La fréquentation des banques alimentaires a explosé dans la dernière année. Moisson Montréal a été de celles qui ont redoublé d’efforts pour que de nombreuses personnes ayant perdu leur source de revenus aient quelque chose à se mettre sous la dent.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes: dans les onze derniers mois, 106 M$ de nourriture ont été distribués par Moisson Montréal, par rapport à 75 M$ durant la même période l’année précédente.
Seulement au mois de février, l’organisme basé sur le Chemin de la Côte-de-Liesse à Saint-Laurent a remis pour 11,7 M$. Il s’agit d’un record mensuel depuis la création de Moisson Montréal, selon le directeur général, Richard D. Daneau.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué de la crise sanitaire?
Si j’avais un commentaire à faire sur les onze mois de pandémie, j’aimerais faire un commentaire positif. C’est que notre communauté a montré ce qu’elle a de plus beau. Notre communauté a démontré qu’elle était capable de se ramasser, de se saisir et d’aider ceux qui sont moins chanceux. C’est triste ce qui arrive et on pourrait brailler tout l’après-midi. Il y a plein de monde qui a perdu leur job, leur business. Ce n’est pas drôle. La pandémie a fait ressortir le plus beau de ce qu’on a, nos valeurs d’entraide, nos valeurs de collaboration. Ça m’a vraiment touché.
On est des centaines de personnes qui rentrent et qui sortent de Moisson Montréal tous les jours, et on a réussi à n’avoir aucune éclosion. On a réussi à ne pas arrêter une minute.
Comment est-ce qu’on s’assure de garder une cadence aussi importante, tout en comptant sur moins de bénévoles?
S’il y a quelque chose qui m’a frappé, c’est le soutien et l’engagement qu’on a eu de nos bénévoles, de nos donateurs financiers. On a donné 31 M$ de nourriture de plus. Ça nous a pris plus de camions sur la route, plus de chauffeurs, plus de charisme. Il a fallu s’organiser, il a fallu rendre ça possible. Si on n’avait pas eu l’argent pour le faire, on ne l’aurait pas fait.
«On a été chanceux. Rapidement, autant Québec qu’Ottawa ont reconnu la pertinence de soutenir les banques alimentaires.» -Richard D. Daneau
On fait la même chose qu’on fait dans une entreprise privée. On fait de la réingénierie des systèmes, on regarde les processus pour voir comment on peut faire plus avec moins. Pas en travaillant plus vite, mais en travaillant mieux.
Est-ce qu’on prend davantage conscience des disparités de la richesse dans un contexte comme la pandémie?
Je pense que les gens prennent conscience de leur fragilité. Je pense que s’il y a quelque chose qui sort, qui frappe l’imaginaire collectif, c’est quand on voit que nos voisins sont obligés d’aller à la banque alimentaire parce que les deux ont perdu leur job, parce que l’hypothèque est ce qu’elle est, et l’assurance chômage, c’est ce que c’est. Ils n’en viennent pas à bout. Là, tu te dis: «Ça aurait pu arriver à moi». Ce dont on prend conscience, c’est la fragilité de la situation qui est devant nous. La plupart des gens n’ont pas un coussin de six mois, un an devant eux.
Est-ce que des initiatives attendent Moisson Montréal prochainement?
On a construit deux grands congélateurs additionnels parce qu’il y a de plus en plus de bouffe transformée qui arrive congelée et on veut être capable de capter ces dons-là. On est sur le point de finir une unité de transformation qui va nous permettre d’augmenter davantage notre apport en fruits et légumes. Présentement, ça représente 25% de nos dons.
Dans le Guide alimentaire canadien, dans la nouvelle assiette, ils disaient que la moitié devait être des fruits et légumes. Ce qu’on veut faire par exemple, c’est d’être capable de blanchir certains légumes, de les couper et de les surgeler pour étirer leur vie utile. On est en train de finir la construction d’une ligne d’ensachage de produits congelés. D’après moi, d’ici le 31 mars, ça va être fini, et on va pouvoir commencer à opérer ça.