Si elle convient que plusieurs éléments architecturaux de la structure du théâtre Empress devront être sauvegardés à travers son processus de revitalisation, la mairesse de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce (CDN-NDG), Sue Montgomery, envisage sérieusement de démolir l’édifice emblématique d’ici la fin 2021, l’intérieur étant tout simplement «pourri».
«Ça va être trop cher de rénover le bâtiment. C’est pourri à l’intérieur. Même les éléments architecturaux sont disparus. Il y a des choses qui poussent là-dedans. C’est épouvantable», a-t-elle expliqué lundi, convenant toutefois que l’architecture «très rare» de la façade extérieure devra être préservée.
L’arrondissement souhaite entamer le chantier «le plus tôt possible». Il remet même en doute l’efficacité des autorités municipales.
«La Ville ne bouge pas très vite, vous savez. On verra. J’espère pouvoir commencer la démolition avant la fin de mon mandat, donc en 2021.» – Sue Montgomery, mairesse de CDN-NDG
«Les experts nous indiquent qu’il sera extrêmement difficile de conserver le bâtiment», ajoute Mme Montgomery, blâmant les administrations antérieures pour leur immobilisme. «Nous allons tout faire pour essayer de conserver le bâtiment et intégrer le style égyptien dans un nouveau Théâtre Empress», promet-elle.
Points de vue différents
Ces propos contrastent avec ceux de la conseillère dans le district de Côte-des-Neiges, Madga Popeanu. «Une démolition, c’est la dernière chose qu’on souhaite. On est très sensibles aux questions de patrimoine», avait-elle avoué à Métro vendredi, disant vouloir éviter un «autre théâtre Snowdon». Vendu par la Ville, ce dernier avait été démoli par un promoteur il y a deux ans, puis remplacé par des condos.
Un contrat de 250 000$ sera octroyé ce mercredi à la Société d’habitation et de développement de Montréal (SHDM) pour entamer des études de faisabilité sur la «revalorisation» du théâtre Empress. L’établissement fait l’objet de discussions depuis plus de 25 ans dans Notre-Dame-de-Grâce.
Mais cette fois-ci est la bonne, croit la mairesse Montgomery, la SHDM possédant «le financement et les ressources» que plusieurs autres n’avaient pas par le passé.
Entre 36 et 50 logements
De part et d’autre, les priorités dans ce dossier demeurent de maintenir l’offre culturelle dans le quartier, tout en y ajoutant des commerces et des logements abordables. Pendant que l’administration Plante et la SHDM refusent de parler de nombre d’unités locatives pour l’instant, la mairesse Montgomery, elle, affirme avoir fait son choix.
Entre 36 et 50 logements abordables seront érigés sur les terrains du théâtre Empress, selon les premières estimations de l’arrondissement.
«Ce sera des appartements pour les artistes et leurs familles. Dans NDG, on a plein de musiciens et d’artistes, mais on manque de logement abordable», insiste celle qui a été exclue du caucus de Projet Montréal en janvier, dans la foulée d’allégations de harcèlement au travail contre sa directrice de cabinet, Annalisa Harris.
«On veut que ça devienne un hub culturel», renchérit Sue Montgomery.
Une façade à protéger
Appelé à réagir, le directeur des politiques d’Héritage Montréal, Dinu Bumbaru, appelle les décideurs politiques à voir le projet comme «une institution urbaine».
«Il faut traiter la façade sur Sherbrooke comme un objet en soi. C’est un élément emblématique. Il ne faudrait pas commencer à dire qu’on garder deux ou trois pierres en démolissant le reste. C’est un tout. Ça prend des équipes qui intègrent l’expertise en patrimoine dès le départ», tonne-t-il.
«On voit le potentiel créatif du projet, mais il faut voir ce qu’on peut faire avec les volumes bâtis, d’un point de vue architectural. Cette façade est exceptionnelle. Elle participe à la personnalité du quartier.» – Dinu Bumbaru, d’Héritage Montréal
Son groupe entend travailler «plus étroitement» avec la SHDM dans les prochains mois sur les questions patrimoniales. «La SHDM paie des taxes, donc le bottom-line compte aussi pour eux. On comprend ça», dit M. Bumbaru.
Interpellée par Métro lundi, Magda Popeanu a pour sa part réitéré la nécessité de «viabiliser le projet».
«Si on arrive avec une initiative appuyée à 100% par des subventions gouvernementales ou institutionnelles, ce sera plus complexe. Les essais des dernières années l’ont prouvé. Il faut de l’argent pour rebâtir, mais aussi maintenir», note-t-elle.
Une consultation publique doit se tenir en avril.