Une résidente de L’Île-des-Sœurs, lance un véritable cri du cœur pour que les soins de santé s’améliorent au Québec. Dans une lettre envoyée à TC Media, elle raconte les circonstances du décès de son frère et les traitements qui lui ont été administrés à l’hôpital de Verdun il y a moins d’un mois. Sonia Lavoie tranche, «ce qui est arrivé à mon frère est inadmissible».
Le 20 janvier, Jean-Guy Lavoie, le frère de Sonia, est hospitalisé à l’hôpital de Verdun. L’homme qui souffre déjà d’un cancer est victime de problèmes respiratoires et vraisemblablement d’une grippe.
«Au triage, le personnel médical fait un travail irréprochable, écrit Mme Lavoie. Mon neveu et ma sœur expliquent au médecin que mon frère est en phase terminale, en plus d’avoir une artère bouchée. Le médecin pose son diagnostic: la fièvre se conjugue avec une pneumonie. La fin est proche. Le malade ayant déjà fait savoir qu’il ne voulait pas être soigné, il est convenu de l’isoler dans une chambre de l’urgence (par crainte d’une infection nosocomiale) en attendant qu’une chambre se libère pour qu’il reçoive des soins palliatifs.»
Soins palliatifs déficients
Mais voilà, les soins administrés à M. Lavoie n’étaient semble-t-il pas suffisants selon sa soeur. «On lui administre des soins palliatifs qui n’ont guère pallié sa douleur. On se croirait, non pas au Québec en 2015, mais plutôt en Azerbaïdjan en 1972. À l’urgence, les soins se limitent à l’inhalothérapie aux deux heures.»
Le temps passe et la situation ne s’améliore guère pour M. Lavoie.
«Incontinent, il se plaint d’être mouillé. Mon neveu se rend au poste des infirmières pour qu’on le change; personne n’avait pensé installer une sonde, se souvient l’auteure de la lettre. Une heure plus tard, personne n’est encore venu au chevet du malade. Le médecin fait sa visite et dit à mon neveu de réitérer sa demande. L’infirmière du poste lui répond que ce n’est pas son travail et l’invite à trouver un préposé. Le fils finit par en trouver un qui accepte de changer mon frère.»
Mme Lavoie avance que le personnel de l’urgence traite son frère comme s’il était déjà décédé. «À l’exception du médecin qui fait sa ronde le matin, personne ne vient s’enquérir de son sort.»
«Hé! Capitaine! As-tu faim?»
Dix-huit heures se sont écoulées depuis qu’il a été admis à l’urgence de l’hôpital de Verdun.
«Un préposé entre avec un plateau et hurle: « Hé! Capitaine! » As-tu faim? » Il secoue brusquement le pied de mon frère pour attirer son attention. Mon neveu répond qu’il est mourant, mais qu’il n’est pas sourd. La douleur s’intensifie, mais les médicaments administrés ne suffisent pas. Le médecin prétend qu’il ne faut pas assommer le malade. Nous sommes d’un tout autre avis.»
«Ça fait partie du processus»
Pour la sœur du patient, le spectacle est intolérable. Le 23 janvier, l’homme de 76 ans est décédé. Les heures qui ont mené à son décès ont été difficiles.
«Vers 15 h, nous demandons à l’infirmière d’augmenter sa médication pour apaiser ses souffrances, se rappelle-t-elle. Mais c’est presque un crime de lèse-majesté que d’oser contester le protocole. On nous répond machinalement que c’est le changement de quart et qu’il faudra être « patient ». Les esprits s’échauffent. Vers 19 h, mon neveu est resté seul au chevet de mon frère. Les secrétions s’accumulent dans la gorge et débordent même sur les lèvres. On croirait entendre un percolateur à puissance maximale. Quatre-vingt-dix minutes se sont écoulées et pas l’ombre d’une infirmière à l’horizon. Mon neveu essaie tant bien que mal de lui nettoyer la bouche. Il aborde une infirmière qui accepte de venir s’occuper de son père… une demi-heure plus tard, mon neveu pose des questions et on lui répond que « ça fait partie du processus ».»
«Mon frère cadet et moi sommes de retour vers 21 h et nous ne pouvons plus supporter que notre frère soit ainsi laissé à lui-même pour vivre ses dernières heures, explique-t-elle. Nous décidons d’engager une infirmière privée pour lui prodiguer les soins nécessaires pendant la nuit, une présence qui n’a guère eu l’air de plaire à l’infirmière de nuit. Vers minuit trente, au moment où nous nous apprêtons à partir, mon frère finit par trépasser.»
Sonia Lavoie termine sa lettre sur un constat poignant. «Non seulement notre système de santé est un gouffre financier sans fond, mais la culture organisationnelle déshumanisée semble systémique et immuable. En définitive, ce sont toujours les bénéficiaires, qui ne bénéficient pas toujours des soins nécessaires, qui doivent être patients, très patients, et soumis. Mais parfois la majorité silencieuse a elle aussi envie de dire que ça suffit.»
Le dossier fait officiellement l’objet d’une plainte à l’hôpital de Verdun.
Comme une enquête a déjà été ouverte dans cette affaire, le Centre de Santé et de Services Sociaux de Verdun n’a pas pu commenter directement.