Pourquoi la plupart des humains ont-ils précisément cinq doigts? C’est une question à laquelle une équipe de chercheurs de l’Institut de recherches cliniques de Montréal a réussi en partie à répondre et dont les résultats sont publiés dans la prestigieuse revue scientifique Nature.
Une séquence régulatrice des gènes présente chez les mammifères et absente chez les poissons serait en cause. Cette découverte est une première mondiale.
Lors de malformation du fœtus chez les humains, il peut toutefois arriver qu’un humain naisse avec un doigt en trop et dans certains cas, ce serait en raison de l’absence de cette séquence.
«Ça nous permet de mieux comprendre les malformations congénitales. Ça pourrait provenir de mutations dans les séquences d’ADN qu’on appelle séquences régulatrices, pendant le développement du fœtus», explique la chercheuse responsable de l’étude, Marie Kmita.
Pour prouver son hypothèse, l’équipe de recherche de Mme Kmita a échangé des séquences régulatrices de poissons avec celles de souris, ce qui a résulté par un sixième, parfois même un septième doigt chez les souris.
La chercheuse indique que cela permet de recréer l’état des premiers animaux à être sortie de l’eau, il y a plusieurs centaines de millions d’années.
«Une séquence régulatrice, c’est comme un interrupteur pour une ampoule, l’ampoule étant le gène. Pour avoir cinq doigts, il y a une séquence qui empêche un gène de s’activer. Cette séquence n’est pas présente chez le poisson, alors le gène s’active. Ce sont les mêmes gènes qui sont impliqués dans la création des rayons des nageoires et de la formation des doigts», explique la titulaire de la Chaire de recherche du Canada en embryologie moléculaire et génétique.
Une découverte en août, par une équipe de l’Université de Chicago, voulant que les gènes Hoxa13 et Hoxd13 sont tous deux responsables de la formation des rayons des nageoires, ainsi que de la formation des doigts, a confirmé les résultats des chercheurs.
«Nous avons fait nos découvertes presque en même temps, mais elles sont complémentaires. Elles permettent de mieux comprendre, dans les deux cas, la formation des membres», continue Mme Kmita.
La recherche, financée par l’Institut de recherche en santé du Canada, aura duré plus de cinq ans.
«Ces résultats nous démontrent encore l’importance de la recherche fondamentale, tant pour en connaître plus sur l’évolution, que pour faire avancer les connaissances pour traiter plusieurs maladies», conclut la chercheuse.