Les grainothèques ont la mission de préserver le patrimoine génétique des semences mondiales par le libre partage de celles-ci. Celle de la bibliothèque Le Prévost à Villeray a récemment lancé ses activités alors que la saison des semences en est à ses balbutiements.
«Depuis la nuit des temps, la méthode privilégiée de préservation des semences est par la culture et le partage communautaire, explique le responsable du projet, David Robidoux. C’est là que les grainothèques en bibliothèque peuvent remplir un rôle très important au sein de leur communauté.»
En «empruntant» des semences à la Grainothèque, les usagers pourront faire pousser des plantes ancestrales qui, pour plusieurs, sont menacées de disparition par l’industrie agroalimentaire qui concentre sa production dans seulement quelques variétés.
«Les semences ancestrales ont été négligées à un certain moment au profit [d’autres semences] qui ont certaines des qualités esthétiques, mais surtout glycémiques, soutient M. Robidoux. Ç’a été un des grands critères de sélection par les grands semenciers parce que c’est ce qui se vendait le plus.»
Par exemple, on ne retrouve qu’une poignée de variétés de tomates à l’épicerie alors qu’il en existe plusieurs milliers. Idem pour le maïs, légume emblématique de la découverte des Amériques, qui compte des centaines de variétés. «Le maïs est une des semences qui a le plus souffert de la grande mondialisation des semences», indique-t-il.
Le projet est une réponse, à son échelle, à la perte de biodiversité engendrée par l’industrialisation de l’alimentation.
D’ailleurs, les usagers de la Grainothèque pourront profiter de la présence dans la collection du maïs canadien blanc, jadis appelé «maïs à farine». Il s’agit d’une sorte de blé d’Inde que l’on croyait disparu au début des années 1990, mais qui a été sauvé in extremis.
Le catalogue compte une foule de semences rustiques qui proviennent de fournisseurs comme la semencière artisanale Terre Promise située à L’Île-Bizard et l’entreprise paysanne La société des plantes de Kamouraska. Plusieurs graines proviennent aussi de quelques généreux donateurs. Toutes les semences sont adaptées au climat nordique de Montréal.
Comment ça fonctionne
Pour obtenir des graines du melon de Montréal, de la grande absinthe, de la laitue «oreilles du diable» ou encore de l’épinard-fraise, il faut détenir une carte d’abonné valide des bibliothèques de Montréal.
Une fois à la bibliothèque, on vous remet un lot contenant quatre types de semences choisies au hasard parmi la collection. Chacun peut recevoir un maximum de quatre lots par année. Les lots sont soigneusement conçus par l’équipe de bibliothécaires qui s’assure que les semences «empruntées» le soient en fonction du calendrier de culture.
Il est aussi possible de remplir un formulaire de demande personnalisée.
Les utilisateurs sont encouragés à ramener les semences récoltées afin de consolider le catalogue de la Grainothèque pour les années à venir.
Le 17 février, à la veille de l’ouverture, déjà 45 demandes avaient été faites.