Alors que toutes les organisations syndicales du secteur public tiennent deux manifestations nationales, le gouvernement du Québec dépose de nouvelles offres «bonifiées» auprès des représentants syndicaux des secteurs public et parapublic.
Il s’agit du troisième dépôt gouvernemental dans le cadre des négociations pour le renouvellement des conventions collectives, échouées depuis un an, de quelque 550 000 employés de ces secteurs.
Dans cette nouvelle offre, le gouvernement maintient et ajoute des propositions visant à améliorer les conditions de travail des salariés, a déclaré la ministre responsable de l’Administration gouvernementale, Sonia LeBel.
Malgré le déficit budgétaire qui s’élève à 15 milliards de dollars, le gouvernement maintient ses offres de 3,3 milliards de dollars. Il propose notamment une augmentation salariale de 5% sur trois ans (1,75 %, 1,75 % et 1,5 %), supérieure à l’inflation actuelle qui se situe à 4,87%.
«Au total, en salaire et en condition de travail, c’est entre 3,7 milliards et 4,1 milliards de dollars que le gouvernement met sur la table pour ces négociations», a affirmé Mme LeBel.
Majoration et augmentation salariale
Les salariés ayant une rémunération de moins de 50 000$ pourraient bénéficier d’une augmentation salariale spécifique si les offres sont acceptées par les syndicats.
De plus, le gouvernement propose, pour l’ensemble des salariés, une majoration salariale pouvant aller jusqu’à un maximum de 1%, mais seulement si l’inflation réelle est supérieure à 5% et si la croissance économique est au rendez-vous.
Cela pourrait donc donner une augmentation de 6% sur les trois ans. «Chaque augmentation de 1% équivaut à une hausse récurrente de 400 M$», a souligné Sonia LeBel.
Par ailleurs, Québec propose un montant forfaitaire supplémentaire aux montants qui sont déjà sur la table de négociation. Cela représente une valeur de 400 M$ pour l’ensemble des salariés. Avec cette offre, le gouvernement de François Legault veut faire un «geste de reconnaissance».
Enveloppes sectorielles
Pour la première fois depuis le début des négociations, le gouvernement a octroyé à chacune des tables sectorielles des montants spécifiques pour régler les conditions de travail, a déclaré Sonia LeBel.
La ministre assure avoir mis sur la table un bon nombre de propositions pour les enseignants du primaires et du secondaires, dont une augmentation de salaire pour ceux en début de carrière.
Concernant la Protection de la jeunesse, Québec veut améliorer les conditions de travail des intervenants, notamment en ajoutant une nouvelle prime particulière pour ceux travaillant en centre-jeunesse.
De plus, le gouvernement propose la bonification de différentes primes déjà existantes et la garantie de poste avec un minimum de jours travaillés. «Ces mesures nous permettront aussi d’assurer l’attraction de nouveaux intervenants et de diminuer ainsi la charge de travail dans ce secteur», a précisé Mme LeBel.
Les infirmières quant à elles pourraient notamment bénéficier de bonifications de primes pour les quarts de travail de soir, de nuit et de fin de semaine.
Pour les préposées aux bénéficiaires à temps complet en CHSLD, Québec propose, entre autres, une rémunération de 26 $ de l’heure, soit 49 000 $ par année, et une garantie de poste avec un minimum de jours travaillés.
Pas assez pour la CSN
La Confédération des syndicats nationaux (CSN) se dit «extrêmement déçue» par la proposition de Québec, «trop collée» sur celle qui avait été rejetée en mai 2020 par l’organisation syndicale qui représente plus de 160 000 travailleuses et travailleurs des services publics.
«Avec cette contre-proposition salariale qui n’en est pas une, il est clair que nous avons été conviés à une nouvelle opération de communication du gouvernement Legault; un désolant exercice de relations publiques de la CAQ sur le dos des travailleuses et des travailleurs, alors que ceux-ci se mobilisent partout à travers le Québec pour défendre les services publics», indique-t-on par voie de communiqué.
Les paramètres salariaux restent identiques à la dernière offre, soit 1,75 % en 2020, 1,75 % en 2021 et 1,5 % en 2022, déplore la CSN.
Les montants forfaitaires à la première et à la deuxième année sont, quant à eux, légèrement bonifiés. «Des mesures éphémères, ce n’est pas ça qui va attirer et retenir le personnel. On est loin du coup de barre nécessaire», lance la vice-présidente de la CSN, Caroline Senneville.
Des syndicats «sonnent l’alarme»
Mercredi matin, des milliers de travailleurs, toutes organisations syndicales confondues ont manifesté leur ras-de-bol devant l’Assemblée nationale à Québec et devant le bureau du premier ministre à Montréal.
Elles revendiquent des améliorations «immédiates et significatives» aux conditions de travail et aux salaires du personnel de l’État.
Sans quoi il sera impossible d’empêcher les milliers de départs ni de recruter de nouvelles personnes pour venir rapidement prêter main-forte, préviennent les syndicats. «A-t-on les moyens de se priver des services publics? La dernière année est venue nous confirmer, hors de tout doute, que la réponse est non», déplorent les leaders syndicaux d’une seule voix.
Si le gouvernement refuse toujours de répondre adéquatement à leurs demandes, les organisations syndicales déploieront des actions de mobilisation plus musclées sur le terrain au cours des prochaines semaines.
En guise de protestation, les travailleurs sont invités à «sonner l’alarme» avec leur téléphone cellulaire ou leur montre afin de dénoncer l’inaction du gouvernement face à celles-ci.
De son côté, la ministre Sonia LeBel dit être convaincue d’avoir une offre «équitable et généreuse» dans le contexte actuel. «Il y a présentement sur la table ce qui est nécessaire pour dégager des ententes», a-t-elle affirmé.