Montréal

Où les cyclistes se font-ils percuter à Montréal?

TAG-Métro-vélo-dodoQuelles intersections et quelles rues montréalaises cumulent le plus de collisions entre des voitures et des vélos ? Pour répondre à cette question, Métro a cartographié plus de 2 000 accidents de la route.

Comment nous y sommes-nous pris ?
Nous avons obtenu la liste détaillée de toutes les collisions déclarées à la Société de l’assurance automobile du Québec de 2012 à 2014. Ces données se basent sur les rapports des policiers appelés sur les lieux d’un accident.

Notez que le positionnement des accidents est approximatif. Il varie en fonction de la précision des adresses indiquées dans les rapports de police et de la géolocalisation faite par Google Maps. Si vous remarquez qu’un accident n’est pas au bon endroit, écrivez-nous à web@journalmetro.com.

Carte détaillée des collisions

Cliquez sur «Visible layers» pour sélectionner la catégorie d’accidents de votre choix.

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Carte des accidents par densité

Plus une zone est rouge, plus le nombre d’accidents est élevé.

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Carte animée des accidents en fonction du temps

La ligne du temps au bas de la carte vous indique le mois et l’année.

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Les pistes cyclables ne suffisent pas

En octobre 2013, Catherine Joubert s’est faite heurter et rouler dessus par un 4×4. Elle roulait pourtant sur la piste cyclable du chemin de la Côte-Sainte-Catherine, où un terre-plein sépare automobilistes et cyclistes.

Mais le pouvoir protecteur de la piste n’a été d’aucune aide à la jeune femme qui traversait une intersection. La lumière étant verte, elle s’était engagée sur la voie juste avant que le 4×4 ne lui coupe brutalement la route en tournant à droite. « Je suis partie en ambulance à l’hôpital général, se remémore-t-elle. Ma jambe était bleue. Je hurlais de douleur. On ne pouvait pas la toucher. » Presque deux ans plus tard, sa jambe est toujours sensible.

«Je ne pense pas que les pistes cyclables avec un terre-plein rendent ça plus sécuritaire, soutient-elle. J’en suis la preuve.» – Catherine Joubert, cycliste montréalaise

À Montréal, la très grande majorité des pistes cyclables passent par des intersections que les cyclistes n’ont d’autre choix que de traverser. Le cadre des vélos se frotte alors à la carrosserie des voitures, avec des conséquences parfois dramatiques.

Métro a cartographié plus de 2000 collisions entre vélos et autos qui ont eu lieu de 2012 à 2014. Nos cartes montrent que la très grande majorité des accidents ont lieu dans les intersections (65%) ou près d’une intersection (18%) et ce, même lorsqu’il y a une piste cyclable.

Certaines intersections avec des pistes cyclables font même partie des croisements avec le plus d’accidents, comme par exemple Maisonneuve et Saint-Urbain, ou encore Christophe-Colomb et Crémazie.

Aménagements nécessaires

«Ce qui est sidérant avec ce problème, c’est qu’il soit si répandu», note Patrick Morency, qui étudie la sécurité des usagers de la route pour la Direction de la santé publique de Montréal.

Une partie de la solution est selon lui de rendre les cyclistes plus visibles: «À Montréal, il y a souvent des automobilistes garés au coin des rues. C’est un problème.» Le chercheur ajoute qu’une réduction de la chaussée et un élargissement des pistes cyclables aux intersections pourraient aider à réduire le nombre d’accidents. Des feux de circulation réservées aux cyclistes, ou le droit pour les vélos d’utiliser les lumières pour piétons sont d’autres options à étudier.

Des artères meurtrières

Quatorze cyclistes ont perdu la vie de 2012 à 2014 à Montréal. De ce nombre, 11 sont morts des suites d’une collision ayant eu lieu sur une artère (79%), selon l’analyse de Métro.

Près de 60% de toutes les collisions impliquant des vélos ont lieu sur ces routes à fort débit.

