Soutenez

Les casseuses

Des milliers de victimes prennent la parole adéquatement pour dénoncer une culture du silence. Mais bien sûr, notre attention sera monopolisée par les 2-3 éléments radicaux qui ambitionneront d’aller trop loin. Un peu comme les casseurs au temps de la grève étudiante, un peu comme les racistes énervés au temps de la charte, les éléments les moins contrôlables décrédibilisent une cause sinon défendable.

Même dans les cercles féministes les plus engagés, le malaise se fait sentir. Prendre la parole, oui, mais se faire justice soi-même, un instant. On s’entend, l’idée de délatter de présumés agresseurs sous le couvert de l’anonymat, sans aucune forme de procès, c’est pas l’idée du siècle, d’un point de vu marketing. Ça donne un peu raison à ceux qui trouvent que «le féminisme va trop loin». Ça leur donnera, du moins, un os dans lequel mordre. Ça leur fera oublier qu’à chaque fois qu’une population n’a pas confiance en son système de justice, il s’en trouve pour prendre la justice en main. Que ce soit les vigilantes aux frontières sud des États-Unis, les papas chasseurs de pédophiles ou… les victimes d’agressions non dénoncées frustrées par un système qui réussit mal à contrer le rapport de force entre la victime et son agresseur.

Les obstacles qui se dressent devant les victimes qui tentent de porter plainte sont nombreux et le protocole de dénonciation à l’UQAM ne fait pas exception. Au contraire. L’AFESH-UQAM, l’association accusée d’avoir pris part à la vague de délation à l’UQAM, rappelait hier soir que «sur la centaine de plaintes officielles déposées dans la dernière année, seulement une cinquantaine ont été jugées recevables». C’est notamment contre cette culture que s’érigeait la semaine passée #AgressionNonDénoncée. Tout le monde était d’accord pour dire alors qu’il y avait un problème. Que nous devions mettre en place des structures pour que les victimes se sentent à l’aise de porter plainte.

 

Bien sûr, la délation anonyme n’est pas la solution à ce problème. Mais pendant que l’on s’indigne du dérapage de quelques personnes, la direction de l’UQAM a démontré que dans le dossier des plaintes pour harcèlement, elle s’intéressait beaucoup plus à défendre la réputation de ses professeurs que la sécurité de ses étudiantes. Sa réaction spontanée à des actes de vandalisme a été d’ouvrir une enquête pour identifier les coupables. Que faudra-t-il pour qu’elle ouvre une enquête sur les agissements de ses professeurs? Pour qu’elle se penche sur ses propres fautes dans la gestion des plaintes pour agression et harcèlement?

C’est exactement ça, la culture du viol. Celle que tout le monde dénonçait la semaine passée en célébrant la prise de paroles des victimes. Mais il faut croire que la parole des femmes n’est chouette à entendre que lorsqu’elle est vulnérable et inoffensive, pas quand elle dérange.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.