Deux nouvelles études font état d’une forte proportion de cas asymptomatiques parmi des milliers de personnes ayant reçu un diagnostic positif au coronavirus dans deux pays d’Europe. Des experts pressent le gouvernement Legault d’améliorer sa stratégie de dépistage.
Dans le cadre d’une récente étude disponible sur le site de l’Université Cornell, plus de 15 chercheurs italiens et américains ont analysé les données de 5484 personnes ayant fait l’objet d’un traçage numérique en Lombardie, une région de l’Italie. De ce nombre, 2824 ont reçu un diagnostic positif au coronavirus. Parmi ces individus, seulement 31% ont développé des symptômes typiques du coronavirus.
Le pourcentage de personnes atteints du coronavirus qui sont asymptomatiques est d’ailleurs plus élevé auprès des personnes de moins de 60 ans. Ainsi, près de 74% des personnes infectées au coronavirus dans cette catégorie n’avaient pas développé de symptômes typiques du coronavirus, comme de la fièvre et des problèmes respiratoires.
«Les jeunes, ils se tiennent ensemble, ils s’infectent. Peut-être que la majorité d’entre eux n’auront pas de symptômes graves, mais peut-être qu’eux côtoient des personnes plus à risque qui sont plus âgés», soulève à Métro le professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Denis Archambault.
Personnes âgées plus à risque
La possibilité de développer des symptômes grimpe toutefois avec l’âge. Selon cette étude, qui n’a pas encore été révisée par les pairs, près de 65% des personnes atteintes du coronavirus de 80 ans et plus développent des symptômes, contre 18,1% pour celles de moins de 20 ans. Les personnes âgées courent aussi beaucoup plus de risques de devoir se rendre aux soins intensifs si elles contractent le coronavirus.
Dans ce contexte, Benoit Barbeau, qui oeuvre au même département que M. Archambault, presse le gouvernement Legault de mettre les bouchées doubles en matière de dépistage, surtout auprès des personnes asymptomatiques. Le directeur national de la santé publique, Horacio Arruda, a d’ailleurs fait état de son intérêt dans les derniers jours d’augmenter le dépistage de personnes asymptomatiques en prévision d’une deuxième vague du coronavirus.
D’ailleurs, le dernier bilan quotidien du gouvernement fait état d’une diminution du nombre de tests effectués. Après avoir produit 8825 tests le 1er juillet, la santé publique a diminué la cadence à environ 770 les deux jours suivants, puis 6105 et finalement 5446 tests le 5 juillet.
«On doit tester en fonction de l’existence de ces asymptomatiques, qui peuvent jouer un rôle important dans la transmission du virus», indique M. Barbeau.
La professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal (UdeM), Hélène Carabin, s’inquiète d’ailleurs de voir que de nombreux «jeunes» ne respectent pas les règles sanitaire en vigueur dans le contexte du déconfinement. Ce weekend, une éclosion de coronavirus a notamment été déclarée dans un bar de Brossard, ce qui a incité le gouvernement du Québec à menacer de fermer certains établissements.
«Les jeunes ne sont pas complètement protégées [du coronavirus]. Oui, le risque de mortalité et de symptômes sévères est plus faible. Mais le risque n’est pas de zéro», martèle l’experte.
«Il faut tester plus et faire un bon suivi des contacts.» -Hélène Carabin, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal (UdeM)
Centres de soins de longue durée
Une autre étude, publiée le premier juillet dans la revue The Lancet, fait état d’une situation similaire dans les centres de soins de longue durée de la Belgique. Celle-ci se base sur les données provenant des tests de dépistage réalisés auprès d’environ 280 400 employés et résidents entre le 8 avril et le 18 mai. Selon l’analyse, sur les 8343 personnes testées positives au coronavirus, environ 75% ne présentaient aucun symptôme apparent de la COVID-19.
Mme Carabin émet toutefois un bémol quant aux résultats de ces deux études. Il est souvent difficile de distinguer les personnes pré-symptomatiques de celles qui sont réellement asymptomatiques, explique-t-elle.
Dans tous les cas, il faut prévenir la transmission du virus. À cet égard, l’experte salue d’ailleurs la décision de Mme Plante de rendre le port du masque obligatoire dans tous les lieux publics de la métropole à partir du 27 juillet.
«Porter le masque pendant 30 minutes quand on fait l’épicerie ou qu’on prend le transport en commun, ce n’est pas la fin du monde et ça peut sauver des vies», indique-t-elle.