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Florian Habicht filme Pulp (et les gens ordinaires)

Photo: collaboration spéciale

Avec Pulp: A Film about Life, Death & Supermarkets, le réalisateur néo-zélandais Florian Habicht propose une incursion dans l’univers du célèbre groupe britannique mené par l’inégalable parolier et chanteur Jarvis Cocker. Évitant la formule du docu musical classique (naissance, gloire, déchéance), Habicht parle de Pulp au moyen d’entrevues avec ses membres, certes, mais surtout avec des habitants de Sheffield, ville d’origine de la formation.

Une des citations les plus mémorables de Pulp est celle imprimée sur [l’album de 1995] Different Class: «On ne veut pas de soucis, on réclame simplement le droit d’être différents. C’est tout.» (We don’t want no trouble, we just want the right to be different. That’s all.) Est-ce un plaidoyer que vous appliqueriez également à votre film?
Absolument! On aurait dû mettre ça sur l’affiche!

Vous avez tourné en décembre, pendant les jours précédant le concert d’adieu de Pulp et pendant le concert d’adieu lui-même [qui s’est déroulé le 8 décembre 2012]. On voit d’ailleurs énormément de décorations de Noël à l’écran. Trouviez-vous que cela ajoutait un côté «glam» à votre film?
Hmm… J’ai toujours aimé avoir un peu de Noël dans mes films. C’est toujours un cadeau du ciel quand je tourne autour du 25 décembre! D’ailleurs, une de mes chansons préférées dans ce documentaire, c’est le Jingle Bells qu’on entend au marché quand les deux dames âgées papotent au sujet de Pulp. J’aime vraiment cette version! (Rires) Saviez-vous qu’il n’y a pas de droit d’auteur sur Jingle Bells? Tandis que I’m Dreaming of a White Christmas est une chanson très dispendieuse à avoir dans un film. Vous ne l’entendrez probablement pas souvent.

Sur la célèbre chanson Dishes, Jarvis Cocker chante: «Je ne suis pas Jésus, même si j’ai les mêmes initiales» (I am no Jesus, though I have the same initials). Même s’il dit qu’il n’est pas Dieu, sentiez-vous qu’à Sheffied, pour certaines personnes, il l’était?
Oui! Et pas seulement à Sheffield! En Amérique du Sud, par exemple, beaucoup de gens ont une image de Jarvis en guise de photo de profil Facebook. Cela dit, Dishes est ma pièce préférée de Pulp. Si j’avais à dresser une liste des chansons qui joueront à mes funérailles – lesquelles, avec un peu de chance, seront célébrées dans longtemps –, Dishes en ferait partie.

Avec Jingle Bells?
Non! Pas de Jingle Bells! (Rires) Ah! Lorsque le père Noël viendra…!

Votre film parle bien sûr de vie, de mort et de supermarchés [clin d’œil au tube Common People, où Jarvis rencontre une fille dans les allées d’un, oui, supermarché]. Mais vous y parlez aussi de célébrité. Jarvis dit d’ailleurs à l’écran: «La célébrité ne m’a jamais convenu. C’est comme une allergie aux noix.» Vous rencontrez également des jeunes faisant partie d’une troupe de danse, et à la question : «Voulez-vous être célèbres?», ils répondent : «Bah… pas trop». Quel est votre propre rapport à la gloire?
Hmm. C’est bizarre. En tant qu’artiste, j’aime l’idée que beaucoup de gens voient mes films. Et je ne suis pas assez connu pour que cela devienne un problème. Je porte souvent des pantalons roses afin que les gens me reconnaissent dans la rue, en Nouvelle-Zélande. (Rires) Mais je peux comprendre qu’on ne veuille pas voir sa vie privée exposée. J’imagine que, comme toute chose, la célébrité a de bons et de mauvais côtés.

Pulp Florian Habicht (gauche)Et on imagine aussi que tourner un documentaire sur Pulp était l’occasion parfaite d’explorer ce thème. Parce que le groupe a toujours eu une relation étrange avec la célébrité. Il a toujours été à la frontière entre le super connu et la reconnaissance discrète.
C’est vrai. Et ça a pris tellement de temps avant qu’il se fasse remarquer! Récemment, j’étais au festival du film de Helsinki avec Nick Banks, le batteur [de Pulp], et quelqu’un a demandé quand et comment le groupe avait traversé dans la sphère du «grand public». Nick a répondu quelque chose que j’ai trouvé intéressant. Et drôle! Il n’a pas dit que c’était à cause de Common People, ou blablabla. Il a plutôt dit que c’était lorsque Jarvis avait commencé à porter des verres de contact plutôt que des lunettes. C’est alors que, soudain, les médias ont fait «Oooooh, mais c’est qui, ça?!» et que le band est devenu connu. (Rires) Je peux comprendre: moi-même, je me suis récemment fait pousser la barbe.

Ah! Est-ce que ça porte ses fruits? Ça fonctionne mieux que les pantalons roses?
C’est INCROYABLE! J’attire le regard des demoiselles maintenant! C’est GÉNIAL! En réalité, je n’ai pas encore porté les pantalons roses avec la barbe. Je dois essayer ça!

«J’adore entrer dans la tête des autres, filmer dans les rues. Dans mon précédent docu, Love Story, j’accostais des New-Yorkais pour leur demander des conseils amoureux. C’est mon style. Et ça me semblait très approprié pour présenter le monde de Pulp. Braquer les projecteurs autant sur les vraies gens, les fans et Sheffield que sur le groupe.» – Florian Habicht

Beaucoup de gens connaissent Pulp en raison de la chanson Common People. Sentez-vous que le groupe a une relation d’amour-haine avec ce succès? Est-ce que Common People est son Smells Like Teen Spirit?
Je pense, oui… En fait, au départ, on voulait appeler le film Common People. Mais la bande a refusé. Catégoriquement! (Rires)

Dans votre documentaire, on entend des extraits de plusieurs pièces: Razzmatazz, Underwear, Something Changed… mais vous laissez This Is Hardcore presque dans son entièreté. Est-ce parce que vous considérez cette chanson comme une pièce maîtresse de la discographie de Pulp?
Oui! Je trouve aussi qu’on a fait un bon boulot en la filmant.

Lorsque vous allez au supermarché maintenant, vous pensez à Jarvis et cie?
Non! Je vais au supermarché depuis que je suis enfant. (Rires) Cela dit, si jamais une de leurs chansons jouait dans les allées, alors là, oui, je penserais à eux.

Pulp: A Film About Life, Death & Supermarkets
Au Centre Phi samedi 9 mai à 19 h 30

N.B.: Cette entrevue a été réalisée et publiée dans le cadre de la présentation du film aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM) les 15 et 22 novembre.

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