Dans son fantastique ouvrage intitulé Sapiens, Yuval Noah Harari développe longuement sur le concept d’inter-coopération, lequel ayant permis à ces mêmes sapiens, au contraire d’autres humains, de survivre au fil des époques :
«Physiologiquement, notre capacité à fabriquer des outils ne s’est pas sensiblement améliorée au cours des 30 000 dernières années […]. Toutefois, notre capacité à coopérer avec des masses d’étrangers s’est spectaculairement améliorée. La pointe de lance en silex était taillée en quelques minutes par une personne seule, qui s’en remettait aux conseils et à l’aide d’une poignée d’amis intimes. La production d’ogives nucléaires nécessite la coopération de millions d’inconnus à travers le monde. Des ouvriers qui extraient l’uranium des profondeurs de la Terre aux spécialistes de physique théorique qui écrivent de longues formules mathématiques pour décrire les interactions des particules subatomiques. Toutes les grandes réalisations d’homo sapiens, de la construction des pyramides à son arrivée sur la lune, sont fondées sur ce type de coopération à grande échelle.»
En lisant ces passages, difficile, sinon impossible, de ne pas référer expressément à la présente époque. Celle aux prises, bien sûr, avec cette interminable pandémie, mais également empêtrée à même le plus sévère, voire délétère, tourbillon de l’histoire de l’Humanité : celui du réchauffement climatique. La vraie question réside donc à savoir si, et dans quelle mesure, la coopération soulevée par Harari agira comme instrument salvateur.
Or, à voir nos réponses à l’actuelle crise sanitaire, rien n’est moins sûr. Coopération, vous dites? Hmmm… laquelle, genre? Celle du nationalisme vaccinal, ce dernier faisant en sorte que les pays les plus riches sautent en sauvage sur toute dose disponible, laissant ainsi les moins fortunés en plan? Selon Bloomberg, plus de 35 pays ont, à ce jour, été incapables d’en administrer… une seule. Toujours selon Bloomberg, les États considérés comme fortunés ont un taux moyen de vaccination 25 fois plus importants que les autres. Quand même ahurissant, pour dire le moindre, lorsqu’il est question d’une pandémie par définition mondiale et qui, encore par définition, ne pourra s’éteindre en l’absence de solidarité inter-souveraineté.
Difficile aussi de passer outre le désengagement d’une partie effarante de la population envers la science. S’il était loisible d’en douter pré-pandémie, tel n’est plus le cas aujourd’hui. Combien de complotistes, ici comme ailleurs? Dépendamment des degrés et de la méthodologie applicable, nombre de sondages indiquent des taux stratosphériques : 20 %, 25 %, 30 %. Parfois plus.
Cette crise, quand on y pense, constituait et constitue encore le warm-up, sans jeu de mots poche, de la prochaine grande crise, celle du réchauffement.
Possible aussi, on l’a compris, d’être anti-vaccin sans être qualifié de complotiste, les récents déboires notamment marketing d’AstraZeneca, et maintenant de Johnson & Johnson, n’assurant en rien un renversement de tendance. Reste toutefois que ce refus d’être vacciné, au-delà de la raison officielle ou officieuse, ne peut que retarder cette remise sur pied de nos sociétés.
Cette crise, quand on y pense, constituait et constitue encore le warm-up, sans jeu de mots poche, de la prochaine grande crise, celle du réchauffement. Pas besoin de la tête à Papineau pour prédire l’indubitable : les pays riches, voire les riches tout court, en seront nécessairement les plus facilement épargnés, au moins dans un premier temps. Questions de moyens, financiers et militaires. Militaires? Ben oui. Quand Manhattan sera à la flotte et quête d’eau potable, quid de la réaction de l’Oncle Sam? Jeter l’Américain avec l’eau de la mer? Demander l’avis de l’ONU? Consulter l’état du droit international? Débarquer chez le voisin le plus proche, sans permission préalable? L’argent de l’épicerie sur la dernière option.
Conclusion? Que comme en font foi nos réponses à Mr. Covid, on assiste fort potentiellement à une fin de cycle. À moins, bien entendu, que le concept de coopération vanté par Harari trouve encore écho chez sapiens. Rêver, veut l’aphorisme, ne coûte rien. Pour l’instant.