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La marijuana sera légale à 18 ans d'ici l'été 2018

Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — Le nuage de confusion qui planait autour des intentions du gouvernement fédéral sur la légalisation du cannabis vient de se dissiper partiellement. Le gouvernement Trudeau sort la carotte et le bâton, car s’il légalise la substance pour les adultes, en permettant d’en cultiver à domicile et d’en posséder jusqu’à 30 grammes, il instaure du même souffle de nouvelles peines sévères pour protéger les mineurs et pour décourager la conduite avec facultés affaiblies par la drogue.

Voici quelques points saillants des deux projets de loi qui ont été déposés jeudi à Ottawa.

Âge minimal, culture et possession

Comme on s’y attendait, le fédéral fixe l’âge minimal national pour l’achat de marijuana à 18 ans, selon la province ou le territoire. Le projet de loi C-45 propose par ailleurs de permettre la culture d’un maximum de quatre plants ne dépassant pas 100 cm par foyer et de limiter à 30 grammes la possession personnelle de cannabis pour usage récréatif en public.

Rien n’empêche les provinces qui ne sont pas chaudes à l’idée de légaliser le pot récréatif de hausser considérablement l’âge minimum ou de limiter la possession de façon très restrictive. Le projet de loi est «permissif» en ce sens, a souligné en conférence de presse la ministre fédérale de la Justice, Jody Wilson-Raybould. Cependant, une administration qui déciderait d’emprunter cette voie s’exposerait à des contestations judiciaires, a-t-elle prévenu.

Pot séché, huile de cannabis et brownies… fait maison

Il sera légal d’acheter du cannabis frais et séché, de l’huile de cannabis ainsi que des graines et des semis de cannabis. Les brownies, biscuits ou autres mets préparés avec de la marijuana devront être cuisinés à domicile — à tout le moins, pour l’instant. Les points de vente régis par l’État «pourraient» en offrir plus tard «quand leur production et leur vente seront encadrées par une réglementation fédérale en vigueur», précise un document d’information gouvernemental.

Production et distribution

Le gouvernement fédéral serait responsable de la délivrance de permis pour la production de cannabis. Il reviendra toutefois aux provinces et territoires de contrôler la vente de la substance sur leur territoire. Dans les juridictions où la vente au détail ne serait pas organisée, les Canadiens pourraient acheter le produit en ligne, auprès d’un producteur autorisé par Ottawa. Le cannabis leur serait alors envoyé de manière sécuritaire par la poste ou par messagerie.

Protection des mineurs

Pour s’assurer que la marijuana ne se retrouve pas facilement entre les mains des enfants, le gouvernement Trudeau propose deux nouvelles infractions criminelles qui sont assorties de peines très sévères. Donner ou vendre du cannabis à un jeune et exploiter un mineur pour en faire le trafic seraient des actes passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à 14 ans d’emprisonnement.

Ottawa entend interdire également d’offrir des produits attrayants pour les jeunes, d’offrir les produits dans des paquets qui seraient attrayants pour les jeunes, de vendre la marijuana dans des machines distributrices et de faire de la publicité pour le cannabis, à moins que cette publicité soit tout à fait inaccessible aux jeunes.

Conduite avec facultés affaiblies

Trois nouvelles infractions feraient leur apparition pour dissuader ceux qui ont consommé de la marijuana de prendre le volant ensuite. Le gouvernement souhaite faire adopter par règlement des limites légales de tétrahydrocannabinol (THC) dans le sang. Il veut doter les policiers d’appareils de détection salivaire et leur donner l’autorisation de demander à un conducteur qu’il fournisse un échantillon de salive s’ils ont un doute raisonnable de croire que ce dernier a consommé de la drogue. Un échantillon sanguin peut suivre en cas de résultat positif au test salivaire.

Combien ça coûte?

Le projet de loi ne précise pas combien il faudra débourser pour se procurer de la marijuana dans les points de vente autorisés. Et le principal responsable du dossier de la légalisation, Bill Blair, n’a pas voulu préciser jeudi si la taxe sur les produits et services (TPS) s’appliquerait sur les produits du cannabis. Il a seulement rappelé qu’il fallait établir un délicat équilibre. Un prix trop élevé renverrait les consommateurs vers le marché noir, a rappelé jeudi le député et ancien chef de police.

Admettre avoir fumé à la frontière

Par le passé, des Canadiens se sont vu interdire l’entrée aux États-Unis après avoir admis à un agent frontalier américain avoir fumé du cannabis. En 2018, ils avoueront donc qu’ils ont posé un geste tout à fait légal. Le gouvernement a-t-il obtenu des assurances de Washington que cela ne sera pas une raison d’être refoulé à la frontière? Apparemment, non.

«S’il se développe un ‘pattern’ de contrôle à la frontière (…) alors évidemment, c’est le genre de chose que nous soulèverions (…) pour nous assurer que les gens soient traités de manière appropriée», a indiqué le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale.

Mais ceci dit, «personne ne devrait mentir à la frontière», a-t-il lâché en réponse à une suggestion formulée par une journaliste en conférence de presse.

Objectif: juillet 2018

Ottawa veut faire adopter ses projets de loi d’ici juillet 2018. Il y aura donc beaucoup de pain sur la planche, et pas seulement au fédéral — les provinces devront décider de nombreuses modalités, dont la taxation, le déploiement de points de vente, les balises pour la consommation en public.

Aux Communes, le projet de loi sur la légalisation passera vraisemblablement comme une lettre à la poste — les libéraux y disposent d’une très confortable majorité, et les élus de la formation devront suivre la ligne de parti au moment de voter, a signalé le whip du gouvernement, Pablo Rodriguez.

C’est au Sénat que les choses pourraient aller moins rondement.

La chambre haute est composée d’une majorité d’indépendants, mais aussi et surtout, d’un caucus conservateur qui a récemment fait usage de toutes sortes de tactiques procédurales pour bloquer des projets de loi libéraux qui déplaisent à ses membres.

Mais si tout se passe comme le gouvernement Trudeau l’espère, le Canada deviendra à l’été 2018 le seul pays du G7 où la marijuana sera légale.

Ils ont dit…

«Si votre objectif est d’assurer la sécurité et la santé publiques, de garder le cannabis hors de la portée des enfants et d’endiguer le flux de profits du crime organisé, alors la loi telle qu’elle est aujourd’hui a été un échec lamentable.»

— Ralph Goodale, ministre de la Sécurité publique

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«Je crois que nous avons l’obligation de nous attaquer aux lacunes du régime actuel le plus rapidement possible, alors nous ne pouvons nous traîner les pieds. (…) Nous croyons que la fin juin 2018 est un échéancier raisonnable.»

— Bill Blair, secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice

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«Ce projet de loi prévoit aussi une réforme significative pour la conduite en état d’ébriété, incluant la détection obligatoire de l’alcool, afin de nous assurer que les conducteurs dont le taux d’alcoolémie dépasse la limite légale seront plus facilement épinglés.»

— Jody Wilson-Raybould, ministre de la Justice

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