«Montréal est à la fois en avance et en retard», indique Patrick Morency. Selon l’expert, les arrondissements ont pris d’excellentes mesures pour apaiser la circulation avec des dos d’ânes et des saillies de trottoir. En revanche, «ce qui reste à faire, c’est de s’occuper des réseaux artériels, où l’on trouve peu de mesures pour protéger les cyclistes tout comme les piétons.»

Des conditions sécuritaires dit la Ville

Philippe Sabourin, porte-parole de la Ville, souligne que les intersections et les artères où surviennent le plus d’accidents sont aussi les plus achalandées. «Lorsque le nombre de ces accidents est mis en relation avec le nombre de cyclistes […], des études sur les données de Montréal montrent que le risque individuel par cycliste est plus faible au centre-ville et sur les pistes cyclables», indique-t-il par courriel, sans toutefois nommer les études en question.

Les pires intersections et rues

Nous avons montré notre carte à Jean-François Pronovost, vice-président de Vélo-Québec. Voici les intersections et les rues qui l’ont fait réagir:

Saint-Denis et Laurier
– Il y a une piste cyclable sur Laurier. On y trouve un volume très élevé de cyclistes, de trois à quatre milles par jour. Ils traversent Saint-Denis, qui est l’une des pires rues de Montréal. Peut-être qu’une meilleure séquence pour les feux de circulation pourrait aider.

La rue Rachel
– La piste cyclable sur la rue Rachel est complètement séparée, mais les conflits arrivent aux intersections, parce qu’il y a des virages, des autos. Il faut toujours avoir une forme de vigilance aux intersections. Même si en principe on a la priorité, si une voiture tourne, on est fait.

La rue Ontario Est
– La rue Ontario, c’est un peu le Far West. C’est n’importe quoi. L’aménagement est laissé au hasard. Il n’y a jamais eu d’attention là pour dire comment on traite les intersections pour les cyclistes. Mais on n’a pas le choix. Si on veut circuler dans ce quartier là, dans l’axe Est-Ouest, on doit passer par là.


Vos témoignages

À la suite du premier article de cette série sur la sécurité à vélo, publié la semaine dernière, vous avez été nombreux à nous écrire pour nous faire part des accidents dont vous avez été victimes.

Flavie Léger-Roy
«J’ai vécu un seul accrochage en vélo, il y a plusieurs années. Je roulais sur St-Denis vers le sud, assez rapidement, bien à droite dans la voie. Une voiture m’a dépassée à la hauteur de Mont-Royal, puis s’est immédiatement tassée sur moi pour se stationner. Je n’ai pas pu freiner à temps et je me suis écrasée contre le côté de la voiture. Le chauffeur est sorti, piteux, en disant qu’il avait pourtant mis son clignotant… J’étais hors de moi. La vitesse à laquelle ce genre d’accident arrive est stupéfiante, et l’inconscience des chauffeurs m’étonne. Même autour de moi, les gens sont impatients vis-à-vis des cyclistes. Il y a bien sûr une minorité qui n’en fait qu’à sa tête, mais il reste qu’un vélo est nettement moins dangereux qu’une voiture!»

Hugo Morin
«Je suis coursier à vélo depuis trois ans. Mon premier accident, c’était à cause d’une dame dans un taxi. Le taxi était arrêté à une lumière, sur Ontario, près de Frontenac, en plein milieu du trafic. La dame était un peu trop pressée. elle a ouvert sa porte sans regarder. J’ai essayé de l’éviter. Ma main a frappé le côté de la porte. J’en garde une belle cicatrice dans la main gauche.

Une autre fois, alors que je descendais Côte-des-neiges, à peu près à la hauteur de Côte-Sainte-Catherine, un taxi venait à sens inverse. Le chauffeur a décidé de tourner et je suis rentré sur le côté droit de son véhicule. Il est sorti de sa voiture, un peu en panique, ébahi. Et moi à terre, de me relever. Heureusement, j’avais réussi à freiner. Il s’est excusé à moitié et m’a dit «Je t’avais pas vu». C’est probablement la phrase qu’on entend le plus comme cycliste.»

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