CHRONIQUE – Je suis la fille d’immigrés. Mes parents grecs sont venus au Québec et ont construit leur vie ici sans aucune connaissance préalable du français ou de l’anglais. Avez-vous déjà entendu l’expression anglaise «winging it»? Mes parents en faisaient beaucoup au début. «Winging it» signifie essentiellement comprendre comment les choses fonctionnent au fur et à mesure.
Les immigrants en font beaucoup de ça. Plus que vous le croyez. Apprendre une nouvelle langue tout en essayant de naviguer dans une nouvelle vie est un formidable challenge.
Et non, ce n’est pas comme voyager à Cayo Coco ou faire une croisière de 10 jours sur le Nil avec un dictionnaire français-arabe à la main. Lorsque vous êtes un touriste, les gens veulent votre argent et s’adapteront à vous et à votre incapacité à parler leur langue. They’re paid to be nice to you. Ils trouvent vos tentatives de commander «una cerveza, por favor» ou de demander «dónde está el baño?» très charmants.
Lorsque vous êtes un nouvel immigrant (ou pire encore, un réfugié), pour la plupart des gens, vous êtes une nuisance. Someone who hasn’t yet « earned their keep ». Quelqu’un qui n’a pas encore gagné le droit d’appartenir au système dont il fait maintenant partie et d’en bénéficier.
Bienvenue au Québec, έχετε έξι μήνες για να μάθετε γαλλικά *
Demander comment se rendre à une station de métro peut vous valoir un chialage de la part de l’employé de la STM (they barely smile even when you do speak French) ou un petit mot impatient d’un client qui présume immédiatement que vous choisissez de ne pas parler français lorsque vous livrez leur Amazon package. Au lieu de vous donner peut-être le bénéfice du doute et de réaliser que vous venez d’atterrir à Montréal il y a quelques mois. Mais encore faut-il gagner ta vie, non? Même quand tu ne parles pas français encore.
Émigrer signifie que tout dans votre monde devient nouveau, étranger, inconnu. Dans de nombreux cas, une nouvelle langue, une nouvelle ville, une nouvelle façon de faire les choses, de nouvelles références et une nouvelle façon de tout naviguer. C’est effrayant, déroutant, solitaire, stimulant et souvent décourageant au début.
L’une des plus belles lignes que j’ai jamais lues en français est un poème d’ Edmond Haraucourt sur les pertes que nous subissons lorsque nous partons. Quitter quelqu’un, quitter un lieu…
Partir, c’est mourir un peu,/C’est mourir à ce qu’on aime:/On laisse un peu de soi-même/En toute heure et dans tout lieu.
Bienvenue au Québec, у вас є шість місяців, щоб вивчити французьку *
La partie probablement la plus offensante de loi 96 est qu’il fait tout son possible pour rendre encore plus difficile ce qui est déjà un processus très difficile. S’attendre à ce que les nouveaux immigrants (et pire encore, les réfugiés, qui subissent déjà des traumatismes et des pertes incomparables) se comportent en français dans les six mois est non seulement totalement irréaliste, mais carrément inhumain et contre-productif.
Même les experts sont d’accord. Même si le gouvernement préférerait que vous ne le sachiez pas. Une étude commandée par le ministère de l’Immigration a été présentée un mois avant que le gouvernement ne dépose le loi 96. Mais elle n’a jamais été rendue publique. Probablement parce qu’il a conclu que les nouveaux arrivants ont besoin de plus de six mois pour apprendre une langue.
Pourquoi le gouvernement a-t-il commandé une étude à des experts, puis voté un projet de loi qui va à l’encontre de leurs recommandations? C’est absurde. But most of all, it’s cruel.
Les nouveaux arrivants ont besoin de temps pour s’adapter et apprendre.
Bienvenue au Québec, ਤੁਹਾਡੇ ਕੋਲ ਫ੍ਰੈਂਚ ਸਿੱਖਣ ਲਈ ਛੇ ਮਹੀਨੇ ਹਨ *
«Mais personne ne leur demande de maîtriser parfaitement le français!», disent ceux qui soutiennent cette loi.
Ok, so let’s flip this script and let’s get real for a moment.
Donc vous seriez parfaitement à l’aise pour négocier un bail ou l’achat d’une maison, signer un contrat légal et contraignant, poser des questions à un employé de Régie de l’assurance maladie ou du ministère du Travail, discuter des progrès de votre enfant ou des difficultés d’apprentissage à l’école entièrement dans une langue que vous venez de commencer à apprendre à peine il y a quelques mois?
Parce que c’est exactement ce que nous demandons à ces gens de faire.
If you say yes, you’re smarter than I am. Or you’re just not being honest.
Le but est-il de réussir l’intégration des nouveaux arrivants et de les motiver à acquérir et à aimer le français ou est-ce de les pénaliser pour ne pas le parler avant leur arrivée ici?
*** Grec, ukrainien, pendjabi
*Toula Drimonis est auteure et rédige des chroniques pour divers médias anglophones. Métro l’a contactée pour une série de textes sur le point de vue anglophone du débat sur la loi 96. Voici le troisième de cinq textes.