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L’électrique et éclectique avenue Bernard vue par le magazine Flaneur

Photo: Yves Provencher/Métro

Créé par de jeunes Allemands amoureux de l’imprimé, le magazine-œuvre d’art Flaneur consacre chacun de ses numéros à une rue en particulier dans le monde. Pour sa troisième édition, l’équipe a exploré la montréalaise avenue Bernard. Découverte.

Assis à une table du Nouveau Palais, la spontanée fondatrice Ricarda Messner, le poétique journaliste Fabian Saul et la discrète rédactrice Grashina Gabelmann dévorent des frites en se souvenant du temps qu’ils ont passé, l’hiver dernier, à découvrir l’avenue Bernard.

Pendant deux mois, ces jeunes Berlinois ont fouillé les recoins des lieux cultes du Mile-End, prenant le pouls de l’ambiance et interviewant des habitants clés du quartier (Tammy-la-fleuriste, Yves-le-barbier). Aujourd’hui, ils s’émerveillent de l’été qui s’est installé. «Il y a des feuilles et des trucs verts! Quand on réalisait nos reportages, c’était… C’était comme ça! Comme cette image! s’exclame Ricarda en feuilletant dans le magazine et en tombant sur une photo de voiture ensevelie sous des montagnes de neige. Vous vous en souvenez?»

Oui! Sur la couverture de votre magazine, aux couleurs très vives, vous mentionnez d’ailleurs le froid, la météo, le blanc (de la neige), le gris (de la sloche). Vous souhaitiez d’emblée instaurer ce contraste?
Fabian Saul: On a fait de notre mieux pour que ce soit aussi une édition d’été. Pour capturer les deux côtés de Montréal.

En introduction à un des articles, qui traite des «identités hybrides» des habitants montréalais, vous écrivez: «La seule façon d’être réellement Canadien, c’est de ne pas être Canadien.» À quel point vous sentez-vous Canadiens, vous qui ne l’êtes pas?
Ricarda Messner: On se sent un peu comme à la maison. C’est vrai! Quand on n’est pas d’ici, on se sent d’ici.
F.S.: C’était intéressant pour nous de réfléchir à nos propres identités à travers toutes celles qui cohabitent sur la rue Bernard. Je crois que c’est la raison pour laquelle c’est devenu un thème aussi fort à travers le magazine. C’est une chose à laquelle tous les collaborateurs avec lesquels nous avons travaillé ont réfléchi. Josip Novakovich, David Homel… ils se sont tous penchés là-dessus.

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Vous aviez dédié le numéro d’hiver, paru avant celui-ci, à la rue Georg-Schwartz-Strasse, à Leipzig. Vous ouvriez l’édition par une pensée: «On s’intéresse uniquement aux endroits qui risquent de disparaître.» Suivant cette idée, êtes-vous inquiets pour l’avenir de l’avenue Bernard?
F.S. : Je pense qu’on commence toujours à s’intéresser à une chose quand il y a un risque de la voir se dissoudre. Sa valeur est liée au risque de disparition, non?
R. M. : C’est comme si, en regardant la vie sur cette rue, on regardait notre propre vie. On était ici l’hiver dernier et, déjà, l’avenue a changé. Notre vie était différente. Aujourd’hui, on regarde notre passé.

Vous prévenez le lecteur que le portrait que vous offrez de l’avenue en est un subjectif. Vous écrivez: «Ceci pourrait être la rue Bernard». Est-ce aussi la rue Bernard telle que vous aimeriez qu’elle soit?
F.S.: Je ne pense pas que l’on impose quoi que ce soit à la rue. Notre portrait est subjectif parce qu’il est né d’une approche fragmentée. Vous pourriez vous rendre sur Bernard n’importe quand et raconter une histoire complètement différente de la nôtre. Et elle serait aussi vraie (ou aussi fausse) que notre version!

***
Danse de rue
On trouve de tout dans Flaneur: des portraits, des éditos, des récits de fiction, une bédé sur le roller derby… Le magazine, rédigé en anglais, est à la fois tendre, romancé, politique, rigolo, design.

Pour le troisième numéro, dédié à l’avenue Bernard, l’équipe allemande a travaillé avec plusieurs collaborateurs locaux, dont le chorégraphe montréalais Fred Gravel.

Dans une série de photos prises par Stéphane Najman, on voit les danseurs de la compagnie Grouped’ArtGravelArtGroup captés dans divers lieux du Mile-End. Est-ce parce que, pour les créateurs de Flaneur, la vie sur une rue est similaire à une danse? Peut-être. «La plupart du temps, les choses fonctionnent magnifiquement bien. Et puis, il y a les imprévus et les trucs qui n’ont aucun sens, observe le journaliste Fabian Saul. C’est d’ailleurs en ça que consiste la danse, non? Trouver ce moment où tout fonctionne parfaitement bien.»


Flaneur -Fragments of a Street
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