Les Québécois sont abonnés à plus de services de diffusion en continu depuis le début de la pandémie, selon le Portrait numérique des foyers québécois de l’Académie de la transformation numérique (ATN). Cela pourrait avoir un impact négatif sur la consommation du contenu québécois si la tendance venait à se maintenir après la crise sanitaire.
L’enquête révèle que 63% des répondants ont augmenté leur temps d’écran en 2020 par rapport à l’année précédente. Malgré tout, le nombre d’abonnements à un service de télévision continue de diminuer.
Quelque 72% des foyers sont abonnés au câble, soit 5% de moins que l’an dernier. Ces chiffres ne surprennent pas le professeur émérite au département de communication de l’Université de Montréal, André H. Caron.
«C’est une tendance qu’on remarque depuis plusieurs années et qui a été entamée par les 18-34 ans, qui voient l’internet comme un tout-en-un, explique-t-il. Le câble tel qu’on le connaît aujourd’hui sera amené à s’adapter.»
Les services de diffusion de séries ou de films en continu sont quant à eux en explosion de popularité chez les Québécois. Quelque 70% payaient pour au moins un abonnement l’an dernier, soit 13% de plus qu’en 2019.
Netflix est le plus utilisé avec un taux d’adoption de 52%, loin devant Amazon Prime Vidéo à 19%. Ces services offrent plus de flexibilité aux usagers. «Ils n’ont pas à payer pour un forfait de chaînes qui en comprend plusieurs qu’ils n’ont pas besoin», continue-t-il.
Contenu québécois
Les plateformes en ligne payante québécoise n’ont pas autant profité de l’augmentation d’adoption engendrée par la pandémie. Le taux d’abonnement au Club illico demeure stable à 18%, alors que la formule payante d’ICI Tou.tv augmente de cinq points pour s’établir à 9%.
Les services de diffusion en continu américains comme Netflix, Prime Vidéo et Disney Plus ont tous augmenté de plus de 10% l’an dernier. Cette accélération de leur adoption serait inquiétante pour l’avenir des contenus créés dans la Belle province.
«C’est un réel danger, car il suffit qu’ils enlignent quelques séries à grand déploiement – que les diffuseurs d’ici ne peuvent se permettre – et ils (les services américains) risquent de fidéliser l’auditoire québécois, avance le professeur en communication. On aurait alors un glissement de consommation de contenu vers l’étranger qui serait important.»
Il craint que cette transition soit déjà bien entamée. «Tous les éléments sont en place pour qu’il y ait quelque chose qui se passe», affirme-t-il.
Futur
Il est cependant trop tôt pour affirmer que les tendances observées dans le rapport se maintiendront une fois la pandémie terminée. Le fait que les gens étaient limités dans leurs activités pourrait fausser les données.
«En recherche on remarque un nouveau facteur avec la pandémie, soit celui de l’immobilité, explique M. Caron. Les gens ont fait ce qu’ils ont pu pour se déplacer, mais virtuellement.»
Il est d’avis qu’une diminution du temps d’écran est à prévoir. «Il y aura probablement une baisse d’utilisation d’écrans puis une stabilisation, continue-t-il. Il y a une partie de ce que les gens font présentement qui va rester, mais une autre qui va revenir à la normale.»
L’impact de la pandémie sur la consommation numérique sera donc mieux saisi dans les prochaines années.
Méthodologie
L’enquête Portrait numérique des foyers québécois se base sur une collecte de donnée réalisée entre le 7 et le 31 octobre 2020 auprès de 1600 adultes québécois de 18 ans et plus rejoints par internet et par téléphone.
La marge d’erreur maximale se situe à plus ou moins 2,5%, 19 fois sur 20.