six ans!», lance-t-il.

Décision en appel
En attendant, il est satisfait que la Couronne ait décidé de porter en appel l’arrêt des procédures prononcé en Cour supérieure. Il a par ailleurs intenté une poursuite contre le gouvernement fédéral parce qu’au moment de la tentative de meurtre alléguée, son présumé agresseur était, semble-t-il, en sortie non autorisée d’une maison de transition.

M. Lessard, de la région de Montréal, a aussi écrit au premier ministre Justin Trudeau et à la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, entre autres. Le député conservateur Luc Berthold, qui représente la circonscription de Mégantic-L’Érable, où est né M. Lessard, parraine sa pétition électronique sur le site de la Chambre des communes. Cette pétition demande au gouvernement fédéral de nommer rapidement de nouveaux juges au Québec.

«Ce n’est pas normal que des gens soient libérés d’accusations criminelles à cause des délais», a estimé le député en entrevue. «Tous les niveaux de gouvernements sont appelés à faire leur part pour éviter que cela se reproduise.»

M. Lessard, lui, n’a jamais pu reprendre le travail depuis la tentative de meurtre — il était encore opéré en juin dernier. «Je vais vivre avec les séquelles toute ma vie: j’ai perdu la moitié d’un poumon, l’usage d’un bras, j’ai perdu la santé, et psychologiquement, je suis en choc post-traumatique.»

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