Montréal

15 recommandations pour une transition écologique féministe

Anuradha Dugal, la présidente du Conseil des Montréalaises.

Anuradha Dugal, la présidente du Conseil des Montréalaises, lors de son allocution au lancement de l'avis Pour une transition écologique juste et féministe à Montréal.

Le Conseil des Montréalaises (CM) lançait ce mercredi 2 novembre, à la Maison du développement durable, son avis Pour une transition écologique juste et féministe à Montréal. Ce sont donc 15 recommandations à l’intention de la Ville de Montréal qui ont émergé de la recherche effectuée par le CM.

Si elles sont appliquées par l’administration Plante, ces recommandations feront en sorte que les politiques de lutte aux changements climatiques seront davantage «de l’ordre de l’aménagement urbain et des politiques publiques. C’est ce qui va être proposé davantage pour éviter de remettre toute la responsabilité aux femmes», se réjouit Marianne-Sarah Saulnier, membre du comité de recherche du CM.

Car si l’impact de la crise climatique sur les populations plus vulnérables est bien maîtrisé et compris par la Ville, les solutions proposées «ne seront pas des pratiques écoresponsables, qui sont des responsabilités individuelles». C’est ce qu’explique celle qui est aussi doctorante en anthropologie, et qui rappelle d’ailleurs que ces responsabilités individuelles reposent généralement sur «le travail reproductif», qui est presque exclusivement effectué par les femmes.

Le travail reproductif est un concept clé pour la compréhension de l’avis du CM. Il s’agit des tâches domestiques et du travail de care, dont les femmes prennent principalement la charge. Quand on parle de care, on parle «des soins prodigués, entre autres, aux enfants ou encore aux aînés», définit l’avis. La socialisation aux rôles sociaux genrés fait en sorte que «les femmes sont largement surreprésentées dans la prise en charge» de ce travail, ainsi que dans les différents «métiers de care». On parle ainsi entre autres des enseignantes et des infirmières.
«C’est un travail qui est non rémunéré et qui prend beaucoup de temps dans la planification des femmes, dans leurs déplacements, dans leur logement», explique Mme Saulnier. Elle rappelle que tout cela est exacerbé en état de crise climatique.

Il y a des inégalités sociales, et elles sont exacerbées en état de crise, et n’importe quelle crise. On l’a vu avec la pandémie. C’est la même chose avec la crise climatique.

Marianne-Sarah Saulnier, membre du comité de recherche de Conseil des Montréalaises

La chercheuse s’avoue très optimiste quant à la réception de l’avis par le comité exécutif de la Ville. Lors du lancement, quelques membres de ce comité étaient présentes. Despina Sourias, conseillère associée au comité exécutif de la Ville de Montréal pour la condition féminine, la jeunesse, la diversité et les personnes aînées, a d’ailleurs pris part aux allocutions en début de lancement.

Cet avis est «très cher pour notre administration, a-t-elle affirmé, on accueille avec très grand intérêt les 15 recommandations émises par cet avis. On va le lire en détail, l’analyser et revenir avec une réponse officielle».

Quinze recommandations, trois objectifs


L’objectif premier des recommandations est de veiller à ce que la Ville de Montréal ait une plus grande compréhension «des enjeux climatiques genrés et de leur impact sur les populations plus vulnérables», dont font partie les femmes, «et sur leur capacité d’adaptation».

Le deuxième objectif, explique la chercheuse, est la prise en compte des femmes dans les mesures de lutte aux changements climatiques. «Il faut s’assurer qu’il y ait une reconnaissance de l’impact différencié sur le genre en raison des changements climatiques», explique Mme Saulnier.

Le troisième et dernier objectif est de favoriser l’implication des femmes et leurs propositions. Pour lire l’avis et les 15 recommandations, c’est par ici.

Cinq lieux d’inégalités cernés par les recherches

Cinq éléments sont ressortis de la recherche effectuée par le Conseil des Montréalaises, dont l’accès au logement, l’accès aux transports, l’accès aux espaces verts et aux commerces de proximité, en plus d’une plus grande volonté de s’impliquer dans la lutte aux changements climatiques.

Ceux-ci démontrent que les inégalités vécues par les Montréalaises n’ont rien de naturel, mais sont créées par des choix d’aménagement du territoire.

Dans notre méthodologie, on a superposé des cartes de défavorisations matérielles et sociales, avec des cartographies des îlots de chaleur à Montréal. On a vu une correspondance qui est pratiquement parfaite.

Marianne-Sarah Saulnier, membre du comité de recherche de Conseil des Montréalaises

Donc, là où les gens sont les plus pauvres, les changements climatiques frappent le plus fort. Rappelons que les femmes font partie des populations vulnérables principalement touchées par la crise climatique. Mondialement, elles représentent «70% de la population mondiale en dessous du seuil de la pauvreté», signale la chercheuse.

À Montréal, ce sont les femmes qui sont les plus nombreuses à vivre sous le seuil du faible revenu, et il y a une plus grande proportion d’elles qui sont locataires. Donc, déjà, elles sont plus vulnérables.

Marianne-Sarah Saulnier, membre du comité de recherche de Conseil des Montréalaises

Dans le dernier Plan climat de la Ville, «les femmes n’étaient pas prises en compte», se désole la chercheuse. L’avis Pour une transition écologique juste et féministe à Montréal tombe à point pour que le Plan d’urbanisme et de mobilité (PUM) et le Plan climat 2020-2023 soient «porteurs d’une transition écologique efficace et d’une plus grande justice sociale», peut-on lire dans un avis aux médias.

«Nos oreilles sont ouvertes parce qu’on veut améliorer le Plan climat de la Ville qui s’échelonne sur 10 années», exprimait justement la membre du comité exécutif de la Ville de Montréal responsable de la transition écologique et de l’environnement, Marie-Andrée Mauger. Elle souligne avec joie la mise en évidence, grâce à l’avis, de la grande volonté des femmes de participer à la transition écologique.

La recherche derrière cet avis provient d’une revue de littérature et d’entrevues effectuées sur le terrain avec des militantes, des intervenantes dans des organismes communautaires et des expertes dans les milieux de l’environnement et du féminisme. Le comité de recherche a abordé l’enjeu avec une approche intersectionnelle.

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