Alors que le gouvernement Legault confirmera ce soir le passage de Montréal au palier rouge de son système d’alertes régionales, l’inquiétude plane quant aux nouvelles restrictions qui attendent les commerces de la métropole.
Le premier ministre du Québec, François Legault, prendra part à 17h30 à une conférence de presse à Montréal en présence du ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, et du directeur national de la santé publique, Horacio Arruda.
Ils y annonceront alors le passage de Montréal et de Québec en zone rouge. Cela représente l’alerte maximale au système mis en place par le gouvernement Legault au début du mois en prévision de la deuxième vague du coronavirus.
En moins de trois semaines, Montréal aura ainsi basculé du vert au rouge, alors que la transmission communautaire y augmente rapidement. Dimanche, la Santé publique y a recensé 375 nouveaux cas en 24 heures, sur 896 nouvelles infections dans l’ensemble de la province.
Incertitudes
Le gouvernement du Québec n’a pas encore confirmé quelles restrictions il entend mettre en place pour les régions qui passeront au palier rouge. Sur son site web, il évoque la possibilité d’appliquer «des mesures plus restrictives pouvant aller jusqu’à faire cesser les activités non essentielles pour lesquelles le risque ne peut pas être contrôlé suffisamment». Il souhaite toutefois éviter «autant que possible» un confinement généralisé, tel que vécu au printemps.
En entrevue à l’émission Tout le monde en parle, dimanche, le ministre Christian Dubé a dit vouloir éviter les fermetures de commerces et conserver les écoles ouvertes dans les régions en rouge. Il a toutefois confié que Québec devra prendre des «décisions difficiles pour les bars et les restaurants».
Québec pourrait ainsi ordonner la fermeture des bars et des salles à manger des restaurants pour les régions passant en zone rouge.
«On est tous nerveux. On panique […] J’ai des tenanciers qui me disent qu’ils n’ont pas dormi depuis hier», confie à Métro le président de l’Union des tenanciers de bars du Québec, Peter Sergakis.
Ce dernier rappelle que plusieurs mesures sanitaires ont été mises en place dans les bars. Les clients doivent notamment porter un masque pour rentrer dans ces établissements en plus de s’inscrire à un registre. Les bars ont aussi réduit leur capacité pour faciliter le respect de la distanciation physique.
La «mauvaise cible»
Ainsi, dans une lettre de trois pages acheminée au gouvernement Legault, dont Métro a obtenu copie, M. Sergakis prie celui-ci de ne pas fermer les bars, qu’il qualifie de «mauvaise cible».
«Si on ferme tous les bars, les gens vont aller dans les parcs, dans des rassemblements privés, là où la Santé publique n’a aucun contrôle», soulève M. Sergakis en entrevue.
Même son de cloche du côté de l’Association Restauration Québec (ARQ), qui a envoyé un courriel au ministre Dubé pour le supplier de ne pas fermer les salles à manger des restaurants qui passeront en zone rouge. Une telle mesure risquerait d’entraîner la fermeture de nombreux restaurants, alors que ceux-ci font pourtant «partie de la solution pour contrôler la pandémie».
«Les bars et les restaurants, ce ne sont pas les endroits où on juge que c’est problématique. C’est plutôt dans les rassemblements privés dans les maisons, où le gouvernement a peu de contrôle [que l’on assiste à des éclosions de coronavirus]. Nous, on est capables d’offrir un lieu sécuritaire», affirme à Métro le vice-président aux affaires publiques et gouvernementales de l’ARQ, François Meunier. Une telle décision entraînerait par ailleurs d’importantes pertes de nourriture, ajoute-t-il.
«Une fermeture supplémentaire des restos-bars et des bars sera l’équivalent de planter le dernier clou dans le cercueil de l’industrie.» -Extrait de la lettre de Peter Sergakis adressée à Québec
Des commerces fragilisés
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) se dit aussi vivement inquiète. Un nouveau confinement, même partiel, pourrait affecter durement des commerces qui n’ont toujours pas réussi à se relever financièrement de la première vague du coronavirus.
Plusieurs commerces risquent ainsi de «revivre le cauchemar de mars, mais dans une situation financière ébranlée […] Ça peut mettre des PME au tapis», laisse tomber le vice-président québécois de la FCEI, François Vincent, qui presse Québec de débloquer plus de subventions pour les commerces qui écopent de la pandémie.
«Si la pandémie dure encore pour les deux prochaines années, le gouvernement a ses limites. C’est aux individus à prendre en compte l’impact de leurs gestes sur les commerces», souligne pour sa part la directrice de l’Association des sociétés de développement commercial de Montréal, Caroline Tessier. Elle demande donc aux citoyens de soutenir davantage les commerces locaux et de respecter les règles sanitaires «de façon très rigoureuse».