L’éducation libre et démocratique est une éducation menée par l’enfant. Celui-ci choisit ses activités et ses apprentissages, s’autoévalue et décide de son horaire.
À ce jour, le gouvernement du Québec n’a pas donné son accord à la création d’écoles démocratiques publiques. Le combat pour obtenir cet accord est mené par le Réseau des écoles démocratiques au Québec (RÉDAQ), créé en 2012 par plusieurs acteurs du milieu de l’éducation motivés par une autre approche éducative. Le RÉDAQ sensibilise le public afin qu’émergent plus d’options pour répondre à différents portraits et besoins. Zoom sur cette pédagogie non coercitive encore méconnue.
Le fonctionnement
Dans une école démocratique, chaque enfant dispose de la liberté de suivre son intuition, ses envies et ses objectifs personnels afin d’acquérir des compétences. L’objectif? Apprendre, certes, mais aussi s’épanouir et assimiler des valeurs citoyennes au passage. «Chacun doit pouvoir choisir ce qu’il fait, quand, où, comment et avec qui, du moment que sa liberté n’empiète pas sur celle des autres», explique Jennifer Laroche, membre du RÉDAQ.
Par exemple, si un enfant souhaite consacrer une grande partie de son temps la pratique d’un instrument de musique, il le peut. Les adultes et le gouvernement ne décideront pas à sa place de son parcours. De plus, des «classes» sont formées uniquement si plusieurs apprenants en font la demande, et ni examens ni devoirs ne jalonnent leur quotidien.
«Par contre, rien n’empêche un jeune d’acquérir un diplôme, souligne Mme Laroche. Ça se voit régulièrement. S’il a le projet d’aller au cégep ou à l’université, il entreprendra les démarches nécessaires et orientera ses apprentissages pour obtenir un diplôme et poursuivre son cheminement.»
Diversité et égalité
L’école démocratique s’adresse aux personnes qui ne se reconnaissent pas dans le système scolaire traditionnel. Selon Jennifer Laroche, de plus en plus de parents mettent désormais la bienveillance, l’épanouissement et le plaisir d’apprendre au cœur de la vie de leurs enfants.
Ce système pédagogique convient aux élèves en difficulté scolaire, aux jeunes atteints de handicaps et à ceux issus de la communauté LGBTQ+ (qui sont plus souvent victimes d’intimidation ou de discrimination), aux enfants et aux adolescents neurotypiques ou qui n’ont aucun trouble d’apprentissage. Cette approche inclusive permet à des gens ayant divers types de personnalité ou appartenant à différents groupes d’âge de se côtoyer.
La démocratie comme mode de fonctionnement et outil pédagogique
Plus courantes en Europe et aux États-Unis, ces écoles sont dotées d’une organisation démocratique qui s’exprime par la tenue d’assemblées et la mise sur pied de comités. «Chacun, enfant comme adulte, jouit d’une part égale de décision quant au fonctionnement et à l’organisation de l’école, d’une activité, quant au règlement intérieur, à son application, etc. Ça peut aller jusqu’à l’embauche d’une personne», ajoute Mme Laroche.
Les votes sont souvent précédés de discussions et de débats, et les règles communes ne sont jamais coulées dans le béton: il peut y avoir des annulations, des modifications et des ajouts. «Au fil du temps et en fonction de la dynamique qui se crée, ces écoles se réadaptent sans cesse», explique-t-elle.
Le concept d’éducation démocratique n’est cependant pas neuf. La première école démocratique, Summerhill, au Royaume-Uni, fondée en 1921, et la Subdury Valley School, qui a vu le jour en 1968 dans le Massachusetts, continuent d’influencer des établissements similaires. Toutefois, les écoles démocratiques dans le monde ne sont jamais des déclinaisons parfaites d’un modèle en particulier.
«Ce qui est génial, c’est que chaque école est unique, explique Mme Laroche. Les apprentissages autonomes et informels, l’organisation autogérée par démocratie directe et participative et le multiâge sont les fondements de notre philosophie. Après ça, chaque centre ou école va l’incarner de différentes façons.»
«Dans un contexte d’éducation libre et démocratique, les jeunes se découvrent, explorent et apprennent en utilisant la façon qui fonctionne le mieux pour eux.»
Jennifer Laroche, membre du RÉDAQ et cofondatrice du centre d’apprentissage libre et démocratique Carpe Diem, à Québec
Au Québec
À défaut d’avoir des écoles démocratiques en sol québécois, plusieurs enfants scolarisés à domicile se rassemblent dans des centres d’apprentissage libres et démocratiques soutenus par le RÉDAQ et bâtis en cohérence avec l’esprit de l’école démocratique.
Également cofondatrice du centre Carpe Diem, situé à Québec, Jennifer Laroche indique que ce sont des espaces de confiance où les jeunes, dispensés de fréquenter l’école traditionnelle, peuvent se réunir et bâtir des projets ensemble, ou parfois individuellement. «Toutefois, les parents conservent la responsabilité de s’assurer que les demandes du ministère sont atteintes par rapport au programme scolaire d’État», précise-t-elle. Une responsabilité qui n’existerait plus si une école de ce genre ouvrait ses portes.
Bien qu’elle s’estime heureuse de l’engouement pour son centre d’apprentissage, Mme Laroche a pu tester le modèle de l’école démocratique en France avec ses enfants et soutient qu’il est pertinent. «Les jeunes évoluent dans un environnement positif qui amène la création de projets plus solides, car ils vont à l’école chaque jour. De plus, faire l’éducation à la maison n’est pas viable pour tout le monde.»