Société

Biopsie liquide: une méthode révolutionnaire pour dépister les cancers chez les enfants

Le Dr Janusz Rak dans son laboratoire, au CUSM.

Une nouvelle méthode pour dépister les cancers pédiatriques dans le sang ou l’urine – la biopsie liquide – a été mise au point par une équipe de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM).

Fruit d’une quinzaine d’années de recherche, la biopsie liquide consiste à intercepter et analyser les informations qu’émettent les tumeurs cancéreuses solides dans les liquides corporels à l’aide de technologies avancées, a expliqué jeudi en conférence de presse le Dr Janusz Rak, qui dirige la recherche.

La méthode est «pratiquement indolore et sans risque», assure-t-il.

On peut espionner le cancer en observant les biofluides comme le sang, dans lesquels les cancers libèrent des substances. Les cancers nous parlent.

Le Dr Janusz Rak, scientifique principal au sein du Programme en santé de l’enfant et en développement humain de l’IR-CUSM

Suivre le cancer en temps réel

À terme, les biopsies liquides pourraient venir remplacer les biopsies chirurgicales afin de diagnostiquer les tumeurs cancéreuses. Les biopsies chirurgicales sont beaucoup plus invasives, puisque l’on prélève une quantité variable de tissus organiques. Elles peuvent aussi être risquées dans certains cas, notamment pour les tumeurs cérébrales.

Cependant, la priorité immédiate n’est pas d’utiliser la biopsie liquide pour le dépistage initial d’un cancer, mais plutôt pour suivre efficacement son évolution en temps réel, affirme l’oncologue et chercheuse au sein de l’équipe de l’IR-CUSM, la Dre Nada Jabado.

En effet, les biopsies traditionnelles permettent d’obtenir des données plus statiques, qui entraînent un certain décalage. De leur côté, les biopsies liquides peuvent être effectuées plus fréquemment. Elles permettent donc de déterminer avec exactitude l’évolution de la maladie.

«À court terme, ça nous permettra d’avoir un indicateur d’efficacité ou de résistance à nos traitements», précise l’oncologue. Il sera donc possible d’ajuster ou de changer un traitement inefficace beaucoup plus rapidement.

La biopsie liquide pourrait éventuellement s’appliquer à toutes formes de cancers, et même certaines maladies chroniques, ajoute-t-elle.

La biopsie liquide ne compte aucun usage clinique approuvé pour l’instant. La Dre Jabado, qui se dit «impatiente», espère que son équipe aura accumulé assez de données d’ici deux ans pour lancer un essai clinique.

De nombreuses études ont démontré l’efficacité des biopsies liquides dans le diagnostic et le traitement de tumeurs solides chez les adultes. Toutefois, les études chez les enfants – chez qui les cancers se développent et évoluent très différemment – se font beaucoup plus rares.

La Dre Nada Jabado, oncologue et chercheuse au CUSM. Photo: Nicolas Monet, Métro

Capturer les «exosomes»

Les liquides corporels comme le sang et l’urine contiennent des petites bulles évacuées par les tumeurs cancéreuses, appelées exosomes. Ce sont eux que la biopsie liquide vise à analyser.

«Il y en a des milliards dans le sang et ils sont le reflet de la maladie. Ce sont les empreintes digitales de la maladie», résume le Dr Rak.

Ainsi, les exosomes peuvent révéler «le type de cancer qui se cache dans l’organisme, le type de cellules malignes que contient la tumeur et, éventuellement, la manière de les attaquer par un traitement», mentionne le CUSM, par voie de communiqué.

Un exosome étant des milliers de fois plus petit qu’un cheveu humain et ne pouvant être observé au microscope, seuls des progrès technologiques récents ont permis de les capturer et de les étudier.

Par ailleurs, l’équipe du Dr Rak bénéficiera de dons de la Fondation Charles-Bruneau et de la Fondation CIBC pour poursuivre sa recherche. Elles ont respectivement offert 5 M$ et 1 M$.

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