Le comité de logement BAILS tiendra ce samedi une manifestation devant les bureaux de vente d’OSHA Condos, ce nouveau développement immobilier qui doit ouvrir ses portes le même jour, afin de dénoncer «les conséquences désastreuses» qu’aura le projet dans le secteur.
«Hausse [du prix] des loyers, reprise de logement, venue de commerces de luxe ou fermeture de maisons de chambre; on pense que les impacts de ces 200 condos-là vont être très problématiques», explique à Métro l’organisatrice communautaire au comité BAILS, Émilie Trépy-Lecavalier.
Le rassemblement de samedi, prévu à 13h, laissera selon elle la parole «à plusieurs groupes de quartier qui s’opposent, comme nous, au promoteur». «Notre intention, c’est vraiment de bloquer le projet. On ne veut pas qu’il n’aille lieu», tranche Mme Trépy-Lecavalier.
D’après l’organisatrice communautaire, «il faut comprendre qu’Hochelaga-Maisonneuve a eu son lot de condos». La porte-parole souligne que le terrain choisi par le promoteur – au coin des rues Sainte-Catherine Est et Nicolet – se trouve «là où il y a le plus de personnes à faible revenu».
Le militant au comité BAILS, Jean-Pierre East, abonde dans le même sens. Le secteur sud-ouest de l’arrondissement «regroupe majoritairement des personnes vivant en situation de pauvreté», déplore-t-il. «Dans l’éventualité très tangible où le prix des loyers environnants augmenterait à la suite de la construction de ces condos, plusieurs personnes seront forcées de quitter le quartier», craint-il.
L’organisme plaide que «plusieurs centaines de ménages sont présentement en attente de logements sociaux dans le quartier».
«Le terrain du promoteur serait idéal pour accueillir du logement social, des espaces communautaires ou un parc. On parle d’un terrain assez grand qui pourrait vraiment servir les résidants.» – Émilie Trépy-Lecavalier.
Pour Mme Trépy-Lecavalier, «la supposée mixité sociale» que le promoteur tente de faire miroiter dans sa stratégie d’inclusion est «très hypocrite». «On nous parle d’une trentaine de logements sociaux. Pour nous, ce sont des miettes. […] Cette attitude-là ne sert qu’à justifier l’arrivée de personnes nanties, au détriment de personnes à faible revenu», lance-t-elle.
D’après les données du comité BAILS, la durée d’attente pour avoir accès à une habitation à loyer modéré (HLM) dans Hochelaga «est généralement de 7 à 10 ans», d’autant plus que le quartier «constitue l’un des derniers refuges pour les personnes utilisatrices de drogue et les travailleuses du sexe».
La vision du promoteur
Joint par Métro, le porte-parole d’OSHA Condos, Hugo Deschênes, assure que «la réponse du quartier à notre venue est très positive en général, le comité BAILS faisant exception». Il dit avoir tenu plusieurs rencontres pour «valider que notre offre correspondait aux attentes» de la communauté.
D’après lui, la clientèle acheteuse «provient en très grande majorité du quartier immédiat». «Nous avons planifié, suite aux rencontres, plus d’unités de 3 et 4 chambres dans les nouveaux blocs afin de répondre à la demande pour des unités abordables à vocation familiale», plaide le responsable. OSHA Condos dit vouloir espérer que le prix des logements libérés par les familles qui joindront ses nouveaux logements «suivent les règles d’augmentation du prix des loyers gérée par la Régie du logement», pour que le quartier puisse accueillir de nouveaux résidents.
Le promoteur dit aussi collaborer avec l’organisme Bâtir son quartier «pour la construction de logements communautaires» dans le projet. La livraison de celui-ci est prévue pour l’automne prochain, puis les espaces communautaires s’ajouteront en 2021.
OSHA Condos n’en est pas à sa première confrontation dans l’espace public depuis le lancement de son projet immobilier. À la fin janvier, plusieurs résidants s’étaient indignés d’une publicité du promoteur, dont le parallèle entre la symbolique des peuples autochtones et le projet de construction lui-même avait été fortement critiqué.
«Hochelaga. Osha AGA. Remarquable habitat», lisait-on sur ladite affiche promotionnelle dans le secteur. Le promoteur avait dit avoir choisi ces termes pour leur «signification historique». D’après l’entreprise, le nom «Hochelaga» serait un dérivé des termes Osha et Aga, «qui auraient été donnés par les autochtones à Jacques Cartier et à son équipage à leur arrivée». Une vision à laquelle plusieurs résidants s’étaient opposés. Ayant d’abord tenté de se défendre, le promoteur avait finalement choisi de retirer sa publicité, devant une opposition grandissante.