La petite Léa est née le 8 août à Saint-Laurent. Elle représente le renouveau pour ses parents, Maria Aguilian et Zareh Bozoghan qui ont fui la guerre en Syrie. Ils sont arrivés au Québec il y a 10 mois avec leur première fille de 7 ans, Cynthia.
Alors qu’Ottawa vient d’annoncer l’accueil de 10 000 réfugiés Syriens, un signe d’espoir pour tous les compatriotes de la famille Aguilian-Bozoghan, Zareh nous ouvre la porte de son appartement les bras chargés d’un poupon endormi. La petite Léa est née à l’Hôpital Juif de Montréal.
«Ce n’était pas prévu, c’est un accident», souligne sa mère, Maria. Elle s’est rendu compte qu’elle était enceinte quelques semaines à peine après être débarquée en plein hiver à Montréal grâce à l’aide de l’Association Hay Doun, située à Saint-Laurent. «Aujourd’hui, on peut enfin avoir une vie normale», raconte-t-elle.
Si leur fillette les plonge en plein bonheur, la famille Aguilian-Bozoghan a tout de même traîné dans ses valises les souvenirs des années de violence et de danger en Syrie, théâtre de bombardements répétés.
Frôler la mort
À deux reprises, ces réfugiés ont frôlé la mort à Alep, où ils vivaient. En août 2012, alors que le père de 43 ans est au travail, un obus de roquette tombe sur l’immeuble où habite sa famille. Le plafond de la chambre parentale s’effondre à quelques mètres de Cynthia, qui jouait paisiblement.
«Ma fille a vécu un gros choc, elle n’a plus parlé durant deux mois. Nous ne pouvions plus habiter chez nous, alors nous avons été séparés. Mon mari est allé chez ses parents, car ils habitent proche de son travail, et moi et Cynthia sommes allées vivre chez les miens», explique Maria.
Ils ne sont pas au bout de leurs peines. Deux semaines plus tard, Zareh est kidnappé par des terroristes alors qu’il rentre du travail.
«Ils m’ont donné un coup sur la nuque. J’ai perdu connaissance. Lorsque je me suis réveillé, je ne savais pas où j’étais ni ce qui se passait. Ils m’ont gardé caché pendant un mois. Je pensais que j’allais mourir et que je ne reverrais plus jamais ma famille», raconte-t-il, tout en berçant sa fille.
Maria, elle, ne dormait plus. Elle restait près du téléphone. «Ils disaient qu’ils allaient lui couper les doigts, le torturer et ensuite le tuer si jamais on ne payait pas une rançon», se souvient-elle.
Pour le libérer, elle a payé la rançon de 20 000 $US aux ravisseurs.
Nouvelle vie
De retour auprès des siens, sain et sauf, Zareh prend la décision de quitter la Syrie. «Ça devenait beaucoup trop dangereux, on ne pouvait plus y vivre. Nous sommes allés nous réfugier au Liban, chez ma sœur».
La petite famille y restera presque trois ans avant de pouvoir finalement venir au Canada. «Je voulais déjà venir il y a 20 ans, mais c’était très compliqué d’avoir les papiers. J’ai des amis qui vivent déjà ici et puis la situation économique et sociale est plus prospère ici qu’en Europe. Je veux que mes filles grandissent dans un pays libre et en paix», nous dit Zareh.
Mais avant d’atterrir à Montréal-Trudeau, ils ont dû montrer patte blanche.
«Il faut prouver que nous sommes bien Syriens et que nous n’avons pas d’autres nationalités. Ensuite, il faut passer une entrevue, expliquer notre situation et passer un examen médical au consulat», explique Zareh.
Après plus d’un an de traitement administratif entre l’Association Hay Doun qui les parraine et le ministère de l’Immigration du Canada, une nouvelle vie commence pour eux.
Zareh n’a plus qu’un autre souhait, celui de faire venir ses parents, restés seuls en Syrie.
Saint-Laurent est l’arrondissement où vivent le plus de Syriens. En 2011, ils étaient 340 à y élire domicile.