La poétesse Martine Audet, résidente d’Ahuntsic, vient de remporter le Prix littéraire du Gouverneur général. L’auteure de La société des cendres, suivi de Des lames entières s’était déjà fait remarquer avec le Grand Prix Québecor du Festival international de la poésie. Elle explique ce qui la motive à écrire de la poésie.
Comment avez-vous reçu la nouvelle du prix du gouverneur général?
J’absorbe à peine la nouvelle. C’est un mélange d’émotions. Je suis ravie, honorée. Je trouve extraordinaire qu’un jury, composé d’écrivains de différentes générations remette ce prix à mon livre parmi tous ceux qu’ils ont a eu lire. J’ai déjà été finaliste quatre fois pour le prix du gouverneur, mais cette fois c’est comme un cadeau.
C’est votre quinzième recueil qui est primé. Qu’est-ce qui a convaincu le jury cette fois, selon vous?
Écrire de la poésie c’est un livre à la fois, mais plus on écrit, plus on aiguise notre métier. Peut-être que cela arrive à nous parce qu’on a une plus grande finesse d’écriture. Il y a une expérience, c’est certain avec le langage, les images.
La poésie n’est pas mon gagne-pain. On ne peut pas vivre de cela, mais parfois des prix de ce genre nous permettent de faire du chemin. J’ai travaillé comme aide-bibliothécaire à Montréal jusqu’à récemment quand j’ai pris ma retraite. La poésie, c’est comme une manière d’exister. Une façon de pouvoir garder vives ces questions qu’on a tous. Qu’est-ce que c’est d’être au monde. Pourquoi le fait d’être mortel? C’est aussi une façon de nommer ce qui est en nous, autour de nous. C’est comment vivre devant cet étonnement du monde et devant les horreurs aussi.
Comment pourriez-vous décrire La société des cendres, suivi de Des lames entières ?
C’est difficile. C’est un recueil que j’ai construit en plusieurs suites de très courts poèmes qui essayent de témoigner des pertes, des abandons, des deuils et des traces que ça laisse en nous. D’où l’image des cendres. Il y a aussi une résistance à la disparition face à ces douleurs-là. En même temps, le recueil évoque la conviction que si on reste dans la recherche du vrai, hors des artifices, on sait que quelque part les poèmes sont des outils de présence qui peuvent nous aider à saisir tous ces manques en nous.
La deuxième partie, c’est la forme du geste, avec quoi et comment se construit le poème. Elle a été écrite d’abord pour un livre d’artiste avec [le graveur] François-Xavier Marange, décédé juste après la parution. Quand j’ai terminé La société des cendres c’était la partie qui manquait, alors j’ai demandé à pouvoir la republier.
Comment se porte la poésie?
Je pense qu’elle est très forte au Québec. Les poètes sont très actifs. Ils publient beaucoup et sont très présents. Il y a toutes sortes de courant de poésies qui existent. Il y a des maisons d’édition qui publient. Il y a des revues littéraires. Dans le même temps, la poésie est fragile peut-être parce qu’elle n’est pas toujours soutenue publiquement.
Comment êtes-vous venu à la poésie?
Au secondaire j’ai entendu des poèmes lus par mon prof. Ça a été un choc. Je me suis dit, il y a un langage qui existe pour moi. Ensuite, je n’ai rien fait jusqu’à la trentaine à cause de censures personnelles et de contraintes de la vie. Il y a aussi la difficulté de consentir à sa joie.
Pourquoi ne pas avoir choisi une autre forme littéraire comme le roman ou la nouvelle?
La poésie est un travail précis plutôt qu’une narration. Je pense qu’elle s’est imposée à moi parce que je suis du côté du questionnement alors que d’autres formes de littérature vont être davantage du bord de la proposition ou de l’introspection sur la vie.