Un groupe d’organismes féministes craignent «un net recul» des droits des femmes si le Parti conservateur forme le prochain gouvernement fédéral. La formation d’Andrew Scheer est d’ailleurs une des seules en lice à Ottawa à n’avoir pas encore accepté de les rencontrer.
«On a de sérieuses craintes que si c’est un gouvernement qui a des idéologies conservatrices [qui est élu], il va y avoir malheureusement un net recul de tout ce qui a pu être construit dans les dernières années», a déclaré à Métro la cofondatrice du mouvement «Québec contre les violences sexuelles», Mélanie LeMay. Celle qui représente également le L’R des centres de femmes du Québec ne mâche pas ses mots: «Voter conservateur, c’est voter contre les femmes.»
Le G13, un regroupement d’autant de groupes féministes québécois, a organisé une conférence de presse vendredi à Montréal. Plusieurs représentantes ont pris la parole tour à tour pour déplorer la quasi-absence des enjeux féministes dans la campagne électorale en cours. Elles réclament notamment des mesures pour réduire l’écart de revenus entre les hommes et les femmes ainsi qu’une bonification des fonds dédiés aux services de garde à l’échelle du pays.
«C’est comme si on n’était pas considérées à notre réelle valeur. On représente 50% de la population. Comment est-ce que ça se fait qu’on ne se soit pas adressé à nous pendant cette campagne?», a questionné la coordonnatrice au Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec, Marie-Andrée Gauthier.
«Silence radio»
Le regroupement a milité pour réclamer la tenue d’un débat télévisé sur les enjeux féministes, en vain. Des démarches ont ensuite été entamées auprès des six principaux partis afin de rencontrer leur chef. Jeudi, le premier ministre Justin Trudeau a répondu à cet appel et a discuté avec des représentantes de ce regroupement.
«Il s’est engagé à revoir le système de justice dans une perspective de droits humains», a indiqué Mme LeMay. Dans un document de 80 pages qui a été envoyé aux six principaux partis, le G13 demande entre autres au prochain gouvernement fédéral de mettre en place un plan d’action national de lutte contre la violence conjugale. Celui-ci devrait prévoir une révision du système judiciaire pour assurer la protection des femmes victimes de violence ainsi que celle de leurs enfants.
Le Nouveau parti démocratique, le Parti vert ainsi que le Bloc québécois ont aussi accepté cette invitation. Des rencontres avec les chefs de ces formations auront lieu après le scrutin du 21 octobre.
Quant au Parti conservateur et au Parti populaire, c’est «silence radio», estiment les groupes de femmes.
«Ça confirme notamment que l’idéologie conservatrice a une lecture qui brime les droits des femmes.» -Marie-Andrée Gauthier
Des enjeux féministes «instrumentalisés»
Mariane Labrecque, de la Fédération du Québec pour le planning des naissances, déplore que des enjeux féministes comme le droit à l’avortement aient été «instrumentalisés» pendant la campagne électorale en cours.
«Je m’en fous si des chefs de parti sont pour ou contre personnellement. L’avortement, c’est un service médical et on doit s’assurer de l’accès», martèle-t-elle.
Mme Labrecque est «inquiète» face à la possibilité qu’un éventuel gouvernement conservateur rouvre le débat sur le droit à l’avortement. Dans les dernières semaines, Andrew Scheer a néanmoins assuré qu’il ne s’aventurera pas sur cette voie s’il devient premier ministre.
Depuis quelques semaines, le Parti conservateur et la formation de Justin Trudeau mènent une lutte serrée dans les intentions de vote.
Les promesses
Dans leur plateforme, les Conservateurs s’engagent à mettre en place un crédit d’impôt non remboursable pour les nouveaux parents.
Le Parti libéral promet quant à lui de bonifier l’allocation canadienne pour enfants. Il entend aussi mettre en oeuvre les recommandations issues de l’Enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées, tout comme le Parti vert.
Le NPD s’engage pour sa part à offrir des services de garde universels et abordables à la grandeur du pays. Le Bloc québécois propose par ailleurs une réforme de l’assurance-emploi. Celle-ci viserait à protéger les femmes qui perdent leur emploi au retour d’un congé de maternité.
Aux dernières élections fédérales, les femmes ont représenté 52% de l’électorat. Le taux de participation des femmes a d’ailleurs été supérieur à celui des hommes.