Saint-Léonard

Ligne bleue: la Ville veut des compromis pour sauver le prolongement

Inquiète face à l’explosion des coûts estimés du prolongement de la ligne bleue, la Ville de Montréal souhaite revoir le projet à la baisse afin qu’il soit moins onéreux et plus rentable, selon un document confidentiel obtenu par Radio-Canada.

Le coût prévu du projet aurait fortement augmenté ces dernières années. En 2019, la Ville estimait que le prolongement coûterait 4,5 milliards de dollars. Un an plus tard, c’était plutôt une dépense de 6 milliards qui était anticipée.

Pour réduire la facture, l’administration Plante envisage de retirer le stationnement incitatif souterrain de 1200 places prévus aux Galeries d’Anjou, réduire ou abandonner un terminal d’autobus et diminuer le nombre d’édicules pour les rentabiliser avec des projets immobiliers.

L’abandon du stationnement incitatif sous les Galeries d’Anjou pourrait mener à une trêve dans la bataille judiciaire qui oppose la Société de transport de Montréal (STM) aux propriétaires du centre commercial qui contestent l’expropriation d’une partie de leur terrain. Les Galeries d’Anjou sont la propriété Cadillac Fairview et Ivanhoé Cambridge, le bras immobilier de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), dont la filiale CDPQ-Infra est à l’origine du REM.

«C’était pas la STM qui demandait des stationnements incitatifs, c’était ce qui était demandé dans le mandat initial», argumente Phillipe Schnobb, président de la STM en entrevue à Métro.

Tout comme l’arrondissement de Saint-Léonard, celui d’Anjou déplore que la Ville de Montréal n’associe pas les acteurs locaux à la réalisation du projet.

«La mairesse ne travaille qu’avec sa petite gang. Il faut qu’elle arrête à un moment donné pour travailler avec les gens du milieu», estime Luis Miranda, maire d’Anjou. Il souhaite qu’il y ait au sein du comité de pilotage du projet un représentant d’Anjou et un représentant de Saint-Léonard. Le projet «mal conçu par la STM» coûte beaucoup trop cher et ne répond pas aux intérêts des Angevins, insiste le maire Miranda.

Récemment, l’arrondissement d’Anjou a dévoilé une proposition qui, selon lui, pourrait faire économiser 450 M$ au gouvernement du Québec. Au lieu de tout exproprier aux Galeries d’Anjou, M. Miranda estime qu’il serait mieux de faire des installations souterraines du côté est, en dessous de l’hôtel de ville angevin et en dessous du parc Goncourt.

Réduction voire retrait du terminal d’autobus de la station Pie-IX

Le document obtenu par Radio-Canada indique aussi la possibilité de réduire, voire d’abandonner le terminal d’autobus qui devrait prendre place près de la station Pie-IX pour le relocaliser en bout de ligne à la station Anjou. Et ce, pour ne pas faire doublon avec la future ligne du REM de l’Est, dont le projet a été annoncé en décembre.

Ceci permettrait également de faciliter «le redéveloppement du site occupé actuellement par le centre commercial Le Boulevard», selon la Ville de Montréal. La STM a dû exproprier ce terrain en totalité à la suite d’une décision du tribunal administratif du Québec, alors qu’elle n’avait besoin que de la moitié.

«Le comité est en train d’évaluer la diminution des terminus d’autobus […] mais franchement, c’est pas ce qui est le plus couteux sur le projet. La question est de savoir : est-ce que l’arrivée du REM de l’Est va avoir un impact substantiel sur le besoin d’un terminus de bus ? C’est aussi bête que ça. La question aurait pu se poser même si on avait pas eu de préoccupations sur les coûts du projet», soutient le président de la STM.

«La façon dont la loi est faite sur les expropriations est ridicule. Le fait de devoir exproprier un centre d’achat complet quand vous n’avez besoin que d’un bout de terrain, c’est assez ridicule», fait remarquer François Pépin, président de Trajectoire Québec.

Rentabiliser les édicules

La Ville propose également d’éliminer les édicules secondaires de trois stations. Ces changements inquiètent les élus locaux de Saint-Léonard, arrondissement qui accueillera plusieurs futures stations. «Nous avons besoin d’être informés de ce qui va être fait, car on ne peut pas lancer les travaux de réaménagement de la rue Jean-Talon Est avant ceux de la STM. Si Valérie Plante s’était plus préoccupée de la ligne bleue que de la ligne rose, on n’en serait pas là» dit Dominic Perri, conseiller à la mairie de Saint-Léonard.

Le document indique également vouloir transférer le projet d’édicule de la station Lacordaire sous la responsabilité de CDPQ-Infra afin de créer une connexion entre les deux réseaux. La Ville souhaite réduire les entrées aux métros pour mieux les rentabiliser. Elle évoque de ne créer qu’un seul édicule puis de vendre à des promoteurs le droit de construire sur son toit. Le document estime ces retombées à des dizaines de millions de dollars sur les prochaines années.

Ces changements sur le projet de la ligne bleue surviennent à la suite de l’annonce de l’arrivée du REM de l’Est. À savoir si les deux projets de transport ont été coordonnés en amont, le président de la STM répond qu’au «préalable, c’est la responsabilité de l’ARTM de coordonner tout ça. Nous on prend acte et puis on s’ajuste».

«Pour nous, il est important de respecter le budget de 4,5 milliards de dollars. Ma collègue [Chantal Rouleau] a mis un groupe d’action en place rapidement pour être capable de réaliser ce projet et d’en arriver à respecter le budget mentionné.» – François Bonnardel, ministre des Transports du Québec

«Pour les usagers, la priorité est que les cinq stations voient le jour le plus rapidement possible. La réponse n’est surtout pas de réduire le nombre de stations. Il est essentiel que le prolongement se fasse jusqu’aux galeries d’Anjou.» – François Pépin, président de Trajectoire Québec

Chiffres du projet de prolongement de la ligne bleue

En collaboration avec Frédéric Hountondji

Articles récents du même sujet

Exit mobile version